En début de semaine, un article de Vatican News révèle l'avis de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, interdisant les bénédictions d'unions homosexuelles. Depuis lors, les réactions sont nombreuses autant sur les réseaux sociaux que dans nos boîtes mail.
La déclaration de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi a notamment choqué des internautes homosexuels qui en témoignent sur notre page Facebook: "Je commence à en avoir marre de ces curés en robe à Rome qui décident pour les autres ce qui est bien ou mal, écrit Dominique Bossy. Je suis né homosexuel. Je ne le suis pas devenu. Croyez-moi bien que si j’avais pu choisir, j’aurais choisi d’être comme tout le monde et d’échapper aux moqueries, aux rejets, aux brimades…
Je refuse donc ce Dieu romain qui m’aurait créé homo et en même temps me condamnerait et me classerait parmi les pécheurs. Mais je suis fier d’être aimé et choyé par mon Dieu. Je suis fier qu’Il soit mort sur la croix pour moi et qu’il m’entraîne avec lui dans la vie éternelle.
Je ne suis pas fier d’être gay. Mais je suis fier d’être l’homme que je suis, avec mes qualités et mes défauts. Je suis fier d’aimer et d’avoir aimé ceux que Dieu a mis sur mon chemin.
Je précise que j'ai des amis, religieux, prêtres, évêques... qui ne sont pas d'accord avec cette prise de position de Rome. Je suis fier d'être leur ami."
Enfants de Dieu
La Communauté du Christ Libérateur, qui rassemble des chrétiens homosexuels, s'exprime dans un courrier adressé aux évêques: "Chez beaucoup d’entre nous cette nouvelle a produit consternation, incrédulité, colère, tristesse, découragement, agressivité… Quoi ! Nous demandions de pouvoir célébrer ouvertement en Église nos engagements de vie commune de couple. Éventuellement par une prière dans l’église ou une petite bénédiction (même seulement dans la sacristie) et ce qu’on reçoit de Rome, ce sont des malédictions généreusement distribuées sur l’ensemble de notre communauté LGBT !" Dans cette même lettre, les signataires interpellent: "Nous pensons que vivre de cette manière n’interdit pas, au contraire de vivre en enfants de Dieu. Ne faudrait-il pas rappeler que l’Église a souvent béni sans état d’âme les chiens, les motos, les médailles et parfois les armées alors qu’elle refuse aujourd’hui de bénir l’amour entre deux personnes ? Ne faudrait-il pas rappeler aussi tous ces gays et lesbiennes en couple ou mariés qui portent l’Église au quotidien dans nos paroisses en tant que marguilliers, organistes, sacristains, choristes, membres d’équipes pastorales, économes, catéchistes, délégué épiscopal, journalistes, etc ? Exploiterait-on leurs compétences en méprisant leur amour et leur vie ?"
De nombreuses autres réactions sont parvenues à la rédaction de Cathobel après la prise de position de Mgr Bonny dans ce dossier. La plupart se félicite de cette intervention de l'évêque d'Anvers, soulignant une parole courageuse. En petits comités en privé, ou sur les réseaux sociaux comme Charles Delhez que nous citons ici, des prêtres ont dit: "Merci à Mgr Bonny, évêque d’Anvers, pour sa réaction courageuse. 'Je veux m’excuser auprès de tous ceux pour qui ce [texte] fait souffrir et reste incompréhensible. […] Leur mal d’Église est aujourd’hui aussi le mien.' Merci aux autres évêques belges de vouloir continuer à accueillir et accompagner au nom de l’Évangile toutes ces personnes. Ce qui est à nos yeux un 'faux pas' illustre que l’Église n’avance pas partout à la même vitesse."
J'espère que votre déclaration - et de similaires - gagnera en influence au sein de l'Église tout en protégeant le Pape François.
Dans le même sens, la lettre adressée à Mgr Bonny par le frère dominicain Mark Butaye dans laquelle il remercie l'évêque d'Anvers d'avoir apporté "une vision et une préoccupation auxquelles de nombreux évêques, croyants et autres personnes seront heureux de souscrire. Cela nous aide à témoigner, à prêcher et à vivre ensemble". Le dominicain dénonce également un puissant lobby au sein de l'Eglise: "Ce lobby vise plus loin qu’une simple réponse de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. Le lobby n'hésite pas à mettre le pape François devant le char, à le pousser à des déclarations contradictoires ou peut-être pire."
