Livre : La splendeur des gestes ordinaires


Partager
Livre : La splendeur des gestes ordinaires
Le quotidien en actes. (c) CCO Pxhere
Par Angélique Tasiaux
Journaliste de CathoBel
Publié le
3 min

Treize verbes qui renvoient à des actions ordinaires sont analysés dans toutes les composantes qu'ils recouvrent. Par-delà le choix des mots, Sophie Coste revisite l'histoire humaine, et particulièrement féminine.

Sophie Coste s'est lancée dans un pari audacieux: redonner leurs lettres de noblesse à des tâches souvent jugées ingrates. Dans une langue ciselée, elle revisite de multiples activités étiquetées comme secondaires dans l'imaginaire collectif. Voilà aussi une manière de se réapproprier un passé qui tend à être méprisé par les jeunes générations.

Oui, il y a de la beauté dans des gestes ordinaires; oui, les activités en apparence simple peuvent être porteuses de sens pour celle ou celui qui s'y adonne. Ce livre pourrait être comparé à un manifeste mettant en lumière des activités des temps anciens, lorsque la valeur des jours reposait sur des gestes répétitifs. "Le dédain pour les humbles gestes de l'ombre me heurte profondément", écrit Sophie Coste. Et de regretter que sa propre mère ait refusé de lui transmettre les gestes relevant d'un savoir ancestral et la plupart du temps filial. "A ses yeux j'avais mieux à faire." Faute de transmission assumée, l'agrégée de lettres modernes a entrepris de retrouver elle-même ce qui se cache derrière les mots qui recouvrent de multiples gestes, en apparence anodins. Filer, tisser, coudre, broder, tricoter, laver, balayer, ranger, raccommoder, cueillir, porter, nourrir, soigner… Tous ces verbes se trouvent détricotés par Sophie Coste.

Soulever le rideau des habitudes

L'auteure retrace l'histoire des mots, l'évolution des pratiques à travers les siècles. Ainsi, "La broderie est une corporation reconnue dès le Moyen Age et qui compte alors – c'est surprenant – autant d'hommes que de femmes. Ce métier difficile exige un long apprentissage de huit ans. Et il est lié, bien plus que je ne le soupçonnais, à la peinture." Ou encore le rangement, qui devient une manière d'ordonnancer la beauté. "Et cela, ma mère me l'a enseigné – sans le savoir, simplement en semant de la beauté dans les lieux qu'elle habitait." Dans cette lente balade étymologique, Sophie Coste épingle le sens des mouvements du corps qui s'apparentent quelquefois à ceux de l'âme : "Sollicitude du geste de recueillir. Pour préserver de la disparition, de la perte, de la dispersion." Et de souligner ce qui ne tombera pas dans l'oubli, grâce à une attention nourrie : "les dernières paroles d'un proche, ses dernières volontés, son dernier soupir". Il s'agit ni plus ni moins que de "Donner refuge en soi, chez soi".

En guise de conclusion : "On ne se recueille qu'en se détournant de ce qu'on ne cueillera pas. Oui, cueillir ou recueillir, c'est rassembler, mais surtout se rassembler autour de ce qu'on a élu comme essentiel." Un livre à lire au gré de ses envies et des chapitres, pour réfléchir autrement au quotidien qui nous entoure.

Angélique TASIAUX

Sophie Coste, Gestes de femmes. Philippe Rey, 2024, 256 p.


Dans la même catégorie