Cela fait dix ans que parlement et gouvernement belges réfléchissent à un moyen d'aider les parents d'un enfant né sans vie avant les six mois de grossesse. Ce matin, les députés belges ont discuté du sujet devant la commission justice de la Chambre des représentants.
En Belgique, le seuil légal de viabilité des fœtus est placé à 180 jours à dater de la conception. Cela veut dire que tous les bébés nés sans vie au-delà de 6 mois de grossesse sont portés dans les registres des décès de l’état civil. Autrement dit, cet enfant a un nom, une reconnaissance juridique, une sépulture et tout le monde s'accorde à dire que cela facilite le travail de deuil pour les parents. En revanche, pour les enfants morts-nés avant ce seuil des 6 mois, il n'existe aucune existence officielle. Le foetus se retrouve souvent incinéré avec les déchets hospitaliers. Beaucoup de parents doivent affronter un tel drame. On estime leur nombre entre 500 et 1000 chaque année. Et pour eux, cette non-reconnaissance par la société est ressentie ici comme une injustice. Pourquoi celle-ci nierait-elle l’existence d’un être que l’on a porté en soi et que l’on a même vu lors des échographies et dont a véritablement accouché? En la matière, la barrière aveugle des 6 mois n’a pas beaucoup de sens… Et la question se pose avec d'autant plus d'acuité aujourd'hui que le seuil de viabilité d'un fœtus a progressé.
Quatre propositions de loi
Sur ce sujet sensible et délicat, quatre propositions de loi ont été récemment déposées par le CD&V, le cdH, l'Open Vld et le sp.a. Par ailleurs, en mai dernier, le ministre de la Justice, Koen Geens, a présenté une étude devant la Commission Justice de la Chambre des représentants. Selon cette étude, "le critère de 140 jours à dater de la conception semble correspondre aux limites de la médecine actuelle. Il rencontre la demande des parents et suit les recommandations de l'OMS (Organisation Mondiale de la Santé) édictées à des fins statistiques". On s'acheminerait donc vers l'abaissement à 140 jours du seuil à partir duquel un enfant né sans vie peut être enregistré. Reste à déterminer les modalités d'inscription. La rédaction d'un acte de naissance est envisagée. L'idée est défendue notamment par le cdH. "Pouvoir inscrire le prénom, voire même peut-être le nom de l’enfant à l’état-civil, c’est reconnaître que cet enfant est mort-né ; que les parents en souffrent, mais que cet enfant fait aussi partie de leur histoire familiale", a expliqué Catherine Fonck. Un amendement du CD&V propose même de rendre obligatoire la délivrance par l’état-civil de cet acte de naissance dès les 140 jours de grossesse (20 semaines). Il serait facultatif avant ce seuil… Mais les implications juridiques sont complexes. Ainsi, la mention du nom de famille ne peut être que factuelle car selon la législation actuelle, l'enfant sans vie n'a pas de personnalité juridique et donc pas de filiation. Par ailleurs, le Centre d'action laïque voit dans ce certificat de naissance l'avant-dernier pas avant l'interdiction de l'avortement au motif qu'il entraîne la disparition de la différence entre embryon, foetus et enfants mort-né… Un argument auquel n'est pas insensible le PS alors que les autres partis semblent plutôt se rejoindre pour pouvoir enfin rencontrer la douleur des parents qui ont voulu un enfant mais l'ont perdu.
P.G.