Quelques impressions Guy Wittouck, prêtre retraité du Brabant wallon à l’occasion de sa participation au G 1000, participant à la table bilingue 12 du G 1000(11/11/2011).
« Tiré au sort à partir de l’annuaire téléphonique – je ne suis mentionné ni dans les paroisses ni par une qualification(Abbé, prêtre, etc..;) – je me suis senti obligé comme citoyen d’y participer.
Je voudrais d’abord mentionner l’organisation très poussée jusque dans les détails : ce n’est qu’à mon retour que j’ai découvert LA FONDATION POUR LES GENERATIONS FUTURES – dont le Président est le Professeur François OST des FUSL et l’Administrateur Délégué est Benoît DERENNE(un des deux animateurs de la journée) – sans laquelle cette idée, sans doute tout à fait folle, de David VAN REYBROUCK, anthropologue et écrivain, relayé par Paul HERMANT, chroniqueur à la RTBF : un souci constant a été de ne pas influencer les participants dans un sens ou l’autre(les introductions francophone et flamande aux thèmes de discussion ne voulaient qu’amorcer une discussion « par table » sans imposer de solutions).
Ce que je retiens de cette journée :
C’est une expérience à vivre et c’est là l’essentiel : personnellement, je pense que c’est d’abord une critique de la situation actuelle mais que c’est aussi une utopie qui vise à conscientiser à la fois les politiques et les populations. Faut-il en attendre quelque chose ? Je ne sais pas…Pour moi, la population est plus modérée que les médias ne le reflètent et les politiques sont trop soucieux d’idéologies et de scrutins passés et futurs.
On a peur des extrémistes, on se polarise sur quelques situations exceptionnelles et on n’est guère ouvert à l’autre. Peur des extrémistes ? Ils n’étaient pas visibles et n’ont pas eu d’impact : finalement, les « gens » sont bien plus raisonnables qu’on ne croit….Polarisation sur des situations ponctuelles ? Insécurité, manifestations, grêves sont relayées par les medias bien au delà de leur importance réelle, alors qu’elles sont déréalisées sur le papier ou l’écran…Ouverture à l’autre ? C’est sans doute depuis la création du monde, mais les différences sont devenues des antagonismes(homme – femme, Noir – Blanc, Musulman – Chrétien, Flamand – Francophone) et la rancoeur des « humiliés » est sans doute un Everest psychologique . Ce n’est que par le dialogue et la connaissance qu’on arrivera lentement à faire quelques pas.
L’importance donnée à l’argent : il me semble que le bonheur n’est pas proportionnel à la grosseur du portefeuille et tous les combats sociaux semblent ignorer l’importance de l’ambiance, de l’estime de soi:est-ce qu’un taux de croissance vaut le prix qu’on lui donne ? S’ajoute à cela le caractère conservateur de beaucoup de regrets : on entre à reculons dans une modification essentielle de civilisation.
L’influence perverse des medias sociaux : il suffit de voir comment on a annoncé le G 1000 en reprenant littéralement des documents fournis par les organisateurs sans aucune information personnelle ; ensuite, on se contente d’un micro-trottoir ou d’interviews « à chaud » alors qu’il faudra encore du temps pour revenir sur ce qui a été vécu. On a également noté, au moins du côté francophone, le caractère « absurde » des émissions dominicales « Faire le point » et « Controverse » : on voudrait faire de la désinformation et jeter de l’huile sur le feu à jet continu qu’on les copierait.
Que retenir de cette journée ?
La première chose sans doute : ce n’est pas une ou la solution…mais il fallait oser le faire et ce fut une réussite car la population est plus « centriste » qu’on ne le croit. Personnellement je pense que beaucoup de scrutins sont des votes de protestation car rien ne change, rien ne bouge jamais : les medias, les politiciens, plus préoccupés par leurs bassins communaux de votes que par le bien commun, les partis sans plus de pouvoirs – ils sont passés à l’Europe ou à la sphère économique – sont loin des préoccupations parfois trop terre à terre des citoyens.
