Theo Francken est dans la tourmente. Lorsqu’il était encore secrétaire d’Etat à la Migration, la N-VA a accordé de nombreux visas humanitaires à des Syriens. Problème: l’octroi de plusieurs visas a été orchestré par divers intermédiaires. Parmi ceux-ci figure un certain Melikan Kucam, conseiller communal N-VA à Malines. Qui se serait largement servi au passage: l’homme aurait vendu certains visas à des prix dépassant parfois les 10.000 euros. Kucam a été placé sous mandat d’arrêt, notamment soupçonné de trafic d’êtres humains. Inévitablement, la question se pose de savoir ce dont Francken était au courant. En la matière, il importe que la lumière soit faite. Et que justice soit rendue.
Le "visagate" met un autre aspect en lumière: l’étonnante liberté dont bénéficie un secrétaire d’Etat lorsqu’il s’agit d’octroyer des visas humanitaires. Cette latitude n’est pas neuve, et l’on est en droit d’espérer la définition de critères qui permettraient d’objectiver la matière. Surtout que Francken a largement usé de sa prérogative, et notamment pour faciliter la venue de Syriens chrétiens en Belgique. L’on peut certes se réjouir de ce souci manifesté par le secrétaire d’Etat. Les chrétiens de Syrie constituent une minorité particulièrement vulnérable. Leur permettre de bénéficier d’un visa humanitaire est a priori une bonne nouvelle.
Mais ne soyons pas naïfs. Francken, le sauveur des chrétiens? "Autant choisir ceux qui ne nous poseront pas de problèmes par la suite", pouvait-on lire la semaine dernière sur le forum d’un grand quotidien. Idée sous-jacente: les chrétiens seraient moins menaçants que les musulmans. Et sur le même forum: "Il m’est de plus en plus sympathique, le Theo". Attention danger! Un homme menacé, en Syrie ou ailleurs, n’est pas d’abord un chrétien ou un musulman. C’est un homme. Et tous les hommes sont égaux. En se montrant particulièrement favorable à une partie de la population, Francken procède aussi – surtout? – à un calcul électoral. C’est compréhensible. Mais ce faisant, il risque d’éveiller, chez ses concitoyens, des germes de peur et des relents d’égoïsme. Aux dépens de la solidarité et de l’unité. Et ça, c’est dangereux.
Vincent DELCORPS
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