Les Engagés sont sur le point d’élire leur nouveau président. Les deux candidats en lice se sont tous deux prononcés en faveur d’un recentrage du parti vers la gauche, mais aussi d’un retour aux racines chrétiennes de sa tradition politique.
Un retour à gauche pour le bien commun
Historiquement, le paysage politique belge reposait sur trois piliers : le libéral, l’ouvrier/socialiste et le chrétien. Avec le temps, le Parti Social-Chrétien (PSC) s’est scindé entre la Flandre (CD&V) et la Wallonie (CdH), avant de devenir Les Engagés sous sa forme actuelle.
Sous la présidence de Maxime Prévot, aujourd’hui ministre des Affaires étrangères, le parti avait pris une orientation plus à droite, stratégie qui s’est révélée payante lors des élections de 2024. Pourtant, Yvan Verougstraet et Marc-Antoine Mathijssen, candidats à la présidence, souhaitent désormais tirer le parti vers la gauche.
« L’actualité nous montre qu’une société où l’on s’attaque de plus en plus aux plus vulnérables et où les protections sociales sont remises en question a besoin d’un contrepoids », analyse Clément Laloyaux, journaliste chez CathoBel.
« Il est important qu’un courant politique inspiré par les valeurs chrétiennes – notamment la dignité humaine et la défense des politiques sociales – refasse surface. On ne parle plus seulement d’un pilier catholique chrétien défendant une certaine classe de la société, mais plutôt d’un courant de social-démocratie chrétienne engagé pour le bien commun. »
Un retour aux racines de l’Europe
L’ancrage chrétien du parti a également été évoqué par les deux candidats. Pour Patrick Balemba, chargé de recherche et d’animation chez Justice et Paix, ce retour s’inscrit dans une dynamique plus large, celle des fondements mêmes de l’Europe.
« Je perçois cela comme une réaction aux évolutions mondiales actuelles », explique-t-il. « À une époque, on parlait de globalisation et d’unification des idées, mais l’Europe se retrouve aujourd’hui confrontée à son histoire. Elle a tenté de se déraciner de ses origines chrétiennes, mais à présent, se pencher sur les racines chrétiennes des partis politiques et des mouvements semble une réponse sérieuse face aux défis contemporains. »
Une refonte des piliers
Si la réaffirmation d’un pilier politique chrétien peut être perçue comme une évolution positive, elle ne doit pas pour autant conduire à une société cloisonnée. Pour Patrick Balemba, il ne s’agit pas d’un retour en arrière, mais plutôt d’une refondation et d’une adaptation aux réalités d’aujourd’hui.
« Il s’agit de conserver certaines valeurs chrétiennes tout en tenant compte des évolutions idéologiques et sociétales actuelles », précise-t-il. « Par exemple, aujourd’hui, il est essentiel de concilier l’économie avec des enjeux comme l’écologie et la justice sociale. Cette approche permettrait de dépasser l’opposition traditionnelle entre le pilier chrétien et les autres courants politiques. »
Une vision partagée par Clément Laloyaux, qui souligne l’importance du dialogue :
« Le dialogue œcuménique est de plus en plus encouragé, et cette dynamique peut aussi s’appliquer en politique. Plutôt que de recréer un pilier chrétien fermé sur lui-même, on pourrait imaginer un courant chrétien inspiré par ce qui est bon chez les autres. L’objectif serait d’encourager un mouvement politique capable de construire du consensus et de favoriser le dialogue avec d’autres sensibilités. »