Tuteur de mineurs non accompagnés (MENA) Une aide locale née d’un besoin international


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Tuteur de mineurs non accompagnés (MENA)  Une aide locale née d’un besoin international
Par Angélique Tasiaux
Journaliste de CathoBel
Publié le - Modifié le
4 min

menaCes jeunes ont franchi des frontières à pied, dans des cales de navires, seuls ou en bande. Dans leurs yeux se trouve l’abîme de la solitude, à défaut de la terre promise. Pour les accompagner dans leurs démarches, des adultes s’investissent à leurs côtés, ici, en Belgique.

Depuis douze ans déjà, un service du ministère de la Justice est dédié aux migrants non accompagnés, preuve que le sujet retient l’attention des autorités compétentes en la matière. De là à dire que tout est sous contrôle, il n’y a qu’un pas... Néanmoins, les adultes qui acceptent une mission de tuteur sont de plus en plus nombreux. La sensibilisation de la population au drame des migrants esseulés motive probablement des citoyens à prendre les choses en mains. Voilà une manière efficace de participer et de faire face aux défis du monde, loin de l’agitation souvent vaine des écrans de télévision.

Juriste de formation, Sabina Sebastiano est attachée au sein du service des Tutelles. Elle a vécu la création du service consacré aux MENA, des enfants vulnérables et particulièrement fragilisés qui ont souvent vécu des événements traumatisants avant leur arrivée en Belgique. "Le service des Tutelles a une double mission. Il s’agit à la fois de prendre en charge et d’identifier les mineurs étrangers non accompagnés et de recruter, sélectionner et former des tuteurs." Au départ, seule une trentaine de tuteurs était agréée. On en dénombre désormais plus de 600, parmi lesquels 530 sont actifs dans l’ensemble de la Belgique, tous réseaux linguistiques confondus. Par ailleurs, une nonantaine de personnes suivent actuellement une formation afin d’être prochainement opérationnelles. "Depuis juin 2015, on est confrontés à une augmentation drastique du nombre de MENA. Or la réserve de tuteurs n’était pas suffisante pour les désigner comme il aurait fallu. On a dès lors intensifié leur recrutement. On sent un engouement au niveau de la population; les citoyens se sentent concernés par la problématique." La sélection n’est pas laissée au hasard. "Les candidats tuteurs doivent introduire un dossier auprès du service des Tutelles. Puis, ils sont invités à un entretien de sélection auprès d’un jury. Une décision d’agrément ou de refus d’agrément leur est ensuite signifiée. L’idée est de se constituer une réserve suffisante de tuteurs pour éventuellement pallier, dans un futur proche, une nouvelle arrivée massive de mineurs non accompagnés. Le nombre de signalements est en baisse: 220 enregistrements en août, contre 402 en janvier. Les MENA fuient des situations de guerre. Ce ne sont pas des migrants économiques. Ils recherchent une protection internationale parce qu’ils sont vraiment vulnérables."

Une activité quelquefois complémentaire

De nombreux jeunes résident dans des structures d’accueil en Wallonie, alors que la langue de leur procédure d’asile est le néerlandais. Il est dès lors important de trouver des tuteurs qui ont une connaissance active de la langue de Vondel, ce qui ne semble pas aisé… L’avis est lancé! Différents profils coexistent au sein des adultes qui prennent en charge la tutelle de pupilles. "Légalement, un tuteur privé ou indépendant peut exercer jusqu’à quarante tutelles. Mais on ne désigne jamais quarante tutelles en une fois. C’est aussi en fonction du profil des jeunes. Certains d’entre eux ont disparu, mais la tutelle se poursuit, etc. Les cinq premières tutelles sont exercées à titre bénévole, avec un statut de volontaire. Au-delà, le tuteur a un statut d’indépendant à titre complémentaire ou principal." La disponibilité des personnes pressenties s’avère cruciale, puisqu’il s’agit d’assurer la représentation légale des jeunes qui leur sont confiés. "Ce n’est pas apparenté à une famille d’accueil ou à un tuteur civil. Le tuteur va exercer certains attributs de l’autorité parentale, mais pas tous. Il n’a pas la garde ni la responsabilité civile du mineur. Le tuteur représente le jeune lors des procédures administratives dans le cadre de la procédure d’asile ou d’une demande de séjour, lors d’une procédure judiciaire si c’est nécessaire, pour tout ce qui concerne la scolarité. Il va veiller au bien-être de l’enfant en Belgique et formuler des propositions de solutions durables, puisque la tutelle n’a pas vocation à se poursuivre indéfiniment." En effet, la tutelle prend fin une fois atteinte la majorité du jeune. Il en va de même en cas de retrouvailles familiales en Belgique ou de retour volontaire. "Le tuteur veille à définir avec le jeune et les différents intervenants un projet de vie pour concrétiser la situation la plus favorable au jeune. Cela est envisagé au cas par cas. Le tuteur ne se substitue pas aux parents. Il ne communique d’ailleurs pas son adresse privée au MENA qu’il accompagne, pour éviter d’être débordé. Beaucoup de tuteurs demandent d’avoir cette distance qui est une protection pour les deux parties", conclut Sabina Sebastiano

Angélique TASIAUX

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