Voilà Michèle Martin en route pour rejoindre le couvent des Clarisses de Malonne. Celles-ci, en accueillant Mme Martin, font preuve d’un courage évangélique sans faille. En 2011, Michèle Martin avait demandé une libération conditionnelle, comme le prévoit le droit belge. Elle proposait de rejoindre un couvent en France. A l’époque, les pressions avaient été telles que les religieuses françaises ont fait marche arrière.
La décision a été difficile à prendre pour les sœurs Clarisses qui vivent dans la pauvreté et la discrétion. Elle a été longuement mûrie et analysée, jusque dans les répercussions qu’elle allait avoir dans la société et auprès des parents des victimes. Mais, face au fait que personne ne pouvait ou ne voulait accueillir cette hôte « encombrante », ces sœurs ont mis en avant l’Amour porté par l’Evangile. Tout en sachant pertinemment que, pour une grande partie de l’opinion publique, cette décision serait incompréhensible. Cette force évangélique doit être soulignée. Les Clarisses de Malonne montrent que si l’acte posé par quelqu’un est condamnable, la personne doit être respectée comme tout être humain. A cet égard, ceux qui prônent le lynchage d’un coupable se rendent-ils compte qu’ils s’abaissent au même niveau que celui dont ils condamnent les actes ? Il faut éviter de se laisser envahir par la dictature de l‘émotion.
La force d’une démocratie réside dans la confiance qu’elle a dans ses institutions et particulièrement dans sa justice. Celle-ci a condamné Mme Martin. Mais, dans un pays de droit, il importe que chaque justiciable, quel que soit l’acte qu’il a commis, puisse bénéficier des mêmes droits et des mêmes devoirs. La législation belge permet d’obtenir une libération conditionnelle : Mme Martin pouvait donc la solliciter. Et nul ne peut mettre en doute, a fortiori vu la sensibilité du dossier, que ceux qui se sont penchés sur l’examen de cette demande l’ont fait de façon professionnelle et indépendante.
Mais, il n’en reste pas moins vrai que l’espérance est le socle de notre Foi. Espérance dans le Christ, mais aussi dans l’homme et dans le fait que tout être humain porte en lui une part de bonté, fût-il le pire des salauds.
Comme le disent les sœurs Clarisses de Malonne, personne ne gagnerait dans notre société si nous laissions la violence répondre à la violence et faire ainsi boule de neige. A l’image de ce que disent les sœurs, « enfermer définitivement le déviant dans son passé délictueux et l’acculer à la désespérance serait une terrible marche en arrière pour notre société ».
Ainsi que l’a écrit jadis le père Delhez, cette communauté de femmes qui cherchent à vivre l’Évangile au quotidien a entendu Michelle Martin frapper à leur porte…“Frappez et on vous ouvrira”, disait Jésus.
De toute évidence, les pensées de chacun vont vers les victimes ; les petites Julie et Mélissa, décédées dans ces circonstances épouvantables, Ann et Eefje assassinées, et encore Laetitia Delhez et Sabine Dardenne, qui doivent vivre avec leurs souffrances. Comment ne pas être à leur côté et aux côtés de leurs proches ? En acceptant d’accueillir Michèle Martin, les Clarisses n’occultent pas cette souffrance des victimes et de leurs familles. Elles la partagent, à l’image du Christ.
Pensons aussi à ces religieuses dont le quotidien va être bouleversé, mais qui ont puisé dans leur foi cette force d’aller à contre-courant. C’est cela le vrai courage !
Jean-Jacques Durré et la Rédaction des Médias Catholiques