La chronique de Sébastien Belleflamme – Eglise polonaise et croisade homophobe


Partager
La chronique de Sébastien Belleflamme – Eglise polonaise et croisade homophobe
Par Sébastien Belleflamme
Chroniqueur
Publié le - Modifié le
3 min

En Pologne, le parti nationaliste PiS "Droit et Justice" et quatre-vingt-huit maires ont instauré des zones territoriales "sans idéologie LGBT" sous prétexte de défendre la famille et les valeurs catholiques. De nombreux homosexuels craignent de se rendre dans ces municipalités, les attaques homophobes et les discours haineux s’y multipliant sans complexe. Le 1er août, l’archevêque de Cracovie Jedraszewski qualifiait les milieux homosexuels de "peste" et de "maladie arc-en-ciel", félicité dans les médias par plusieurs évêques polonais.

Pas de fumée sans feu. Il y avait déjà de quoi s’offusquer des formulations totalisantes et péremptoires du Catéchisme de l’Eglise catholique. Ce dernier juge par principe "les actes d’homosexualité" comme des "dépravations graves" qui "ne procèdent d’aucune complémentarité affective et sexuelle véritable" (CEC 2357). La doctrine prétend ne juger que les actes et pas la personne. Toutefois, il me semble évident que la sexualité ne peut se réduire à des "actes" car elle est une modalité intégrale de la personne et de son amour. Discourir sur les réalités affectives et sexuelles en dehors d’une anthropologie unifiée du corps et de l’esprit est gravement déshumanisant. Une approche véritablement éthique des relations affectives ne peut ignorer les apports renouvelés de la psychologie et des sciences humaines et sociales sur la diversité des identités et orientations sexuelles. Ethique qui devrait d’ailleurs toujours s’équilibrer au croisement subtil des valeurs universelles et de la singularité du vécu. Le pape François n’a pas fait évoluer le catéchisme mais il a rappelé que "chaque personne, indépendamment de sa tendance sexuelle, doit être respectée dans sa dignité et accueillie avec respect, avec le soin d’éviter toute marque de discrimination injuste et particulièrement toute forme d’agression et de violence" (Cf. Amoris Laetitia). L’épiscopat polonais devrait en prendre bonne note. A-t-il déjà oublié que, dans son propre pays, des homosexuels portaient un triangle rose lors de leur déportation dans les camps de la mort?

Cette nouvelle croisade politico-religieuse assimilant les homosexuels à des malades ou des pestiférés contagieux est profondément choquante. Les LGBTQI+ sont-ils à tenir à l'écart comme les lépreux de jadis? Dans l’Ancien testament, le lépreux était impur, exclu à cause du risque de contagion et parce qu’on pensait qu'il subissait un châtiment divin. Il avait à réaliser une longue purification rituelle pour guérir et expier son péché s’il voulait réintégrer la communauté. Sauf que l’homosexualité n’est ni une maladie, ni une lèpre, ni une peste, ni une impureté. N’en déplaise aux diverses sectes qui improvisent des thérapies de délivrance pour expier l’homosexualité telle une lèpre spirituelle! Que de graves abus psychologiques! Cloisonner ou hiérarchiser les humains entre purs et impurs, saints et profanes, hétéros et homos, constitue autant de discriminations primaires, ignorantes de la complexité humaine et de la pédagogie du Christ. Jésus invitait à accomplir la Loi religieuse dans la primauté de l’amour du prochain et non dans des logiques mortifères. C’en est fini de déshumaniser qui que ce soit au nom de Dieu! Chaque vie humaine a son histoire, sa soif d’aimer et d’être aimé, ses parts d’ombres et de lumières. En chacune d’elle, il y a une vérité d'existence en croissance.

En définitive, il m’apparaît essentiel d’en revenir au message du Christ et de lutter contre la stigmatisation des orientations sexuelles. Regardons toutes les femmes et tous les hommes avec les yeux de Dieu! Ne nous prenons pas pour des justes en jugeant les uns et les autres en fonction de ce que nous croyons connaître de leur vie. Respectons leurs droits et laissons-nous interpeller par leur puissance d’amour. Veillons à notre propre cohérence personnelle et à ce que nos paroles, porteuses de vie, permettent à chacun d’advenir à lui-même dans la confiance et la liberté intérieure.

 

Catégorie : L'actu

Dans la même catégorie