Les Roses dans nos coutumes


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Les Roses dans nos coutumes
Par La rédaction
Publié le - Modifié le
7 min

De tous temps, la rose fascine, inspire les poètes et les artistes. Les histoires et les légendes que l’on racontait jadis au coin du feu lui réservent bien une place toute particulière. Délicate et majestueuse, elle est la fleur la plus cultivée au monde…

Dans un article précédent, nous disions que la rose est l’une des fleurs les plus fréquemment attribuées à la Vierge. Mais elle revêt parfois une symbolique différente, devenant par exemple le symbole du Saint Esprit. Ainsi chaque année à Rome, il tombe une pluie de pétales de roses dans toute la basilique Sainte-Marie-des-Martyrs (Panthéon). A la fin de la messe de la Pentecôte, pour le chant de sortie, les pétales sont déversés par milliers dans l’église par l’ouverture qui se trouve au sommet du dôme, appelée « occulus » (œil) jusqu’à recouvrir entièrement le sol en un immense tapis de roses. Ces fleurs représentent dans ce cas-ci le Saint-Esprit, elles sont aussi l’image du sang du Christ versé pour le Salut de nos âmes. « Bien qu’elle date de quelques siècles et qu’on en a relevé des exemples au Moyen Âge, la tradition n’a été reprise à Rome que depuis à peine plus d’une vingtaine d’années », précise la journaliste Louise Gaboury. Le lancer de pétales de roses n’aurait été restauré qu’en 1995. A présent, il attire de nombreux fidèles, mais pas seulement. « Cette cérémonie d’une incommensurable poésie a de quoi émouvoir même les non-pratiquants ».

La veille de l’Ascension en Italie

En Italie, spécialement dans la région de Naples, la veille de l’Ascension, la coutume est de plonger dans une bassine d’eau des pétales de roses. On les pose alors sur le rebord de la fenêtre où elles passeront la nuit. « La croyance veut qu'à minuit, Jésus, montant vers son Père, au Ciel, accompagné de ses anges, bénisse cette eau », explique le journaliste Raffaele Massa[1]. « Le lendemain matin, selon la coutume, tous les membres de la famille se lavent le visage en signe de purification. Dans le passé, lorsque l'Ascension coïncidait avec le jeudi, le rituel se déroulait ce jour de la semaine et non le dimanche, comme cela arrive depuis de nombreuses années ». Hélas, la coutume a tendance à se perdre. En 2009, Mgr Arturo Aiello, évêque d'Avellino, s’était exprimé à ce propos, dans une homélie prononcée à la veille de l'Ascension: « C'est une belle tradition que nos grands-parents nous ont transmise et que nous avons perdue… nos grands-parents disaient que Jésus, avant de monter au ciel, bénit toutes ces bassines d’eau parfumées de roses que nous utiliserons ensuite… Demain matin, au lieu de vous laver sous le robinet comme d'habitude, prenez la bassine avec les roses, prenez l'eau parfumée, et lavez votre visage. C'est un rite que vous devez répéter chaque année… Enseignez-le à vos enfants ! ». Pour Mgr Aiello, cette belle coutume est une manière d’ « exposer notre corps à la Gloire de Dieu ». Raffaele Massa fait remarquer par ailleurs que si la foi et l'esprit religieux ne suffisent pas, il s’agit dans tous les cas d’une pratique saine et agréable, signe de purification et de renaissance spirituelle. Ce peut être également une manière, pour les napolitains, de se plonger dans l’ « identité populaire » de la région. « Redécouvrir nos anciennes coutumes, même – et surtout – celles qui se réfèrent à la religion, est une manière d’exprimer l’identité populaire », explique le journaliste. « La transmission aux nouvelles générations des anciennes pratiques, populaires ou religieuses, est un devoir de respect envers notre histoire et notre culture millénaire ».

