Denis Mukwege, gynécologue congolais reconnu pour les soins qu’il prodigue aux femmes victimes de violences sexuelles, reçoit ce mercredi 26 novembre le "Prix Sakharov pour la liberté de l’esprit" décerné chaque année par le Parlement européen.
On le surnomme l’homme qui répare les femmes. Dans son hôpital de Bukavu au Sud-Kivu (Est), le gynécologue Denis Mukwege accueille et soigne des femmes victimes de viols et de mutilations génitales. Dans son pays, ces violences faites aux femmes sont utilisées comme une arme de guerre. Une arme dévastatrice pour les bébés, fillettes et femmes qui en sont victimes.
Depuis 1999, plus de 40.000 femmes ont été soignées dans son hôpital de Panzi qui offre également un accompagnement psychologique pour permettre aux patientes de retrouver le chemin de la vie. Ces actes barbares traumatisent non seulement les femmes mais également toutes leurs communautés, parfois forcées par les bourreaux d’assister à la scène. Au cours d’une conférence organisée en mai dernier à Kavamu (Sud-Kivu), le docteur Mukwege avait confié qu’aucune femme, si jeune soit elle, n’était épargnée. "J'exerce mon métier depuis 30 ans et pour la première fois, j'ai opéré il y a 2 semaines un bébé âgé de 2 mois", avait-il confié.
Les enfants: victimes et bourreaux
Interrogé ce mercredi matin par La Première, il a dénoncé les lavages de cerveaux que subissent les jeunes garçons qui deviennent ensuite eux-mêmes les auteurs de nombreux viols. La méthode semble assez neuve et inquiète le gynécologue-obstétricien. "Notre crainte, c’est qu’avec la démobilisation de groupes armés, des enfants soldats ont été renvoyés vers leurs familles et se retrouvent dans la société sans aucune prise en charge psychologique. C’est comme si le mal est en train de s’étendre comme un cancer dans la société". Avant d’ajouter qu’il existe une autre catégorie de victimes: "les enfants nés de viols. Ce sont des bombes à retardement pour la société. Ce sont des enfants mal aimés par leur mère, la communauté, rejetés".
Sur les ondes de la Première, Denis Mukwege a plaidé ce matin pour une réforme des services de sécurité congolais, expliquant que la police elle-même commet des viols sur les femmes.
Fervent défenseur des droits de l’Homme, Denis Mukwege multiplie les voyages internationaux pour rendre compte au plus grand nombre les réalités des viols et des mutilations sexuelles. Aujourd’hui, Strasbourg récompense son combat pour le respect des droits des femmes et une plus grande humanité.
S.T. (avec la RTBF/Parlement européen)
Plus d'infos:
Prix Sakharov pour la liberté de l'esprit
Denis Mukwege: "Pour les viols au Congo, ils utilisent des enfants"