Jamais la presse n’a été autant décriée. Celle qu’on surnomme le « quatrième pouvoir » est pointée du doigt par certains dirigeants dès qu’elle met en avant l’une ou l’autre dérives, ou actes délictueux. Ce qui inquiète, c’est que cette accusation mettant en cause l’impartialité des médias était jusqu’ici l’apanage des dictatures ou des états au pouvoir fort. Elle est désormais aussi devenue réalité dans nos pays démocratiques. Dans son dernier rapport annuel, Reporters sans Frontières (RSF) estime que « jamais la liberté de la presse n’a été aussi menacée ». Selon RSF, la liberté de la presse connaît une situation « difficile » ou « très grave » dans 72 pays sur 180 recensés. La presse n’est libre que dans une cinquantaine de pays. « Partout où le modèle de l’homme fort et autoritaire triomphe, la liberté de la presse recule », note l’organisation.
Plus interpellant, RSF s’inquiète d’un « risque de grand basculement » de la situation, notamment dans les pays démocratiques importants. Elle pointe « l’obsession de la surveillance et le non-respect du secret des sources ». Lesquels contribuent à faire glisser vers le bas de nombreux pays considérés hier comme « vertueux ».
La presse est-elle pour autant au-dessus de tout reproche? Non. Reconnaissons que, parfois, cette presse est victime de la course au scoop et que ce faisant, si l’information diffusée est erronée totalement ou partiellement, elle donne à ses détracteurs le bâton pour se faire battre. De même, certains professionnels n’hésitent pas à faire passer leurs idées ou convictions, mettant en péril le principe d’objectivité qui devrait les animer. Cela étant, il faut reconnaître que la majorité des journalistes fait un travail rigoureux, professionnel et digne de confiance. Pour en revenir aux critiques lancées à l’égard des journalistes, il faut déplorer que certains acteurs politiques tentent de se parer de vertu en accusant la presse de harcèlement, de campagne diffamatoire ou de calomnies. Le nouveau locataire de la Maison Blanche aux Etats-Unis n’hésite pas à fustiger ces journalistes « fouineurs et menteurs » dont, à ses yeux, le seul objectif est de lui nuire. Sans en avoir la même vigueur, cette tactique a été utilisée aussi en France par le candidat de la droite aux élections présidentielles. Et quand des états démocratiques en viennent à mettre en cause un métier qui n’hésite pas à dénoncer les injustices, dérives et autres malversations, ils ouvrent la boîte de Pandore. Et c’est la démocratie qui perd.
Jean-Jacques Durré
Vos réactions sur edito@cathobel.be