
« A vrai dire, je ne cherche plus Dieu. Depuis longtemps.
Je L’ai cherché. Je L’ai guetté. Je L’ai attendu. (…) Je L’ai couru de livre en livre, de sessions en retraites, de méthodes en recettes. (…) Dieu n’est plus, depuis longtemps, la première pensée de mes matins. Oserais-je dire qu’en soi, Il ne m’intéresse plus? Si je veux être vrai, il faut que je le dise.«
Ces lignes, c’est un prêtre qui les écrit. En 2018, le père Raphaël Buyse publie chez Bayard Autrement, Dieu (lire en page 15 du journal Dimanche de cette semaine). Et ce livre est un véritable petit trésor. L’homme y témoigne d’un long silence. Celui que Dieu renvoie soudainement à ses appels. Depuis longtemps, ce prêtre du diocèse de Lille avait pris goût à suivre le Christ. Il s’était donné pleinement. Sans compter. Mais après 35 années de prêtrise, le voilà donc confronté au silence de Dieu.
L’homme ne panique pas. Il s’en va trouver refuge au monastère de Clerlande, à Ottignies. « Accueilli par ces vieux moines comme un des leurs« , il va y passer un an. Avant de reprendre la route. Différemment.
Poétique, profond, très personnel et tellement universel, ce livre est un bijou de spiritualité. Au-delà, nous voudrions en retenir trois éléments – étroitement liés.
Attention à l’activisme! Raphaël Buyse avait multiplié les missions et cumulé les responsabilités. Il avait atteint de nombreux objectifs et engrangé des résultats. C’est bien. Mais cela peut être dangereux. Dans notre Eglise, où les ouvriers viennent toujours à manquer, comment éviter le piège de l’activisme? Comment être toujours davantage témoin du Christ sans nécessairement faire plus de choses?
Les super-héros n’existent pas. Et pourtant, on croit parfois en croiser, notamment en Eglise. Vous savez, ces personnes qui donnent l’impression de toujours gérer: homélies parfaites, réponse à tout, foi sans faille… Rien que pour ça, qu’il est bon de lire un prêtre afficher ses doutes!
Nous avons besoin d’oasis. Béni sois-tu, Seigneur, pour Clerlande, Maredsous, Orval, Hurtebise, Scourmont, La Pairelle, et tous les autres! Et pour les personnes qui donnent une âme à ces lieux. Dans la plus grande tradition monastique, elles offrent un accueil inconditionnel et un espace hors du monde. Exactement ce qu’il faut pour lutter contre l’activisme. Et nous rappeler, quand cela serait nécessaire, que les super-héros n’existent pas.
Vincent DELCORPS