Le père Pierre-Marie Delfieux est décédé le 21 février, à l’âge de 78 ans. La messe d’A-Dieu sera présidée par le cardinal André Vingt-Trois, le 27 février en la cathédrale Notre-Dame de Paris. Convaincu que les déserts contemporains sont désormais dans les villes, il avait fondé les Fraternités Monastiques de Jérusalem.
Pierre Delfieux naît le 4 décembre 1934, à Campuac (Aveyron), dans une famille chrétienne de six enfants dont il est le troisième. La maison familiale se trouve sur la place du village, en face de l’église où il fait sa première communion à 6 ans. À partir de ce jour, il s’est nourri chaque jour de l’Eucharistie. Chaque matin, il va servir la messe avant d’aller à l’école communale. Il s’y montre bon élève puisqu’un jour le maître lui remet, en guise de prix, un livre racontant « la vie d’un officier qui est devenu curé ». Le jeune Pierre est fasciné par le visage de l’homme, sur la couverture, et le cœur rouge brodé sur sa poitrine. C’est le début d’une longue amitié avec Charles de Foucauld.
Interne au Collège de l’Immaculée Conception, c’est lors d’une retraite en terminale, dans un centre marial, qu’il choisit de répondre à l’appel qu’il a entendu lors de sa première communion. Théologien, mais aussi philosophe, il effectue son service militaire dans la coopération à Madagascar. Ordonné prêtre dans la cathédrale de Rodez, le 29 juin 1961, il y restera quelques années comme vicaire de la cathédrale.
En 1965, il intègre, à la demande du futur cardinal Lustiger qui la dirige, l’équipe d’aumôniers d’étudiants du Centre Richelieu. Il y est plus spécialement chargé des étudiants en langues. La vie de l’aumônerie est intense et les initiatives nombreuses. Des pèlerinages sont organisés, à Chartres, mais aussi en Italie, Espagne, Terre sainte… Le père Delfieux y découvre l’importance que peut avoir, pour la vie de foi, un pèlerinage sur les pas de Jésus. Très attaché à cette terre, il continuera d’y guider régulièrement des pèlerinages pour les frères et sœurs de Jérusalem et les laïcs proches des Fraternités, le dernier en avril 2012, alors qu’il est déjà malade. En ces années soixante, il découvre aussi le désert et devient, au Centre Richelieu, le spécialiste des méharées au Sahara, vers Tamanrasset et les lieux habités par le père de Foucauld.
Après mai 68, il vit deux années sabbatiques dans un ermitage construit de ses propres mains dans le désert, avec pour seules compagnie la Bible, le Saint-Sacrement, les pierres et les étoiles. Peu à peu, une conviction s’impose : le vrai désert aujourd’hui se trouve dans les villes, c’est là qu’il faut aller creuser des oasis de prière. En juin 1974, sa décision est prise de devenir moine dans la ville. L’église de Saint-Gervais lui est alors confiée dans le centre de Paris, pour y établir la future fraternité. Proche de l’Hôtel de Ville et du quartier des Halles, l’église se trouve dans un quartier en pleine rénovation. D’emblée l’essentiel est posé : une vie fidèle aux grandes exigences monastiques et professant les trois vœux de chasteté, pauvreté et obéissance, mais adaptée, en sa forme concrète, aux réalités de l’Église postconciliaire et du monde contemporain. L’accent est mis sur la prière personnelle et communautaire, avec d’amples liturgies chantées dans une église ouverte à tous. La vie fraternelle est fondamentale, mais elle se vit en ville, dans des appartements ou des maisons loués, sans que la Fraternité puisse acquérir de propriétés. Le travail, nécessaire pour gagner son pain, se veut aussi solidaire des contraintes vécues par les citadins : il se vit, de préférence, à mi-temps, comme salarié. Les frères veulent ainsi se situer en solidarité avec les citadins qui les entourent, mais aussi en contestation, pour affirmer le primat de l’amour et de la prière.
Bien que malade depuis la fin de 2011, frère Pierre-Marie a continué à soutenir et encourager les différentes Fraternités, en les visitant, à prêcher et à enseigner. Il est décédé dans la maison de Magdala, en Sologne, où il s’était retiré, le 21 février 2013.
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