Opinion : Ces paroissiens qu’on voit trop peu… à la messe !


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Opinion : Ces paroissiens qu’on voit trop peu… à la messe !
Par André DELBOSSE
Publié le
4 min

Pourquoi un tel écart entre la faible pratique religieuse et le nombre important de personnes qui se disent catholiques? Pour André Delbosse, cette question, qui n’est pas nouvelle, nous engage à une réponse ecclésiale.

Parmi les questions qui se posent aujourd’hui à nos communautés chrétiennes, l’une concerne la faible pratique cultuelle.
Mais elle est envisagée ici sous un angle particulier car il ne s’agit pas d’évaluer la vitalité d’une Eglise locale sur base des statistiques de pratique religieuse, mais plutôt de réfléchir à l’écart entre le nombre de citoyens qui se disent catholiques et tiennent à leur identité chrétienne et le nombre de ceux-ci qui participent régulièrement aux célébrations.
Quel regard porter sur cette chute de la pratique religieuse?
Quelle signification peut avoir une telle statistique?
Ces questions peuvent être éclairées par une autre posée particulièrement par les jeunes et je pense ici à mes enfants et petits-enfants: “A quoi sert la pratique religieuse?”
Pour argumenter mon point de vue je me place dans une perspective pastorale en me référant à la mission de l’Eglise dans le monde à laquelle est ordonnée la présence des chrétiens dans l’Eglise.

L’Eglise croît par témoignage

La mission de l’Eglise est d’annoncer l’Evangile dans le monde et elle le fait par témoignage comme le déclare le pape François: “l’Eglise croît par témoignage”.
Ce témoignage est l’affaire de tous les membres de l’Eglise, de chaque baptisé, pas seulement de certaines élites paroissiales ou spécialistes…
Ce n’est pas facile, car il s’agit de la fraternité, du souci de l’autre, de l’amour-charité, de la vérité, des vertus (théologales et cardinales)…
Il n’est pas garanti que cela soit plus facile pour un pratiquant régulier que pour un "peu pratiquant".
Il n’est pas garanti non plus que les pratiquants réguliers soient meilleurs témoins que les "peu pratiquants".
Cependant, s’agissant de l’Evangile de Jésus-Christ, les chrétiens savent que c’est le Christ qui agit par eux et en eux et qu’en définitive, comme le pape François le rappelle, “sans Jésus nous ne pouvons rien faire”.
Cette affirmation est fondamentale et sa prise en compte est décisive: si l’intention d’un chrétien est de s’engager dans la mission de l’Eglise, il doit se disposer à le faire "avec Jésus".
Cela engendre la question: “Comment puis-je me laisser guider par Jésus, par l’Esprit? Comment puis-je marcher avec Jésus? Comment me faire le compagnon de Jésus?”
Certes, la réponse à cette question n’est pas simple ni unique, il appartient à chacun de s’en saisir, mais, théologiquement, il s’agit d’intégrer l’initiative divine et la coopération humaine. (M. Blondel).

Pas seulement la messe!

Pour que cette coopération humaine soit fructueuse et durable les chrétiens ont besoin individuellement et collectivement de formation, d’échanges, d’encouragements et de supports mutuels, d’approfondissement spirituel… toutes pratiques organisées en paroisse ou autre communauté.
Il s’agit bien de pratique religieuse au sens plénier, pas seulement de la messe!
Cela étant, on peut comprendre que tous les fidèles ne ressentent pas ce besoin et cette exigence de la même façon, ne vivent pas de la même façon leur relation à Dieu et à l’Eglise, et si certains ont grand besoin de la vie en communauté et sont assidus au culte, d’autres vivent un christianisme plus "intérieur" et se maintiennent à une pratique du culte occasionnelle ou ciblée.
Mais il me semble que rien n’interdit de penser que les uns et les autres puissent exercer autour d’eux, de façon égale, un témoignage chrétien authentique.
Qui pourrait nier cette possibilité?

Il n’y a pas deux classes de chrétiens

Selon cette hypothèse, la distinction entre les pratiquants réguliers et les "peu pratiquants" ne peut être établie que sociologiquement.
Du point de vue de la théologie pastorale il n’y a pas deux classes de chrétiens.
Quelle serait alors la place à reconnaître (ou à proposer) dans l’Eglise (voire à l’église) aux fidèles qui ne pratiquent "pas assez"? (ne pourrait-on dire "pas autant" que les pratiquants assidus?).
Pour ma part, mes observations sur le terrain paroissial me portent à quelques remarques:
1. Il ne s’agit pas seulement d’accueillir les peu pratiquants, mais plutôt de les rencontrer comme des acteurs pastoraux potentiels en valorisant leurs charismes.
2. Le regard que portent les équipes pastorales sur les peu ou pas pratiquants doit être très ouvert, d’une grande modestie et dénué de tout sentiment de supériorité ecclésiale.
3. L’identité chrétienne ne peut être banalisée, le culte n’y suffit pas, il n’y est pas premier et ne doit pas être un objet de compétition ou de comptabilité.

André DELBOSSE

Chapeau et intertitres sont de la rédaction.

Catégorie : Opinions

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