Réchauffement climatique : faut-il de petites ou grandes actions ?


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Réchauffement climatique : faut-il de petites ou grandes actions ?
Par Armelle Delmelle
Publié le
3 min

On s’en doutait déjà, mais cela nous a été confirmé ce jeudi 19 juin : en 2024, la température moyenne mondiale a atteint +1,52°C par rapport à l’ère préindustrielle, franchissant officiellement le seuil fixé par l’accord de Paris. Selon l’étude par l’Institut Copernicus dans Earth System Science Data, le réchauffement causé par l’activité humaine représente déjà +1,36°C, le reste étant lié aux phénomènes naturels. Face à cette réalité, une question refait surface : que faire ? Et surtout, qui doit agir ?

Une responsabilité collective… mais inégalement assumée

Malgré les alertes à répétition, les émissions de gaz à effet de serre battent encore des records : 55,4 milliards de tonnes de CO₂ équivalent ont été rejetées dans l’atmosphère en 2023. 70 % de ces émissions proviennent des énergies fossiles. Les incendies de forêt, notamment en Amazonie et au Canada, contribuent aussi à la hausse des émissions dues à la déforestation.

Mais alors que l’horloge climatique tourne — le « budget carbone » restant pour limiter le réchauffement à 1,5 °C pourrait être épuisé en trois ans — les réactions politiques et économiques se font attendre.

Pour Jean Lannoy, journaliste à 1RCF Belgique, interrogé sur le sujet dans Décryptages, "c’est le principe même de l’ultralibéralisme. Pour stopper ça, il faudrait revoir notre manière de consommer, notre manière d’agir et notre manière même de penser.

Il n’est en effet pas convaincu que les gestes individuels puissent réellement inverser la tendance. "La théorie du colibri est juste en fait quelque chose pour se rassurer. Concrètement, mes actions ne peuvent pas vraiment impacter à grande échelle ce qui se passe ici et ailleurs."

Selon lui, le véritable levier réside dans l’action politique : "Il faut que les autorités politiques appliquent des normes. Parce qu’on est trop faibles pour se dire qu’on va changer tout seuls. Notre impact individuel est très faible, voire trop faible. Ce sont les entreprises qui polluent majoritairement."

Une vision complémentaire

À l’opposé, Patrick Balemba, chargé de recherche chez Justice et Paix, insiste sur la nécessité d’une prise de conscience individuelle : "Chaque citoyen est aussi une actrice ou un acteur. En commençant par changer des petites habitudes, on peut bousculer et changer la situation mondiale." Il donne l’exemple des smartphones, remplacés parfois tous les six mois : "Si vous calculez combien de smartphones sont achetés annuellement, il y a de quoi avoir suffisamment un budget qui peut faire s’écrouler les multinationales."

Pour lui, la transformation commence par une responsabilisation personnelle, mais s’étend aux communautés et aux États. "Il est grand temps qu’on passe vers une lutte contre le réchauffement climatique, mais une lutte qui est responsable", insiste-t-il, évoquant aussi l’injustice environnementale que vivent les pays du Sud, notamment les enfants travaillant dans les mines pour extraire les métaux nécessaires aux batteries des voitures électriques et autres objets du quotidien. 

Il s’appuie aussi sur l’encyclique Laudato si’ du pape François pour défendre une vision globale, intégrale et éthique de l’écologie : "Le monde est à prendre comme une maison commune. Ce que l’un fait a une répercussion directe sur la santé des autres."

Entre espérance et urgence

La divergence de discours n’est pas un désaccord de fond, mais plutôt de perspective. Jean Lannoy reconnaît que "la politique, c’est aussi nous". Si l’action individuelle semble limitée, elle peut influencer les choix économiques, voire politiques. Et Patrick Balemba admet, lui aussi, que les efforts personnels doivent s’inscrire dans un cadre plus large.

Alors, petites ou grandes actions ? La réponse pourrait être : les deux. À condition qu’elles convergent vers un changement réel, soutenu par une vision de justice et de solidarité. L’espérance chrétienne, rappelait Jean Lannoy en fin d’émission, peut commencer "simplement, en se posant dans un parc, en observant ce qui nous entoure. C’est bien d’y apporter un peu de cœur."


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