Les réseaux sociaux, un univers incontrôlable ?


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Les réseaux sociaux, un univers incontrôlable ?
Par La rédaction
Publié le - Modifié le
6 min

Aujourd’hui, à moins d’aimer nager à contre-courant, chacun d’entre nous possède au moins un profil créé dans l’un des réseaux sociaux les plus populaires: Facebook, TikTok, WhatsApp, Instagram ou Twitter. Un monde complexe et addictif passé en revue.

Les réseaux sociaux, peut-on encore s'en passer ?
Ces réseaux sociaux devenus omniprésents dans nos quotidiens (c) CC0 Pixabay

Les cinéphiles se souviennent probablement du film La Grande Lessive (!), sorti en 1968. La comédie grinçante ciblait, déjà, les méfaits d’un excès d’écrans (de télévision) sur la jeunesse. Nul doute que son réalisateur, Jean-Pierre Mocky (disparu en 2019), aurait adoré, aujourd’hui, s’en prendre aux réseaux sociaux avec un remake probable: Le Grand déballage (!). Des réseaux devenus omniprésents dans notre quotidien hyperconnecté.

A quoi peuvent-ils servir pour les entreprises? Quel avenir leur semble promis? Et qui sont ceux qui se déconnectent des plateformes? Eléments de réponse avec Yannis Kadari, éditeur, et Xavier Degraux, formateur et consultant en marketing digital.

Un phénomène de société

Pour l’anecdote, l’expression réseaux sociaux aurait été créée et popularisée pour la première fois en 1954 par l’anthropologue britannique John Arundel Barnes. Son article "Class and Committees in a Norwegian Island" paru dans la revue Human Relations, a posé un jalon fondateur avec cet extrait: "Chaque individu a un certain nombre d’amis, et ces amis ont leurs propres amis; certains se connaissent les uns les autres, et d’autres non. Il me semble donc approprié de parler de réseau pour désigner cette sphère sociale." Une façon de rappeler qu’un réseau social existe dès qu’il y a interaction entre des individus ou groupes sociaux qui souhaitent communiquer ensemble.

Et force est de constater que les réseaux sociaux ont fait florès. Comme le prouvent d’ailleurs les chiffres publiés pour avril 2023 par le site We are social. Ils donnent le tournis, avec plus de 4,8 milliards d’utilisateurs dans le monde, en progression annuelle de 150 millions. Côté popularité, le site confirme la première place de Facebook avec 2,96 milliards d’utilisateurs, suivi par Youtube (2,52) et le duo WhatsApp et Instagram avec, pour chacun, 2 milliards d’utilisateurs. Quant à TikTok, au cœur d’une polémique (lire l’encadré), la plateforme progresse, avec 1,09 milliard, pour atteindre une cinquième position dans le classement.

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Un espace de libertés en quête de régulation

S’échanger des informations, se découvrir des attaches avec les uns et les autres ou partager des photos sur les réseaux, très bien. Mais derrière cet usage classique se cache une face plus obscure. Faite de complots et de fake news avec de fausses vraies informations qui rendent difficile le tri entre le bon grain et l’ivraie. La récente crise sanitaire du Covid l’a prouvé à l’envi avec cette multitude de mensonges liés aux vaccins. Comme ces puces connectées à la 5G qui auraient été injectées via la vaccination pour prendre le contrôle des individus. Ou ce conseil de boire du désinfectant pour tuer le virus, une idée distillée en ligne par l’ex-président américain Donald Trump, puis réfutée.

Cependant, la problématique des fake news ne date pas d’hier. En 2017, déjà, le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker avait demandé à sa commissaire européenne du numérique, Mariya Gabriel, de s’attaquer à ce fléau. Un groupe d’experts avait alors vu le jour, le High Level Group of Experts (HLGE), composé de journalistes, de représentants des géants du web et de la société civile. Mais sans pour autant régler la problématique. Les fake news et autant de complots hallucinés ont continué leur travail de sape de la crédibilité de l’information présente sur les réseaux. Alors, de nouvelles initiatives gouvernementales ont vu le jour.

Des électeurs encore traumatisés par la désinformation

"Et il est plus que temps!", souligne Xavier Degraux. "Du concret s’annonce au niveau européen avec le DSA (Digital Service Act), une directive qui devrait entrer en application à la rentrée de septembre et cibler tous les géants technologiques. Beaucoup de questions relatives aux réseaux sociaux et à leur régulation sont en jeu. Comme le respect de la vie privée ou la protection des données personnelles."

La directive va concerner également la modération des contenus, la transparence des algorithmes et la protection des données – sur ce dernier point, le groupe Meta (maison mère de Facebook) vient de se voir infliger par l’Irlande une amende record de 1,2 milliard d’euros pour un transfert de données privées vers les Etats-Unis. Comme le précise Xavier Degraux, il reste à voir si la directive DSA sera capable d’influencer les autres marchés. Les Etats-Unis suivront-ils? Le pays avait été traumatisé lui aussi par la désinformation. Notamment lors de l’élection de Donald Trump en 2016, marquée par le Russiagate. Or, cette menace est toujours possible pour les prochaines élections présidentielles de 2024.

Une jolie vitrine pour les entreprises

Reste que résumer les réseaux sociaux à ces échanges de posts et de photos destinés à attirer l’attention et gagner des likes serait bien trop réducteur. Les réseaux ont aussi une utilité reconnue. Comme outil précieux pour capter de nouveaux clients intergénérationnels et gagner de la sorte des parts de marchés. Preuve par l’exemple avec le témoignage de Yannis Kadari, fondateur des éditions Caraktère, spécialisées dans la littérature historique. Une société qui fête ses 20 ans cette année et qui doit son succès franco-belge, pour partie, à sa présence sur les réseaux sociaux.

Entre un site internet classique et l’utilisation des réseaux sociaux, y a-t-il un choix plus judicieux qu’un autre à effectuer pour la bonne marche des affaires? "La complémentarité entre les deux outils est évidente, explique l’éditeur. Un site internet permet d’identifier la provenance des nouveaux inscrits au moment du premier achat. Les réseaux sociaux ont quant à eux vocation à établir et maintenir le dialogue avec nos abonnés. Ils permettent des échanges rapides et simples entre une entreprise et ses clients, mais aussi de recruter de nouveaux clients. Qui seront redirigés ensuite vers le site de l’entreprise."

Est-il possible de rester à l'écart ?

Pour les entreprises encore réticentes à aborder les rivages du numérique, est-il encore possible aujourd’hui de rester à l’écart des réseaux sociaux? La réponse de Yannis Kadari est sans appel: "En me limitant à mon expérience, je considère comme inenvisageable pour une entreprise de se passer des réseaux sociaux. Ils sont devenus des outils essentiels dans notre quotidien. Pour permettre de dialoguer en temps réel avec les clients. Ils jouent aussi un rôle crucial sur le plan commercial pour capter de nouveaux lecteurs et retenir l’attention de notre public déjà existant."

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Dès lors, comment réussir son entrée sur ces réseaux? "La meilleure façon d’aborder ces plateformes pour une entreprise consiste à choisir ce qui correspond le plus à son ADN. Et de là trouver sa propre stratégie et la ou les plateformes idéales, sélectionnées en fonction de ses cibles et de ses objectifs. Avec une ligne éditoriale définie et une avancée progressive, tout sera possible pour connaître le succès", précise Xavier Degraux.

Philippe DEGOUY

Catégorie : L'actu

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