Dans le numéro de juillet-août d’Église de Liège, Dominique Servais, adjoint au Vicariat Évangile & Vie, livre une puissante réflexion sur le problème de la mendicité en ville.
La décision d’emprisonner douze heures dès la troisième récidive à la législation anti-mendicité est une décision qui interpelle, questionne ou… réjouit. Extraits de l’opinion de Dominique Servais sur ce récurent sujet de société.
« Le fait d’organiser la mendicité posait déjà question, mais la dernière décision en la matière nous amène à nous demander ce qui a bien pu pousser les autorités liégeoises à une telle extrémité. Les mendiants à Liège sont-ils devenus si nombreux ? Représentent-ils un réel danger ? Génèrent-ils un si grand sentiment d’insécurité? » Ce qu’évoque Dominique Servais, c’est d’abord cette idée lancée par l’ancien bourgmestre de Liège, Jean-Maurice Dehousse, en juillet 1999. Il parlait alors d’une « mobilité organisée » des SDF: à chaque jour son quartier et pas de « travail » le week-end. Pas d’interdiction, mais une organisation de la pratique. Aujourd’hui, Willy Demeyer institue une nouvelle politique en matière de régulation de cette activité hautement criminelle, à savoir un emprisonnement de douze heures pour les récidivistes. Selon le bourgmestre de Liège, ces personnes « agacent fortement la population » et perturbent l’essor économique de la ville.
Réalités multiples
Dominique Servais poursuit sa réflexion: « L’agacement que nous ressentons provient-il de la présence de ces personnes ou de notre malaise face à leur vie, à leur demande? Mélange de peur, de malaise et d’impuissance devant une situation de détresse, le remède réside-t-il dans le rejet de la personne en situation de précarité? Evidemment, non! »
De plus, les situations de précarité ne sont pas toutes semblables. « La personne qui se voit contrainte de tendre la main ne le fait jamais de gaieté de cœur. Elles y sont arrivées parce que l’aide à laquelle elles avaient droit s’avérait insuffisante. Parce qu’elles ne trouvaient pas d’alternative. D’autres pratiquent la mendicité parce que leur état de santé mentale n’est pas pris en charge de manière adéquate. Des migrants encore doivent s’y résoudre parce qu’ils ne connaissent pas ou n’ont pas accès à l’aide sociale, publique ou privée. »
C’est la pauvreté qu’il faut combattre et non les pauvres
« Il n’y a pas de fatalité. Mais des répartitions inégales de biens, des situations de vie, voire des accidents, qui conduisent à la précarité.
Alors, indignons-nous! Engageons-nous! A méditer et à actualiser ce texte d’une homélie de saint Basile: ‘C’est le pain de l’affamé que tu retiens; l’habit que tu gardes dans tes coffres est à celui qui est nu, c’est la sandale du va-nu-pieds qui pourrit à côté de toi, l’argent du pauvre que tu enfouis dans la terre pour en être le possesseur. Ainsi, tu fais du tort à tous ceux dont tu aurais pu soulager l’indigence.' »
Dominique SERVAIS/SB
Lire l’entièreté du texte de D. Servais sur: http://liege.diocese.be/: J’étais mendiant et vous m’avez emprisonné