Il ne faut pas craindre ce type de rencontre : à quand des G…. dans les communes, vrais lieux sociaux ? dans l’Eglise ? La préparation scientifiquement attestée et l’absence d’orientation préalable sont des conditions indispensables…
Le résultat est dans une certaine conscientisation des participants ; sans doute, certains vont-ils prendre « une carte de parti », d’autres se rendront compte que les problèmes sont bien plus ardus qu’ils ne le croyaient….Ce qui m’a le plus frappé, c’est la peur de l’autre, « inconnu »….Pour le reste, nous ne sommes que de petits hommes….mais capables de réaliser parfois des choses qui nous dépassent : on appelle cela des « prophètes »… »
Le week-end du 11 novembre, le G1000 s’est déroulé à Tours & Taxis (Bruxelles). Le père Delhez était présent. Il nous livre son compte rendu.
« Si les élus n’en sortent pas, c’est aux citoyens qu’il revient de se concerter. » Telle est la conviction du G1000 organisé ce 11 novembre à Tours & Taxis (Bruxelles). Une initiative citoyenne partant du constat que la crise belge n’est pas uniquement celle de la Belgique, mais aussi celle de la démocratie. Une bouffée d’oxygène. Une première en Europe.
Les applaudissements étaient nourris. L’enthousiasme était palpable. « Excellent! », s’exclame Pascal, citoyen de Mont-St-Guibert, à la fin de cette longue journée. « Nous étions une grande famille autour de la table. Mais qu’en feront les politiques? » – « Un truc que personne n’a jamais vu », se réjouit Paul Hermant de la RTBF, à l’origine de cette initiative avec l’écrivain flamand David Van Reybrouck. « C’est une démarche d’appui clair à la démocratie. Le suffrage universel a montré ses limites. Il faut le régénérer, lui donner un accompagnement. Il faut revitaliser la démocratie », explique-t-il.
Mille personnes avaient été conviées, toutes avaient été tirées au sort selon les règles des sondages, contactées par téléphone et rencontrées à domicile, sauf 10% représentant les associations agissant sur le terrain. 704 se sont effectivement rendues au Sommet citoyen, à Tours & Taxis, dont 7 SDF. Les voilà maintenant autour de 70 tables conviviales où elles discuteront, mangeront, voteront. À leur service, une armée de bénévoles. Les équipes sont soit unilingues, soit bilingues, avec ou sans interprète. « Une occasion très rare de voir des personnes issues de différents mieux sociaux et qui pensent différemment discuter ensemble de sujets de société », commente Yasmina, d’origine marocaine.
Plus de 5.000 propositions (19 seulement à propos de BHV) issues d’une large consultation préalable par Internet ont été synthétisés en 25 thèmes, dont trois ont finalement été choisis par vote pour cette journée: la sécurité sociale, les banques et la finance, l’immigration. Deux experts, un néerlandophone et un francophone, étaient chargés de les présenter. Les citoyens avaient chaque fois 100 minutes pour en discuter et voter des propositions. Ainsi, la réforme de l’impôt des sociétés, la réduction du coût du travail, la taxe Tobin, ou encore l’installation d’une gouvernance européenne harmonisée à propos des immigrés. Ces propositions seront confiées à un G32, tiré au sort parmi les participants. À la fin avril, ce groupe devrait remettre des propositions concrètes au gouvernement.
« Une initiative qui arrive au bon moment », estime Usman, d’origine pakistanaise. « La démocratie représentative est à bout de souffle; il faut évoluer vers une démocratie plus participative. C’est très subversif pour le pouvoir en place », estime-t-il. « Face à des experts, les gens peuvent choisir leur destin. »
« Une belle leçon pour nous », a commenté un des sept présidents de Parlement qui étaient invités à la clôture de l’événement. « Vox populi, vox Dei! »
Charles Delhez