Editorial de Jean-Jacques Durré paru dans « Dimanche Express » n°31 du 15 septembre 2013 :
Près de 50 ans après l’un de ses prédécesseurs, le pape François a lancé le même cri. En 1965, c’est le pape Paul VI qui martelait cet appel à la tribune des Nations Unies à New-York. Cette fois, c’est du balcon de la Place Saint-Pierre que le souverain pontife a redit ce mot d’ordre; la magie des technologies modernes (Internet, Twitter) a fait le reste. Les esprits chagrins parleront peut-être de naïveté, d’utopie, d’idéalisme de base… On les entend déjà : « Bel appel, mais quel impact sur la situation en Syrie ? Et sur les autres conflits qui secouent la planète ? ». Ils pourraient ajouter que malgré l’appel de Paul VI, il y a près d’un demi-siècle, le monde n’a cessé d’être meurtri par des guerres régionales meurtrières, y compris en Europe lors de la partition de l’ex-Yougoslavie.
Pourtant, ces quelques mots de « Plus jamais la guerre », prononcés le 1er septembre par le pape François juste avant l’invitation à jeûner et prier est loin d’être anodine et sans effet. Comment ne pas avoir été impressionné par cette foule silencieuse réunie autour du Saint-Père, priant pour la paix et ce, en communion avec des milliers d’autres chrétiens à travers le monde ?
Ce rassemblement interpelle à plusieurs niveaux. D’abord par son ampleur, bien sûr. C’est effectivement une « première » de voir des millions d’hommes et de femmes réunis en union de prière sur la surface du globe. Ensuite, parce que cela a été l’occasion de redire que la guerre est un échec de la paix et toujours une défaite pour l’humanité. Enfin, c’est le retour de l’autorité morale du pape. Oui, le successeur de Saint-Pierre est là pour rappeler que le monde a besoin de paix, mais que celle-ci n’est possible que s’il y a pardon et réconciliation. « Pardon », un mot que tant d’humains estiment être l’attribut des faibles. Au contraire, pardonner c’est dépasser sa propre douleur, sa propre révolte voire sa propre haine, pour aller vers l’autre. Pardonner ne veut pas dire oublier. Accorder son pardon est une force. Certes, ce n’est pas toujours facile, mais c’est indispensable.
S’il n’y avait pas eu de pardon à l’issue de la Seconde guerre mondiale, malgré les horreurs et les atrocités commises, l’Europe ne serait pas ce qu’elle est aujourd’hui. Il ne faut jamais l’oublier.
En appelant à la paix, par la prière et le jeûne, c’est-à-dire par le dépouillement qui est le sort de tant de victimes de conflits dans le monde, le pape a remis chacun devant ses responsabilités, tout en remettant au centre le message d’Amour du Christ.