Découverte: Le portail du Bethléem à Huy


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Découverte: Le portail du Bethléem à Huy
Par La rédaction
Publié le - Modifié le
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IMG_5132Imposant vaisseau amarré aux bords de Meuse et adossé à la colline, la collégiale Notre-Dame de Huy, en réfection depuis plus de trente ans, vient enfin de dévoiler un de ses plus beaux atours, son portail du Bethléem.

Mais admirer ce chef d’œuvre de la sculpture mosane, ce portail du Bethléem, cela se mérite! Il se découvre au détour d'une petite rue pavée située derrière la collégiale, car accolé à la colline, l'édifice religieux ne put s’offrir une entrée solennelle sur sa façade principale lors de son érection en 1311. L’accès au domaine canonial - un chapitre de trente chanoines - et au sanctuaire fut donc solennisé pour contourner ces contraintes topographiques. Le portail du Bethléem ouvrait sur le transept sud de la collégiale et sublimait par son architecture ouvragée l’art des cathédrales du 14e siècle.

Cinq églises pour une collégiale
Depuis le IVe siècle, quand Saint Materne vint évangéliser la cité mosane et y éleva un oratoire, cinq lieux de cultes se sont succédé à l'emplacement même du premier sanctuaire. En 1066, le prince-évêque de Liège, Théoduin de Bavière, construisit à Huy la quatrième église dont seule la crypte est encore visible aujourd'hui. Elle abrite d'ailleurs le Trésor de la collégiale constitué notamment de quatre châsses d'une rare beauté. Pour cette construction, Théoduin demanda la participation financière des Hutois leur donnant, en échange, la fameuse Charte des Libertés. Cette église romane subsista jusqu'en 1311; c'est alors que la première pierre de la collégiale actuelle est posée et que, soixante ans plus tard, son chœur est consacré. Il faudra plus de deux cents ans pour achever la construction de la collégiale de Huy.

Une porte lumineuse
Retour dans cette ruelle, à l'ombre de la collégiale, qui accueille le fameux portail du Bethléem. Sa récente rénovation, qui lui a rendu tout son éclat d'origine, illumine l'ensemble de la petite rue. Serait-ce dû à l'ocre de ses pierres tranchant avec le gris de l'imposant édifice? Ou à la finesse du travail des tailleurs de pierre, fabuleux orfèvres, transcendant ainsi le style gothique de l'œuvre? Les deux à la fois sans doute! A moins que ce ne soit tout simplement l'histoire qui y est racontée, le récit évangélique de la Nativité…

Portail BethleemTrois scènes composent le tympan central du XIVe siècle: la naissance de Jésus et l'adoration des bergers, le massacre des innocents et enfin, la visitation des mages. Un récit, somme toute banal, ressassé depuis plus de deux mille ans, mais qui, ici, devant ce portail, mérite que l'on s'arrête pour méditer et réfléchir à ce qu'il peut encore nous dire aujourd'hui.

A gauche, la Nativité, un tableau aux plusieurs particularités. La Vierge y est allongée; une façon peu commune en Occident de représenter Marie. Et que dire alors de cet enfant couché dans la mangeoire? Enveloppé de langes, il se love dans des bandelettes, rappelant le linceul qui le recouvrira bien plus tard. Pâques s'invite ainsi à Noël; un peu comme sur ces icônes représentant la naissance du Christ, où la lumière de la Résurrection n'est jamais très loin. Joseph, lui, pensif et étonné, joue son rôle de père nourricier à la perfection. En toute confiance!

A droite, la visite des mages, une rencontre qui se veut humaine. La scène qui se joue dans le coin inférieur gauche dit, à elle seule, l'infinie douceur de cette entrevue. On y voit Marie portant son fils et recevant le présent d'un des trois mages. Agenouillé, la couronne négligemment déposée sur son bras - car devant ce roi-là, il n'est plus roi lui même -, le mage se laisse doucement entraîner par le geste de Marie qui, de sa main, l'invite à se relever. En toute humilité!

Au centre, le massacre des innocents, des sculptures plus dramatiques, d'une esthétique plus "germanique". Ici, la délicatesse n'est plus de mise! La vie n'est plus un bien précieux! La paix n'est plus une assurance! Noël ne parle pas seulement d'amour; Noël, dans toute sa déshumanité!

L'ensemble des sculptures du portail du Bethléem est un véritable livre ouvert sur un des fondamentaux de la foi chrétienne qu'est la Nativité. Derrière ces œuvres d'art, nous découvrons comment les artistes de l'époque se sont appropriés ce Mystère chrétien. Un appel à nous tous: savoir comment, nous, nous pourrions parler de la foi aujourd'hui, à l'heure où sa transmission connaît bien des ruptures.

Sylviane Bigaré

Une exposition est visible à la collégiale jusqu’en février. Elle retrace l'histoire et les étapes de la rénovation du portail à l’occasion de la clôture de sa restauration.

Ecoutez l'abbé Michel Teheux, qui est à l'initiative de cette rénovation: Y a-t-il du répondant à tout ce travail de mise en valeur du patrimoine religieux?


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