Une chrétienne très active sur la sphère catholique connectée, Brigitte Lajoie, souligne à grand renfort de pouces en l'air: "Parfois il faut agir vite et selon sa conscience, ce qu’a fait l'évêque néerlandophone Johan Bonny pour rassurer la communauté des homosexuels suite au refus du Vatican de bénir leurs unions".
Dans la lettre déjà citée de la Communauté du Christ Libérateur adressée aux évêques de Belgique, les chrétiens homosexuels évoquent leur souhait de ne plus être des "passagers clandestins" dans l'Eglise: "nous aurions besoin d’une vraie réforme des textes doctrinaux qui nous caricaturent. Nous pensons que vous êtes en position adéquate pour influencer les positions de la Curie et obtenir d’elle des documents qui ne soient pas aussi outranciers. Car ils défigurent l’Église que nous aimons.
D'autres dossiers urgents
D'autres internautes critiquent Mgr Bonny sur le fait de ne pas prendre conscience d'autres problèmes plus urgents à soulever : "on a autre chose à faire en Belgique, comme par exemple, la liberté de culte, le financement des bâtiments scolaires, les cours de religion dans l'officiel..."
Les chrétiens remarquent aussi cette vitesse de réaction différente entre celle sur le débat des unions homosexuelles, publiée par Mgr Bonny le lendemain de la diffusion du responsum de la CDF, et l'absence visible d'interventions dans d'autres débats en Belgique. Citons par exemple Charles d'A.: "On aimerait beaucoup que les évêques se fâchent pour retrouver l'accès aux églises à plus de 15 fidèles..." ou Charles de Pauw sur la page Facebook de Cathobel: "[les évêques] sont plus rapides pour réagir quand il s’agit d’un acte de désobéissance de leurs part à la doctrine de l’Église, que pour le retour aux cultes… Évidemment l’on ne coupe pas la main de celui qui vous nourrit!"
Désaccord avec Rome?
Il est à noter que d'autres réactions virulentes arrivent des chrétiens de la base. Luc Penninckx écrit à l'évêque d'Anvers pour se dire "sidéré par vos très récentes déclarations urbi et orbi promouvant les relations homosexuelles, voir bisexuelles et surtout votre contestation tonitruante face à la position de notre Sainte Église, à savoir son opposition aux mariages homosexuels." Même s'il s'agit là d'une interprétation très personnelle des propos de Mgr Bonny, l'interlocuteur considère que cela décrédibilise la valeur du mariage religieux.
D'autres lecteurs de Cathobel s'étonnent de cette forme de désobéissance que Mgr Bonny oserait faire par rapport à Rome: "Si Monseigneur Bonny n’est pas d’accord avec le Souverain Pontife, qu’il ne mette pas son désaccord sur la place publique. Ainsi il se rend en outre coupable, ce qui est plus grave, de jeter le doute dans le troupeau des chrétiens de Belgique. Un Pasteur ne peut troubler ses brebis !"
"Qui suis-je pour juger ?", c'est une question que le pape François martèle en de multiples occasions, pour inviter à l'ouverture et l'audace. Dans sa réaction sur les réseaux sociaux, Charles Delhez s'étonne de cette différence apparente dans la ligne de conduite du pape: "L’Église doit accompagner ceux qui se tournent vers elle. Elle est, répète le pape François, un 'hôpital de campagne' et non la douane du salut. Le pape a laissé paraître ce texte. Il ne me semble pas dans sa ligne habituelle – qui n’a retenu sa phrase célèbre : Qui suis-je pour juger ? – ni dans celle du récent synode sur la famille, comme en témoigne l’évêque d’Anvers. Je sens François piégé par un 'système' théologique qui a sa logique emprisonnante."
Sur ce sujet:
Rendez-vous ce 23 mars à 𝟭𝟳𝗵𝟬𝟬 sur le 𝟵𝟯.𝟴 𝗳𝗺, dans Curiocité - RCF Liège
Monseigneur Jean-Pierre DELVILLE, Évêque de Liège, précisera la position de la Conférence Épiscopale de Belgique par rapport à la note publiée par la Congrégation pour la doctrine de la foi qui "déclare illicite toute forme de bénédiction qui tend à reconnaître les unions homosexuelles".
