Moins de 24 heures après la parution du document final, nous avons pu nous entretenir avec le président de la Conférence épiscopale belge. Qui s’est surtout montré désireux de poursuivre le chemin.
Etes-vous un archevêque heureux ? Quelle est votre impression générale par rapport à ce texte ?
Je dois reconnaitre que je n’ai pas encore eu le temps de lire le document en entier. Mais si le synode est fini, peut-être les choses ne font-elles que commencer. Il faut vraiment continuer cette dynamique et retourner vers les communautés locales, vers les fidèles. Comme le pape l’a demandé, on doit à présent discerner et mettre en œuvre des actions concrètes. On ne peut pas en rester à des principes ou à de belles intentions.
Le synode renvoie effectivement la balle vers les Eglises locales. Quelles seraient les balles que vous aimeriez saisir ?
Oui, c’est vrai qu’il faut prendre la balle au bond. La première chose que nous devons faire, c’est d’évaluer nos pratiques et d’identifier ce qui est synodal et ce qui l’est moins. Alors oui, la Belgique vit déjà pas mal cette dimension. Et en même temps, les structures ne suffisent pas. Par exemple, il ne suffit pas de réunir un conseil pour être synodal ! Si les paroissiens se rassemblent autour du curé seulement pour exécuter ce que deux ou trois personnes ont décidé, ce n’est pas synodal. De même, le droit demande l’existence d’un conseil presbytéral. Mais la question demeure de savoir comment ce conseil fonctionne – et comment il peut fonctionner de manière plus synodale.
D’autres points ?
Oui. Il faut prolonger ce synode par une réflexion théologique. Parmi les Belges présents ici, plusieurs ont le sentiment qu’on n’a pas encore été assez loin. Je vais en parler avec mes confrères évêques mais je crois que ce chantier doit être une priorité. D’autant que nous avons, en Belgique, des ressources pour le mener.
Vous repartez donc avec des projets…
Le conseil épiscopal de l’Archidiocèse a déjà décidé que les prochains mois seraient consacrés à la mise en œuvre de la synodalité. Nous allons, au départ de cette démarche de trois ans, tirer des lignes directrices pour implémenter davantage la synodalité à tous les niveaux. Et cela demandera du temps car cela demande une conversion. Le modèle clérical est toujours présent – pas forcément avec les clercs, parfois aussi avec les laïcs. Durant le premier millénaire, l’Eglise a connu une assez grande décentralisation ; durant le deuxième millénaire, la centralisation s’est fortement renforcée. Il s’agit aujourd’hui de vivre la synthèse et de trouver un équilibre entre les deux. Parallèlement, il faut approfondir le rôle des ministres – notamment ordonnés – et l’articulation entre ceux-ci et les autres baptisés. Cette question n’a pas été beaucoup travaillée au synode. Il y a un an, le cardinal Grech [secrétaire général du synode, ndlr] m’avait pourtant dit que les premiers concernés par le synode étaient les évêques. Je crois qu’on doit donc pouvoir se remettre en cause. Une question me semble cruciale aujourd’hui : celle de la concentration des pouvoirs sur l’évêque. La question des abus a parfaitement illustré ce problème : l’évêque se retrouve régulièrement juge et partie, notamment vis-à-vis des prêtres de son diocèse. Peut-être fait-on parfois peser un poids trop grand sur l’évêque. Il y a là un lieu où l’on doit encore grandir.
Propos recueillis par Vincent DELCORPS