Mardi 7 janvier, cela faisait dix ans que des terroristes pénétraient dans la rédaction du journal satirique Charlie Hebdo et y faisaient huit morts. Dix ans plus tard, les mêmes questions résonnent encore : peut-on rire de tout ? Quelles sont les limites de la liberté d’expression ?
En janvier 2015, l’attaque contre Charlie Hebdo et le supermarché casher ont marqué les esprits. Et puis cette phrase de soutien reprise en boucle : “Je suis Charlie”. Aujourd’hui, la liberté d’expression est de plus en plus revendiquée en ligne, et cela se ressent par les décisions prises par les grands patrons des réseaux sociaux que sont Elon Musk (X) et Mark Zuckerberg (Facebook, Instagram).
10 ans plus tard
Dix ans après cet attentat, la liberté d’expression a-t-elle évolué ? Pas vraiment, à en croire Carine Thibaut, directrice générale d’Amnesty Belgique, interrogée sur le sujet dans Décryptages. “Ce droit essentiel n’a pas gagné de terrain en 10 ans,” affirme-t-elle.
“Nous constatons chez Amnesty International que les menaces contre cette liberté ont évolué,” explique Carine Thibaut. “D'une part, de nombreux régimes autoritaires pourchassent les voix dissidentes, y compris journalistes et caricaturistes. D'autre part, certaines tendances prônent une liberté d'expression sans limites ni vérification des faits. Cela pose un danger énorme.”
La fin du fact-checking
Ce qui semble donc être l’un des grands problèmes de la liberté d’expression aujourd’hui est la multiplication des fausses informations. Pour pallier cela, le métier de fact-checker (vérificateur de faits) a été inventé et mis en place dans les médias et par les réseaux sociaux. Lors de son achat de Twitter, Elon Musk a supprimé ce rôle en annonçant que la communauté allait s’auto-réguler. Cette semaine, c’est au tour de Mark Zuckerberg, patron de Méta, de faire la même annonce.
“Des personnalités influentes comme Elon Musk défendent l’idée que tout devrait pouvoir être dit, y compris des propos haineux, sans conséquences juridiques,” explique Carine Thibaut.
Le danger annoncé par la directrice générale d’Amnesty Belgique est également ressenti par Marc-Antoine Mathijssen, lui aussi interrogé sur le sujet dans Décryptages. “Aujourd’hui, les réseaux sociaux, tels que X et Méta (Facebook et Instagram), permettent tout. Ces plateformes sont devenues des lieux où tout le monde peut exprimer n’importe quoi, sans contrôle.”
Ne pas rire de tout
Mais alors, peut-on aujourd’hui tout dire ? La réponse à cette question semble s’imposer pour nos deux invités. Carine Thibaut nous rappelle tout d’abord qu’une des principales limites à la liberté d’expression est l’appel à la haine.
Pour Marc-Antoine Mathijssen, la liberté de religion est une limite importante. “À la question, peut-on rire de tout, y compris des croyances religieuses ? Pour ma part, je pense qu’il faut respecter la dignité de chacun.”