Mardi soir, dans l’émission De Afspraak, Mgr Bonny a réagi longuement à la série-documentaire « Godvergeten » – « Les oubliés de Dieu », désormais entièrement diffusée. Il a reconnu qu’à l’époque de ses prédécesseurs, « l’Église n’a pas voulu voir » les abus sexuels en son sein, « ou n’a pas pu les voir, mais elle aurait dû les voir ». L’évêque d’Anvers reproche aux générations précédentes de ne pas avoir pris le problème à bras-le-corps. Ainsi, il estime que le cardinal Danneels « n’a pas fait preuve d’autorité nécessaire » dans ce dossier, et notamment dans la gestion du cas Vangheluwe.

« Nous reprendrons contact avec les victimes »
« C’est une bonne chose que l’émission ait été réalisée », a déclaré Mgr Bonny, ce mardi soir, au sujet de la série-docu ‘Godvergeten‘. « Il s’agit de témoignages très douloureux mais dignes, et le tout est monté de manière sereine. »
L’évêque d’Anvers était l’invité central de l’émission De Afspraak sur la VRT pour réagir au documentaire qui a secoué la Flandre, à l’issue de la diffusion du dernier épisode sur la même chaîne.
Pour Johan Bonny, ‘Godvergeten’ montre que l’énergie déployée ces dernières années pour reconnaître les victimes et les auteurs de crimes n’a pas été suffisante. « Les victimes restent avec leurs blessures », a-t-il poursuivi. « Nous reprendrons contact avec les victimes dans les semaines et les mois à venir et nous écouterons d’abord ce qu’elles attendent de nous au-delà de ce qui s’est déjà passé. »
↪️ L’Église aurait dû voir les violences sexuelles en son sein, a reconnu l’évêque d’Anvers, Johan Bonny.
« Une tache aveugle coupable »
« L’Église n’a pas voulu ou n’a pas pu les voir, mais elle aurait dû les voir », a reconnu Mgr Bonny à propos des abus sexuels qui ont eu lieu en son sein pendant des années. Ces années de violences et de blessures sont « inexcusables » et « en contradiction absolue avec ce que l’Église représente », a-t-il estimé. Il a évoqué des mécanismes de contrôle défaillants, qui ont permis aux auteurs de ces violences de ne pas être retirés du système.
Ces violences étaient une « tache aveugle coupable », a-t-il regretté. Johan Bonny a confié être en colère contre la génération précédente des dirigeants catholiques, tels que Mgr Godfried Danneels, qui, selon lui, n’ont pas abordé ces questions. « Si vous l’aviez fait, il se serait au moins passé quelque chose », a-t-il pointé. « C’est maintenant à la génération suivante de tirer les marrons du feu, des marrons qui n’auraient déjà plus dû s’y trouver. »
Selon Mgr Bonny, Godfried Danneels aurait dû réagir quand, à l’époque, le prêtre Rik Devillé – qui a témoigné dans la série ‘Godvergeten’ – est venu le trouver avec des victimes et de multiples lettres, pour dénoncer les abus. « Mais le cardinal Danneels n’a pas fait preuve de l’autorité nécessaire », regrette explicitement l’évêque anversois.

↪️ Dans la série « Godvergeten », Mark Vangheluwe témoigne pour la première fois devant une caméra de la façon dont son oncle – l’évêque Roger Vangheluwe – a abusé de lui pendant des années. Et comment la conversation qu’il a enregistrée avec ce même oncle et le cardinal Danneels a marqué le début d’un flot de témoignages sur les abus dans l’Église. « J’en avais assez de l’hypocrisie. C’est sale. »
Les évêques demandent depuis des années de déchoir Roger Vangheluwe
Johan Bonny a déclaré que la conférence épiscopale belge avait une fois de plus demandé « clairement » à M. Vangheluwe de se « laïciser » Cela signifie que l’ancien évêque de Bruges – qui lors d’une interview télévisée avait qualifié de « petite relation » les abus commis pendant des années sur un neveu – serait privé de l’ordination et perdrait le titre d’évêque qu’il porte toujours actuellement.
L’intéressé « a demandé une courte période de réflexion », a confié Mgr Bonny, ajoutant que la conférence épiscopale demande depuis des années à Rome de déchoir Roger Vangheluwe de ces ordinations, sans succès jusqu’à présent. « Nous ne pouvons pas le faire. Seul lui ou Rome peut le faire, mais Rome refuse depuis des années de répondre à notre demande à ce sujet. Aujourd’hui encore. Cela nous met en colère ».
M. Bonny ajoute qu’il espère que la série pourra faire évoluer la situation. « Pour nous aussi, un point a été atteint ». Il accuse notamment l’ancien cardinal Godfried Danneels d’avoir manqué de leadership. Danneels avait tenté de convaincre le neveu de Vangheluwe de garder le silence sur les abus. « Personne ne peut laisser passer cela ! »
Des réformes et un soutien sans mesure aux victimes
Enfin, l’évêque d’Anvers a appelé à des « réformes systémiques » au sein de l’Église catholique, notamment en ce qui concerne la participation des femmes et des laïcs, mais aussi la co-responsabilité. Mais selon Johan Bonny, Rome reste encore toujours sourde à cet appel, formulé notamment par l’Eglise catholique d’Allemagne à la suite des cas d’abus sexuels.
Comme dit au début de cet article, pour Mgr Bonny, la priorité aujourd’hui reste l’accompagnement et le soutien actif aux victimes. « Que pouvons-nous faire pour soutenir ces personnes ? De quoi ont-elles besoin ? » a-t-il déclaré. Que les victimes n’aient pas reçu un sentiment de reconnaissance, il en doute. « Des reconnaissances individuelles ont eu lieu. Des cas ont été traités. Mais la question est de savoir si cela suffit. Si la réponse est non, nous devons nous pencher sur la question. »
🎬 Revoir l’émission De Afspraak avec Mgr Bonny
C.L. (avec VRT et De Standaard)