La Vallée des Roses en Bulgarie

Au mois de juin en Bulgarie, dans la région de Kazanlak, les chants et les danses traditionnelles emplissent la vallée et marquent le coup d’envoi de la cueillette des roses. Là, les roseraies s’étendent à perte de vue. La vallée de Kazanlak est justement appelée Vallée des Roses. « Un des moments forts de la fête est la distillation de l’eau de vie de roses. On fait revivre les traditions et les plats traditionnels de la région, comme la galette à la confiture de roses, le loukoum à la rose, le feuilleté à la rose ». Pourtant la fête des roses n’est pas, quant à elle, si ancienne que cela. Sa première édition daterait seulement de 1903. A cette époque, la culture des fleurs se développe considérablement. Certaines d’entre elles sont recherchées pour leur parfum. Ainsi parmi les variétés de roses les plus demandées figurent notamment la Rosa Damascena, la Rose de Damas, et la Rosa Alba. Cette variété ancienne, déjà connue dans l’Antiquité et cultivée dès la Renaissance, résulte en fait d’un croisement entre la Rose de Damas et la Rosa Canina (églantine). Toutes deux sont utilisées en parfumerie et la France est d’ailleurs le principal client de la Bulgarie en ce qui concerne les roses. Celles-ci sont utilisées pour les parfums et les produits cosmétiques. La fête des roses de Kazanlak vivifie par ailleurs des coutumes venues du fond des âges. Ainsi des hommes, portant des masques et vêtus de costumes étranges et particulièrement colorés à l’occasion de la fête des roses, incarnent l’esprit de fécondité. Ce sont les koukeris (кукери en bulgare). Dans les sociétés thraces, marquées ensuite par l’influence slave, les koukeris effectuaient différents rites ayant pour but d’effrayer les mauvais esprits, afin d’assurer des récoltes fructueuses. La tradition des koukeris est aujoud’hui folklorique mais bien vivante. Elle renvoie à des croyances anciennes, qui trouvent leurs racines dans l’Europe pré-chrétienne. Plus profondément, elle exprime « l’espoir des populations paysannes dont l’avenir dépend de l’abondance de la récolte et du bonheur des enfants qui rempliront la maison »[2]. Un hommage à la culture paysanne bulgare, héritière d’un substrat thrace et slave qu’elle a continué à faire vivre tout en se christianisant.

La bénédiction des roses en l’honneur de Sainte Rita

Revenons à des traditions plus proches de nous – plus spécifiquement chrétiennes aussi – avec la cérémonie de la bénédiction des roses qui a lieu tous les ans, le 22 mai, pour la fête de sainte Rita, dans différents pays et notamment en Belgique. Pour comprendre cette tradition, il faut tout d’abord évoquer la vie de sainte Rita elle-même. Après un mariage difficile, dans lequel elle aura fait preuve d’une grande piété, sainte Rita devint religieuse augustine. La sainte est célèbre pour avoir reçu au front l’une des épines de la couronne du Christ, un soir qu’elle priait devant le Saint-Sacrement. Par ailleurs, durant l’hiver 1457 – elle était déjà âgée et souffrante –, sainte Rita demanda à sa cousine, venue lui rendre visite, de lui apporter une rose. Dans le jardin, sous la neige, à la grande surprise de la cousine, une rose avait fleuri. Sainte Rita offrira cette fleur à ses consœurs, avant de s’éteindre le 22 mai de la même année, à septante-six ans. En sa mémoire, le pape Léon XIII, qui l’a canonisée, a approuvé la bénédiction des roses durant la messe qui est célébrée en son honneur. Les fidèles reçoivent ou apportent des roses qui sont aspergées d’eau bénite et encensées, pour les offrir ensuite aux personnes malades. Durant la bénédiction, qui appartient rituel propre des religieux augustins, le prêtre prie Dieu « d’accorder à ces roses, par la vertu de la Sainte Croix, [sa] bénédiction, afin que toute maladie à laquelle elles seront opposées, soit guérie », il demande aussi que les personnes souffrantes qui recevront ces roses soient délivrées de la maladie et que les démons s’en éloignent, et qu’ils « soient saisis de peur et fuient ces demeures ». Chaque année, le 22 mai, la bénédiction des roses a lieu en Belgique à Bouge, à Marchienne-au-Pont, à Brasménil ou encore à Jandrain…

Une fleur incontournable…

Les roses sont présentes dans nombre de nos coutumes, et ces quelques exemples sont loin d’être exhaustifs. Les bouquets des mariées contiennent bien souvent cette fleur majestueuse et raffinée… Durant la procession du Saint-Sacrement, les enfants lancent des pétales de roses. Pensons enfin aux fêtes du mois de mai qui étaient célébrées autrefois dans nos régions, et durant lesquelles les jeunes filles portaient des couronnes de roses, comme expliqué dans un article précédent. Si la rose est tant appréciée, peut-être est-ce parce qu’elle invite naturellement à l’émerveillement? Emile Pellerin écrivait que « pour être à l’image même de l’amour, la rose ne peut nous venir que de la grâce de Dieu ». En tout cas, cette fleur a su trouver et conserver sa place dans nos fêtes et dans nos traditions, religieuses mais pas seulement. Au fil des siècles, elle a acquis une place unique, devenant ainsi, pour les plus pieux comme pour les non-croyants, la reine des fleurs, s’imposant comme une incontournable de nos bouquets et de nos jardins.

MMH

Image: Domaine public

[1] https://www.ilgazzettinovesuviano.com/2017/05/27/acqua-e-petali-di-rose-la-tradizione-nel-vesuviano/

[2] https://www.bulgarie.fr/culture/fetes-traditions.htm

 


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