Cela fait près de deux mois qu’ils sont rentrés au pays. Les 51 Belges francophones partis au Panama ont retrouvé le chemin du quotidien. Mais comment garder le feu sacré? Ils y réfléchissent. Et l’Eglise les accompagne.
Ils ont encore la tête dans les étoiles. En fermant les yeux, les Belges qui se sont rendus au Panama peuvent replonger là-bas. Goûter à nouveau à l’authenticité de cet accueil. Se rappeler cette intrusion totale dans la forêt tropicale. Ces déplacements en pirogue. Réécouter les paroles entendues lors des catéchèses. Et revoir le pape François. « Que c’était bon de s’enflammer ensemble aux JMJ, en laissant le feu embraser nos vies », se souvient Benoît, 27 ans, originaire de Liège.
Le ciel azuré de Panama
Ils ont encore la tête dans les étoiles. Mais de moins en moins. Car, pour vivre sa foi, le temps maussade de Belgique est moins inspirant que le ciel azuré de Panama. « L’expérience que nous avons vécue là-bas, nous sommes invités à la réitérer dans notre quotidien », reprend Benoît. « En même temps, soyons clairs: de retour à la maison, le feu ardent perd de sa vigueur. Notre foi est un peu éprouvée. Nous devenons libres de retenter une rencontre avec Dieu, ou simplement de regarder le feu de paille qui se meure… »
Etonnamment, l’après-JMJ ne constitue pas une priorité pour les services diocésains de Pastorale des jeunes. « Notre service n’a pas vraiment pensé au retour des JMJistes », reconnaît-on au Vicariat de Bruxelles. A Namur, on contextualise. « Ces JMJ étaient lointaines. Elles ont donc attiré des jeunes déjà ‘convaincus’, bien ancrés dans leur foi, et qui ont donc déjà trouvé des lieux, des communautés ou des groupes pour se ressourcer et se soutenir mutuellement. Nous pensons vraiment qu’ils n’attendent rien de nous en tant que Service Jeunes diocésain. »
Catherine Jongen est dans une autre situation. Responsable de la Liaison des Pastorales des jeunes, elle est à ce titre « Madame JMJ » pour la Belgique francophone. « Il est évident qu’on veut éviter que le soufflé retombe », insiste-t-elle. « C’est d’ailleurs une question sur laquelle on a déjà travaillé pendant les JMJ. On a demandé aux jeunes de réfléchir aux attentes qu’ils avaient par rapport à l’Eglise. » Catherine Jongen ne manque pas d’idées. Elle compte inviter chaque jeune à télécharger l’application « Prier en chemin », qui permet de recevoir sur son smartphone les Textes du jour et une méditation. Elle prévoit également de mettre sur pied une formation interdiocésaine, pour les jeunes qui désirent accompagner des plus jeunes. Enfin, le 15 mars se tiendra une soirée « retrouvailles » pour les JMJistes… et ceux qui auraient aimé l’être.
L’appel à l’aide de « Madame JMJ »
Mais si Catherine Jongen a des idées, elle a aussi des souhaits. En particulier, elle voudrait davantage de moyens. « Monseigneur Kockerols, l’évêque référendaire pour les jeunes, est profondément attentif à cette question. Il y consacre beaucoup de temps. Mais je lui demande souvent de faire bouger les autres évêques. La question des jeunes est urgente. Si on ne recrée pas rapidement des courroies de transmission pour que la foi se transmette, il n’y aura bientôt plus rien! » La responsable insiste aussi sur la nécessité d’adapter les structures des services: « Celles-ci ne sont plus adaptées à la réalité actuelle. On devrait fédérer davantage. Mais je crains que les évêques n’aient pas le temps de réfléchir à cette question… »
Alors, les évêques, préoccupés par les jeunes? « Oui, vraiment, ils le sont », réagit Monseigneur Kockerols. « Et par tous les jeunes, pas seulement par ceux qui reviennent des JMJ. Maintenant, ils ne le sont jamais suffisamment: ils font partie d’une Eglise pauvre. Pauvre en moyens, pauvre en collaborateurs prêts à s’engager dans la durée et à aller vraiment à la rencontre des jeunes. » Des signes d’espérance? Jean Kockerols en perçoit. « Les services diocésains ont de l’enthousiasme, un grand sens des responsabilités. Mais ils devraient pouvoir compter beaucoup plus sur des relais locaux, sur les mouvements de spiritualité et les communautés religieuses, sur de meilleures passerelles avec l’enseignement et les mouvements de jeunesse. » Le feu, alors, continuera de s’étendre. Et, toujours plus, pourra en engendrer d’autres.
Vincent DELCORPS