Durant l'après-midi du 27 septembre, le pape s'est rendu à Leuven, à l'occasion des 600 ans de la fondation de l'université. Ce sont les réfugiés qui ont été au coeur des interventions.
Arrivé avec quelques minutes de retard dans une Fiat blanche en simple passager, le pape François a été accueilli dans le hall universitaire par une haie d'honneur, où figuraient notamment la rectrice de l'UCLouvain, Françoise Smets, et l'archevêque Luc Terlinden, avec une animation du choeur universitaire de Louvain. Le pape s'est ensuite rendu dans la salle des diplômés, où il a signé le livre d'or.
C'est dans une atmosphère de chant grégorien que la célébration académique a débuté, avant que Luc Sels, le recteur de la KULeuven, ne prenne la parole pour se réjouir de la venue du pape François dans son institution, résolument inspirée par "l'indépendance scientifique". "Vous arrivez à une époque où nombreux sont ceux qui cherchent à donner un sens..." et d'évoquer plus particulièrement le sort des migrants. "Le réfugié frappe à notre porte. Sera-t-elle ouverte?" C'est que la perte de confiance dans l'autre guette... "Le flux de réfugiés entraîne un débat acerbe et polarisé", souligne-t-il. Et de s'élever en faveur de la diversité et de citer un extrait de Fratelli tutti. "Nous sommes des frères et des sœurs en cette même réalité partagée." Luc Sels rend alors hommage aux multiples initiatives déployées par l'Eglise catholique, sans oublier celles émanant directement de la KU Leuven. S'adressant au pape, Luc Sels lui dit alors: "J'ai été très heureux de votre réaction ce matin", en évoquant sa prise de parole engagée à propos de la responsabilité de l'Eglise dans certains cas d'abus sexuels. Ensuite, Luc Sels se dit favorable à une plus grande féminisation de l'Eglise. Enfin, rejoignant le discours tenu par le pape dans le courant de la matinée à Laeken, il conclut en soulignant la nécessité de construire des ponts, plutôt que des murs.
Un témoignage sous la forme d'une vidéo a suivi le discours rectoral. Le sort de deux étudiants en médecine de la KU Leuven a été mis en lumière. L'un venant de Palestine, l'autre d'Asie. "On perd une part de soi-même", souligne le jeune originaire de Palestine. Tandis que la jeune fille relève que "la guerre se déroule sur le corps des femmes".
Après un nouvel intermède musical, le pape s'adresse à l'assemblée et pointe le risque pour les universités de devenir des cathédrales dans le désert. Pour lui, les universités promeuvent "la passion pour la recherche de la vérité". Et d'évoquer un récit extrait du livre des Chroniques. "Devenir un espace ouvert, voilà la grande mission des universités. Nous sommes immergés dans une culture marquée par le renoncement à la recherche de la vérité. (...) La recherche de la vérité est pénible, parce qu’elle nous oblige à sortir de nous-mêmes, à prendre des risques, à nous poser des questions." Et d'inviter l'assemblée à ne pas tomber dans l'acédie (NDLR: un manque de soin pour sa vie spirituelle). "Rester une fenêtre ouverte sur le monde d'aujourd'hui", voilà encore l'une des exhortations du pape. Et celui-ci de remercier la communauté universitaire pour son accueil des réfugiés, illustré par l'accueil des deux étudiants qui ont pris part à la vidéo projetée.
S'ensuit la remise de deux cadeaux au pape François: un livre remis par Bénédicte Lemmelijn, professeur à la KU Leuven, et une représentation de la sedes sapientae de la KU Leuven.
Parmi l'assistance limitée à une centaine de personnes ont pris place plusieurs évêques belges, dont Mgr Koen Vanhoutte, Mgr Jean-Pierre Delville, Mgr Pierre Warin, Mgr Guy Harpigny, Mgr Lode Aerts et... Mgr Jean Kockerols qui signe ainsi son retour public.
Les retrouvailles de deux universités
On le sait, le Palais royal et la KU Leuven sont à l'initiative de la venue du pape François en Belgique. L'anniversaire de la fondation de l'université louvaniste était une occasion toute trouvée pour inviter le souverain pontife. Sans frilosité, Luc Sels, recteur de la KU Leuven depuis 2017, a déclaré dans le journal Dimanche: "il ne serait pas bon de réduire l’Eglise aux problèmes actuels d’abus. Ces abus ne doivent pas éclipser tout le bien que l’Eglise fait dans le monde." Néanmoins, le sociologue de formation estime essentiel l'attachement de l'université à son indépendance, afin de continuer à "évoluer avec son temps".
L'amitié qui unit ceux qui furent les recteurs de l'UCLouvain et de la KU Leuven, Vincent Blondel et Luc Sels, a certainement contribué à redéployer les liens entre les deux institutions universitaires, marquées par leur scission en 1968. Si la bulle papale remonte à 1425, les 600 ans seront officiellement célébrés durant l'année 2025. La venue du pape s'inscrit donc en prélude des festivités.
Angélique TASIAUX
