Colloque “Ni objet, ni robot, simplement humain”


Partager
Colloque “Ni objet, ni robot, simplement humain”
Par Angélique Tasiaux
Publié le - Modifié le
4 min

A Namur, des spécialistes vont se réunir autour de la notion d'humanité. Au départ, une question cruciale : l’être humain peut-il être transformé en objet et/ou en robot ? La suite les 24 et 25 mars prochains.

"La célébration permanente des bienfaits de l’innovation technologique ne peut échapper à tout observateur un peu vigilant du fonctionnement de notre société ultraconnectée et surinformée. Dès lors que l’innovation, généralement qualifiée d’avancée, concerne la santé, le bien-être ou le confort, ou à tout le moins est présentée sous cet angle avantageux, l’esprit critique est mis en sourdine.

Trois innovations, qui touchent à l’intimité de l’être humain et dont la face occultée mérite d’être observée, doivent nous interpeller.

La première innovation, fort peu médiatisée il est vrai, est la congélation des ovocytes, laquelle permet à de jeunes femmes en âge d’être mère de différer leur maternité et ainsi de ne pas entraver leur plan de carrière. Elle est présentée par ses promoteurs et partisans comme un nouveau progrès pour la femme puisqu’elle lui permet de maitriser son calendrier de vie. Elle répond aussi aux intérêts de l’entreprise qui l’emploie ; le bon fonctionnement d’une entreprise s’accommode mal d’un congé de nombreux mois accordé à une collaboratrice efficace. La pratique a, en toute logique, les faveurs des multinationales des big data. C’est ainsi que Facebook a été la première, dès 2014, à inclure la congélation des ovocytes dans l’assurance-santé offerte à ses employées. Google a fait de même, suivie par Apple. Quant aux servitudes et risques imposés à la femme, entrainée dans une surmédicalisation contraignante, il en est peu question. Les conséquences potentielles pour l’enfant à naître, notamment sur son équilibre psychique et émotionnel face à une mère qui pourrait parfois être grand-mère, sont elles aussi ignorées. Certains estiment que la congélation des ovocytes constitue une réelle avancée, mais celle-ci a lieu dans l’estompement des valeurs humaines fondamentales et dans la dynamique de soumission sans limites aux intérêts économiques.

La seconde innovation vient d’être adoptée récemment par une entreprise belge. Newfusion, une société malinoise, a décidé d’implanter une puce électronique RFID sous la peau de ses travailleurs pour permettre leur identification. Contrairement à un badge, qu’on peut perdre ou oublier, la puce RFID (qui contient les données personnelles) fait partie intégrante de celui qui la porte, enfouie dans la chair de sa main. Certes, les travailleurs ont donné leur accord pour subir cette anodine opération, réputée sans risques ( ?). Ici aussi, il s’agit d’une avancée importante, mais c’est en termes de contrôle social, de violation potentielle de la vie privée et de perte de dignité humaine. Pour plus de sécurité et de confort, le travailleur est ravalé au rang d’animal d’élevage industriel.

Enfin, une troisième innovation permet de pallier l’incapacité d’enfanter ou l’inconfort de la grossesse (!) en ayant recours par contrat à une mère porteuse. La mère de substitution s’engage à porter l’enfant à naître jusqu’à l’accouchement. A la naissance, l’enfant est cédé par cette mère biologique au couple commanditaire réputé disposer de tous les droits parentaux. Cette pratique s’appelle Gestation Pour Autrui (GPA). Elle est légale aux Etats-Unis ainsi qu’aux Pays-Bas et en Roumanie. Elle est de facto tolérée, puisque non interdite, en Belgique, en Irlande, en Pologne, au Royaume-Uni et en Slovaquie. Si le désir d’enfant d’un couple est a priori légitime, dans le cas de la GPA, ce désir est satisfait par le recours à une technique éprouvante pour celle qui loue son utérus dans le cadre d’une transaction marchande. C’est une illusion, teintée d’hypocrisie, de considérer qu’une telle pratique puisse être altruiste et n’entraîner aucune conséquence psychique ni pour l’enfant qui en résulte ni pour la mère porteuse, réduite au statut de prestatrice de service. La GPA transforme la procréation en une activité salariée et le bébé en produit commercial.

Ces trois avancées technologiques sont autant de signaux d’alarme annonciateurs d’une banalisation préoccupante. Ils révèlent l’effondrement des limites éthiques et l’abandon programmé des valeurs humanistes sous la pression du « progrès ». La fabrication généralisée de l’humain et le transhumanisme ne sont plus très loin."

Toutes les infos sur ce colloque qui aura lieu à l'Université de Namur les 24 et 25 mars 2017, à l'initiative du Grappe asbl (Groupe de réflexion et d'action pour une politique écologique).

 


Dans la même catégorie