La célébration de la béatification de monseigneur Pierre Claverie et de ses 18 compagnons martyrs d’Algérie a eu lieu ce samedi 8 décembre 2018, en la Basilique de Santa Cruz à Oran. Devant le danger d’une mort omniprésente dans le pays, ces personnes ont fait le choix, au risque de leur vie, de vivre jusqu’au bout les liens de fraternité et d’amitié qu’ils avaient tissés avec leurs frères et sœurs algériens. Ces liens ont ainsi été plus forts que la peur de la mort. Notre monde a cruellement besoin de témoins: des hommes et des femmes qui ne cèdent pas à la peur, l’exact opposé de la foi. "Que devons-nous faire?" Dans l’évangile de ce dimanche, telle est la question que posent les foules, les publicains et les soldats à Jean le Baptiste. Ce dernier n’exige cependant rien d’extraordinaire. Il ramène les gens à l’essentiel: partager la nourriture et le vêtement, devenir solidaires dans l’élémentaire de la vie. Jean le Baptiste veut décentrer ses auditeurs du souci d’eux-mêmes en les tournant vers un horizon commun. "Que devons-nous faire?". L’enjeu est collectif. Face à la menace, c’est la tragique question que les moines de Tibhirine se sont posée. Que faire si les commandos islamistes viennent au monastère? Faut-il partir, fuir par peur? Leur réponse fut un extraordinaire courage partagé, précédé d’une réflexion commune. "Partir, c’est mourir", résumait frère Luc dans l’émouvant ‘Des hommes et des Dieux’.
Chez nous, face à la crise gouvernementale, Wouter Beke a affirmé qu’on ne pouvait échapper à nos responsabilités de demain en les évitant aujourd’hui. Cette célèbre citation de Lincoln s’adresse à chacun de nous, peu importe sa couleur politique. "Que devons-nous faire?" Fuir en avant? Au contraire, rester et vaincre ensemble nos peurs. Peur des flux migratoires. Peur des catastrophes climatiques. Peur des réactions. Peur de la récession. Indépendamment de la pertinence du combat, les peurs ne peuvent être le moteur de nos actions, quelles qu’elles soient. Le temps de l’Avent doit réveiller notre présent, l’évacuer de ses peurs, faire de nous des hommes de confiance. ‘Même si nous n’avons pas encore les mots pour dialoguer, il faut d’abord vivre ensemble’, disait avec courage Pierre Claverie.
Changeons alors notre regard et voyons aussi là où se trouvent des signes, même fragiles, d’un relèvement. Que ce soit à Stockholm - où une rencontre entre le gouvernement yéménite et les rebelles houthistes s’est tenue cette semaine - ou bien tout près de chez nous. Il y a tellement de signes de confiance et de partage que nous ne voyons pas.
Didier CROONENBERGHS
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