Dans nos vies, comme dans celle de Jésus à l’époque, tout n’est pas toujours facile mais il faut continuer et prendre le jour présent tel qu’il est… et Jésus le fit également quand il prit la route de Jérusalem. Et voici le commentaire du frère Philippe Henne qui nous partage ses réflexions sur l’évangile de ce 13e dimanche du Temps Ordinaire…
Cela nous arrive souvent de ne pas avoir de courage le matin, pas simplement parce qu’on est fatigué ou paresseux. Non, parce qu’il faudra recommencer à vivre avec un conjoint colérique, un patron humiliant ou des collègues méprisants. C’est facile dans les films ou les séries: le héros, grand et fort, bat tous ceux qui l’ennuient ou l’attaquent. Ce n’est pas comme cela dans la vie. Dans la vie, il faut tous les jours recommencer à surmonter les mêmes difficultés. Et cela n’est rien en comparaison de ceux et de celles qui ont perdu un enfant ou qui ont chez eux un enfant gravement handicapé. C’est tous les jours qu’il faut reprendre cette lourde charge sur le dos et parfois on se dit: « un jour, rien qu’un jour, je continuerai aujourd’hui et demain on verra ». On n’ose pas regarder plus loin. Un jour à la fois suffit.
Et Jésus prit avec courage la route de Jérusalem. Il sait que là, à la fin du voyage, il y aura la croix. Il y aura aussi la trahison de tous ceux qui l’entourent pour le moment. Ils sont heureux d’être avec Jésus. Ils ne se doutent pas de ce qui va se passer. Jésus a beau leur en parler. Ils n’écoutent pas. Ils ne veulent pas entendre. Et c’est souvent la même chose avec nous. On a un gros poids sur le cœur, on a peur de l’avenir, on a peur du présent. On voudrait pouvoir partager ses soucis, déposer un moment ce lourd fardeau en le confiant à quelqu’un d’autre. Mais les autres passent à côté de nous comme les voitures dans la rue. Ils ne s’arrêtent pas. Ils n’écoutent pas. Et pourtant, Jésus ne se fâche pas. Les Samaritains ne veulent pas l’accueillir. Les disciples voudraient les détruire, mais Jésus n’est pas venu pour détruire, mais pour construire, même les larmes au bord des yeux.
Mais alors comment faire pour continuer dans ces moments si difficiles? Il faut faire comme Jésus. Il faut pouvoir se retirer dans le silence et prier. Jésus était porté, soutenu par l’amour de son Père. S’il est venu sur terre, c’est à cause de lui. Ce n’était pas simplement pour lui faire plaisir, mais c’était pour parler de lui au monde entier, pour dire qu’il est tellement bon, tellement miséricordieux. Et c’est cela, ce qu’il faut retrouver à l’intérieur de nous, c’est cet amour que Dieu nous porte à tout instant. Il faut garder bien précieusement le souvenir de ces quelques petits instants où on a senti la présence de Dieu dans notre vie. Ils ne sont pas nombreux, mais ils sont vrais, ils sont importants. Ce ne sont pas des choses qu’on invente ou qu’on a créées, parce qu’on sait au plus profond de nous-mêmes que ce sont des moments de vérité, pleins de lumière et de chaleur.
C’est cela qui nous permet de nous lever et de nous mettre en route. C’est cela qui nous attire aussi, non seulement retrouver ces moments de bonheur, mais surtout aller vers la source de toute cette lumière, Jésus-Christ avec l’amour de son Père. On le sait, ce n’est pas en restant assis et en pleurant que nous serons guéris de toute cette douleur. Il faut laisser les morts enterrer les morts. Il faut laisser les regrets et les rêves déçus derrière soi. Nous n’avons certes plus l’enthousiasme du pompier qui court dans la maison en feu, à la recherche de l’enfant qui crie, prisonnier dans sa chambre. Nous devons retrouver le courage tranquille de l’infirmière ou de la mère de famille qui veille dans la nuit et se lève malgré la fatigue. C’est dans les petits gestes de tous les jours qu’on retrouve la tendresse de Dieu au milieu de notre vie. Nous avons trop souvent le regard brouillé par les larmes ou par le chagrin, comme Marie-Madeleine auprès du tombeau le jour de Pâques.
C’est avec courage que Jésus se mit en route vers Jérusalem où il mourra sur la croix, mais c’est là aussi qu’il ressuscitera. Alors les apôtres, tout étonnés, ouvriront toutes grandes les portes et les fenêtres. Ils annonceront que Dieu est vivant, vainqueur de la mort et du tombeau et qu’il nous emporte avec lui dans son royaume, victorieux.
Frère Philippe HENNE, o.p.