
La décision des évêques flamands de développer une pastorale à l’attention des personnes homosexuelles (lire p. 5) suscite de nombreuses réactions. Pas toutes positives. Certains se demandent ainsi si cette politique est bien conforme à la ligne du Vatican, si la prière proposée n’est pas une bénédiction masquée, si le risque de dissonance entre la doctrine et la pastorale n’est pas trop grand.
Un aspect, pourtant central, a moins retenu l’attention: le timing. En l’occurrence, il ne s’agit pas seulement de comprendre pourquoi les évêques sont sortis la semaine dernière, il convient aussi d’identifier ce que cette sortie révèle de notre temps.
Relevons quatre points:
• Une dimension individuelle. Ayant eu 75 ans au mois de juin, le cardinal De Kesel, président de la Conférence épiscopale belge, approche du terme de sa mission. Ce contexte particulier lui offre une liberté dont il a décidé de faire pleinement usage. Cette communication constituera une partie de son héritage – sans doute espère-t-il aussi qu’elle colorera le choix de son successeur.
• Une dimension collégiale. Fin novembre, les évêques belges iront au Vatican dans le cadre de leur visite ad limina. La rencontre doit permettre aux prélats de présenter leur action et de prendre le pouls du Vatican. Avec cette sortie, ils décident de jouer cartes sur table. De ne pas esquiver le débat. Courageux!
• Une dimension romaine. Connaissez-vous Giacomo Morandi? Probablement pas. En février 2021, alors secrétaire de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, il signe le responsum condamnant la bénédiction des couples homosexuels. En janvier 2022, le pape le décharge de ses fonctions, l’envoyant dans un vague diocèse du Nord de la Péninsule. Pas vraiment une promotion. La raison? Personne ne la connaît. Mais on peut formuler des hypothèses…
• Une dimension ecclésiale. L’Eglise est en pleine mutation, et François n’y est pas pour rien. C’est sous son influence que s’est lancé un synode sur la synodalité, qui ouvre la voie à la reconnaissance de spécificités régionales. Avec lui, certains débats, solidement cadenassés par le passé, redeviennent possibles. Ce n’est plus l’image du pontife absolu qui domine, mais bien celle d’une Eglise en marche.
Voilà le véritable contexte dans lequel s’inscrit la démarche des évêques flamands. Et voilà pourquoi les temps que nous vivons sont passionnants.
Vincent DELCORPS