Le cardinal Pierbattista Pizzaballa a récemment déclaré être prêt à être échangé avec des otages détenus par le mouvement Hamas dans la bande de Gaza. Dans une interview, le patriarche de Terre Sainte a fait état de «discussions» en cours pour la réalisation de cette démarche.
«Il n’y a pas de problème pour moi, il y a une volonté absolue», a déclaré le cardinal Pizzaballa en répondant, début octobre 2023, à un journaliste sur sa disposition à s’échanger avec des enfants kidnappés par le Hamas. Une affirmation réitérée dans une interview au média brésilien O Sao Paulo, diffusée le 20 octobre. «Bien sûr! Je ferais la même chose pour les Palestiniens, car je ne fais pas de distinction», a précisé le prélat italien dans ce nouvel entretien.
Mgr Pizzaballa demandait déjà mi-octobre qu’on fasse "tout ce qui est possible"
pour obtenir la liberté des enfants captifs afin qu' "ils rentrent chez eux".
Il a également révélé que «la réponse [à sa suggestion, ndlr] a été très forte de la part des Israéliens et de ce mouvement islamique». A la question de savoir si une démarche en ce sens était engagée, le cardinal a répondu: «Disons que nous discutons».
Lors de son infiltration depuis la bande de Gaza, le 7 octobre, le mouvement palestinien a enlevé près de 200 personnes, dont probablement une quinzaine d’enfants.
Division totale
Le patriarche de Terre Sainte a également confié à O Sao Paulo que la communauté chrétienne locale vivait «très mal» ce nouveau conflit. La plus grande partie des catholiques de Terre Sainte sont en effet des Palestiniens, dont certains vivent à Gaza, alors que d’autres sont d’origine juive. «Vous pouvez donc imaginer les tensions qui existent au sein de la communauté, pour essayer de rester unis et de travailler ensemble pour la paix. C'est très difficile».
Pierbattista Pizzaballa a donné une image passablement sombre de la situation actuelle dans la région. «Aujourd'hui, la division est totale. Chacun ne voit que sa propre douleur, pas celle de l'autre. Si vous dites quoi que ce soit sur Israël, les Palestiniens se sentent trahis et vice versa. C'est quelque chose qui a éclaté de manière très profonde et qui, à mon avis, sera la chose la plus difficile à reconstruire après ce conflit.»
Le cardinal estime en général qu’aucune paix ne sera possible si «chacun veut garder tout ce qu’il veut.» Pour le patriarche, «il n'y a pas de paix 'propre’, il ne faut pas confondre la paix avec la victoire (…). La paix exige du courage, car les deux parties doivent laisser tomber un certain nombre d’exigences. (…) Il faut donc trouver un moyen, le courage de choisir des priorités et de décider ce qu'il faut laisser de côté, ce qu'il faut abandonner pour le plus grand bien de la paix, de la stabilité et d'un avenir à entrevoir.»
Comprendre que l’autre n’est pas un monstre
«S'ils le veulent, Israéliens et Palestiniens peuvent parvenir rapidement à la paix parce qu'ils savent quels sont les problèmes, ce qu'ils peuvent abandonner et ce qu'ils ne peuvent pas», assure le cardinal italien. «Les problèmes sont bien connus. Ce sont les frontières - les colonies, etc. -, les réfugiés et Jérusalem. Bien sûr, tous les réfugiés ne pourront pas revenir, mais les frontières devront être définies. Bien sûr, les Palestiniens doivent avoir une pleine autonomie en tant que nation.»
«En tant qu'Église, nous devons d'abord travailler avec notre communauté, pour qu’elle ne soit pas prise dans ces récits de l'un contre l'autre, relève le patriarche de Terre Sainte. (…) Bien sûr, appelant à la justice, nous ne pouvons pas rester silencieux face aux violations des droits de l'homme, etc. Mais sans cultiver ce que nous voyons en ce moment, le ressentiment et la haine, dans nos cœurs et même dans ce que nous disons dans nos discours et nos homélies.»
«Nous devons créer des occasions de rencontre entre chrétiens, juifs et musulmans, non pas à un niveau élevé, mais au niveau local, dans les paroisses, les communautés, les écoles, en emmenant les enfants voir une synagogue, une mosquée ou une église, souhaite le cardinal Pizzaballa. Ce genre de choses est très important parce qu'il permet aux gens de comprendre, avant tout, que l'autre existe et n'est pas un monstre, et de reconnaître que ces différentes traditions font partie de la vie dans ce pays.»
(cath.ch/osaopaulo/arch/rz)