Nous voilà bientôt dans le temps de l'Avent... mais ce dimanche, nous fêtons le Christ Roi... Retrouvons le commentaire du jour...
Welcome to Paradise! Voilà le titre d’un film que j’aimerais imaginer. Qui donc ne s’est pas demandé ce qu’il y a après la vie ici-bas? Le Royaume des cieux, un petit coin de paradis…? Et devant la porte, une longue file d’attente. Enfin, nous allons rencontrer Jésus-Christ. L’autre jour, un ado me demandait: "Est-ce que vous avez déjà vu Jésus?"
Une longue file: ils étaient là, tous bien à l’heure, sûrs d’eux-mêmes et le sourire aux lèvres. Nul n’aurait pu les compter, tant ils étaient nombreux, hommes et femmes de tous âges, pays, langues et races, chacun auréolé d’orthodoxie, la poitrine et même le dos couverts de médailles, brandissant bien haut l’insigne des élites et clamant leurs mérites. Du très beau monde rassemblé pour la distribution des récompenses attendues, supputées, assurées et cent fois méritées. Les justes de toutes les nations: une féerie de formes et de couleurs, de tons et d’éclats lumineux. Toute la gamme merveilleuse des pratiques et dévotions, observances et célébrations, retraites et recyclages, mandats exceptionnels, ordinations sacrées, jeûnes et cotisations, diplômes de la "science de Dieu", mitres et crosses.
Et puis ce fut l’apocalypse! La foudre d’un stupéfiant verdict. Les premiers n’étaient pas les premiers. Les indulgences amassées n’étaient plus que chiffons de papier, la bourse aux valeurs gonflées s’effondrait désemparée… La multitude qui se pressait dans l’ombre, modeste et résignée, surgit alors dans une lumière de gloire… Les chœurs célestes entonnèrent aussitôt à pleine voix la "marche des héritiers" pour ces amis des petits et des faibles, des oubliés et des rejetés, qui allaient recevoir "le royaume préparé (pour eux) depuis la création du monde".
Ahurissement unanime quand le Fils de l’Homme, ce Messie-chef dont parlait Daniel révèle son incroyable identité. La même question surgit comme un cri de vie ou de mort: "Quand t’avons-nous vu…? Quand sommes-nous venus jusqu’à toi?" Sa présence essentielle, incarnée et réelle, était dans tous ces endroits où on ne le cherche guère, parmi les exploités et les analphabètes, les incurables, les sans-logis et les apatrides, les prisonniers et les inutiles. Le Fils a été, est et sera toujours l’un d’entre eux. L’incroyable et l’inimaginable est tout simplement vérité. "Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait." Mais "chaque fois que vous ne l’avez pas fait à l’un de ces petits, à moi non plus vous ne l’avez pas fait".
Ainsi chaque jour et jusqu’au dernier, ce sont les "petits" qui nous jugent et non les princes et autres "grands" de ce monde. "Regarde ton frère, tu vois ton Dieu." L’empathie ne suffit pas qui fait nous "mettre à la place de l’autre" pour nous mobiliser en sa faveur. C’est mettre Dieu à la place de l’autre à quoi invite le Christ. Tu étais là, et je ne le savais pas…
Père Eric VOLLEN, sj