Dire la Bible est un stage organisé par l’acteur Gérard Rouzier. Trois jours de corps corps avec un passage des écritures pour faire exploser les barrières mentales.
« Dans la méditation zen que j’ai longtemps pratiquée, il n’y avait pas pour moi de présence avec laquelle entrer en contact. C’est en découvrant le prologue de St-Jean que j’ai véritablement trouvé le sens que je cherchais dans mes méditations. Le Christ m’est apparu comme l’accomplissement manifesté du Dieu que nous avons tous en nous ». Pour celui qui cherche à faire le lien entre les pratiques méditatives venues d’Orient et la religion chrétienne, comme j’en suis, ces mots m’ont immédiatement frappée. Ils étaient ceux de l’acteur Gérard Rouzier qui offre depuis 15 ans un spectacle dont jamais il ne se lasse: l’évangile selon St Jean. Lorsqu’il m’a parlé d’un stage qu’il organisait plusieurs fois par an, appelé Dire la Bible, je me suis dit qu’il était peut-être temps pour moi d’oser m’y rendre.
C’est ainsi que je me suis retrouvée, entourée d’une dizaine de personnes, au centre artistique de Piégon dans la Drôme pour tenter en sa compagnie de « Dire la bible ». En m’y rendant, je ne savais pas précisément ce qui m’attendait. Je devinais qu’il nous faudrait apprendre un texte par coeur pour qu’il se fraye un chemin nouveau jusqu’à nous. Je craignais de ne pas avoir la mémoire, mais me disais que je relèverais sans doute le défi à force de répétitions. Comme s’il avait pressenti que j’allais me contenter d’une petite récitation faite à l’occasion d’un long week-end, il m’a donné à apprendre l’un des textes les plus énormes, les plus essentiels des évangiles: le prologue de St Jean, lui-même ayant été profondément secoué par sa lecture. Il s’agissait de dire: « Au commencement était le Verbe, et le Verbe était tourné vers Dieu et le Verbe était Dieu, il était au commencement tourné vers Dieu. Tout fut par lui et rien de ce qui fut, ne fut sans lui…. » A alors commencé un corps à corps de plusieurs jours pour sortir de la récitation de l’élève passif au maitre sachant et surtout, pour faire exploser les constructions mentales qui nous placent à distance de ce que l’on dit, en nous laissant, le plus souvent, encombrés de questions insolubles, à l’orée de la foi.
Se faire la caisse de résonance émue de mots insensés
La dimension cosmique du texte m’a d’emblée posé problème: comment était-il possible de dire l’origine du monde, sans avoir le sentiment persistant que je ne sais pas de quoi je parle. Ma première tentative de récitation était donc une pure déclamation un brin ridicule que j’avais accompagnée de quelques gestes démonstratifs. « Il ne faut pas être dans l’explication de l’origine du monde, mais la vivre avec les sens, l’habiter », n’a alors cessé de me répéter l’acteur. Oui mais comment? Des mouvements amples pourraient-ils m’aider à ressentir l’immensité du texte? Des images mentales que je convoquerais en regardant au loin, par dessus le paysage de la Drôme pourraient-elles m’aider à installer ce texte en moi ? A mes côtés, l’une des participantes s’était appropriée le récit des combats et doutes d’un homme cherchant la confirmation de sa foi, avec une spontanéité bousculant la sacralité des phrases qui me laissaient pantoise. Ces prières au Seigneur étaient-elle peut être plus faciles à incarner ? Après 3 jours de tâtonnements où je suis passée de la déclamation péremptoire au chuchotement intérieur, c’est l’ouïe qui m’a sauvée. Comment cela? Au début de chaque séance, nous démarrions par un temps méditatif où nous étions invités à nous focaliser sur un sens. Ce n’est que lorsque j’ai choisi l’ouïe, en entendant le chant des oiseaux par la fenêtre que je suis parvenue, tout en étant bien plantée sur mes deux jambes, à sortir littéralement de la pièce où nous récitions et à me faire la caisse de résonance émue de ces mots insensés. Enfin, un peu d’émotion! J’avais donc été finalement remuée. Il m’est apparu soudain combien j’étais demeurée une voix désincarnée.
En quittant le stage, j’ai continué dans le train qui me ramenait à Paris à murmurer les paroles du prologue, afin de les faire circuler en moi et me disais tout en filant à grande vitesse à travers la Bourgogne, que j’avais sans doute fait quelques petits pas en avant. Il n’était pas question d’avoir touché à la certitude d’une foi confirmée, mais plutôt d’avoir entendu avec les sens, tous les sens, ce qui disent certains mots de la Bible. Songeant à cette petite percée, m’est revenu le constat du philosophe Marcel Légaut: que le christianisme est une religion d’appel et non d’autorité et qu’elle doit retrouver une pratique plutôt que des enseignants. « Si peu de gens reconnaissent leur vocation. Pourquoi? Parce qu’on les dirige! », écrivait Gitta Mallasz dans Dialogues avec l’ange, un texte révélé au coeur de la seconde guerre mondiale à une Hongroise, réfugiée à la campagne avec des amis et, découvert pour ma part lors de ce stage.
L.H.
DIRE LA BIBLE
du dimanche 25 août à 9h30 au jeudi 29 août
Prix de la session: 200 €
Renseignements et inscriptions: huguette.lasalle@orange.fr
DIRE LES ÉVEILLEURS
du jeudi 8 au mercredi 14 août
Fraternité spirituelles autour de Marcel Légaut (Etty Hillesum, Maurice Zundel, Karlfried Graf Durckheim, Saint Augustin…)
Prix 329 € (Session + pension complète)
Inscriptions auprès de Françoise Servigne f.servigne@free.fr
Pour toute autre info: www.compagniedusablier.org