Fondée en 1994, l’équipe de football du Vatican défend haut et fort les couleurs de la cité-état, le jaune et le blanc, face à des sélections venues des quatre coins du monde. Si les portes de la coupe du monde lui sont plus que probablement à jamais fermées, l’équipe du Saint-Siège porte des combats humanitaires et des projets caritatifs bien plus grands.

L’État de la Cité du Vatican est, avec ses 0,44 km2 (soit moins de 0,5 % de la superficie de la Région bruxelloise), le plus petit pays au monde. Le Siège de l’Eglise catholique est habité par près de 1000 résidents permanents. Pourtant, à l’instar des micro-États tels que Saint-Marin, Andorre ou Monaco, le Vatican joue au ballon et dispose même d’une équipe nationale.
La rumeur populaire rapporte, souvent avec humour, que cette sélection nationale est composée uniquement de prêtres. C’est faux : les joueurs sélectionnés sont soit des résidents permanents de la Cité, soit (ou également) des salariés du Saint-Siège tels que des employés du musée, de la Poste, de radio, des services techniques et même, parfois, des Gardes suisses.
Des matchs au pied de la basilique Saint Pierre
L’équipe de Vatican de football fait ses grands débuts en novembre 1994 en disputant une rencontre officielle face à l’équipe réserve de Saint-Marin. Le match, joué au Stadio Petriana à Rome (la Cité du Vatican ne disposant d’aucun terrain), se termine par un score nul 0-0. Sachant que ce match est plus que probablement le premier d’une longue série, l’équipe se dote de tenues officielles en jaune et blanc (les couleurs du Saint-Siège) et élit domicile au stade Pie XI, une enceinte de 500 places située à 400 mètres de la basilique Saint Pierre, offrant une vue imprenable sur sa célèbre coupole.
En octobre 2010, Giovanni Trapattoni, légende du ballon rond et ancien entraineur de la Juventus de Turin, de l’AC Milan et du Bayern Munich devient contre toute attente le nouveau sélectionneur de la Cité du Vatican, accomplissant par là même la promesse qu’il s’était faite, quelques années auparavant, de devenir coach du Vatican avant de se retirer du monde du football. Fervent catholique, l’italien est également connu pour avoir été surpris plusieurs fois, durant la Coupe du monde 2002, à asperger la pelouse d’eau bénite avant chaque rencontre de la sélection italienne dont il était le coach à l’époque.
Les « Jaunes et Blancs » défient des équipes du monde entier
Jusqu’à maintenant, la sélection vaticane a affronté une dizaine d’équipes de tout acabit, venues des quatre coins du globe et … avec plus ou moins de succès : sélection nationale de Palestine (défaite 1-9), équipe olympique de Chine (victoire 4-3), club suisse du SV Vollmond Zürich (victoire 5-1), club liechtensteinois du FC Schaan Azzuri (victoire 8-1), sélection d’anciens joueurs du Borussia Mönchengladbach (lourde défaite 4-21), etc. Cependant, les résultats sont souvent secondaires par rapport à la portée diplomatique et/ou caritative qui entoure chacun des matchs.
Les Vaticanais ont développé une rivalité sportive toute particulière avec leurs homologues monégasques. Au fil des ans, les deux nations se sont rencontrées à cinq reprises. Résultat : 2 nuls et 3 victoires pour … la principauté de Monaco ! Ci-dessous, retrouvez une vidéo des hymnes monégasque et vatican joués juste avant le coup d’envoi d’un match amical opposant les deux micro-nations au stade Pie XI. Une rencontre remportée 2-0 par Monaco.
A quand une participation du Vatican à la Coupe du Monde ?

La réponse est : probablement jamais ! Il faudrait un miracle pour espérer voir un jour se jouer une rencontre officielle entre le Vatican et l’Argentine, nation du football chère au pape François, nos Diables Rouges, ou n’importe quelle grande équipe nationale. Les raisons à cela sont multiples et parfois cocasses.
Tout d’abord, d’un point de vue strictement footballistique, aucune sélection nationale digne de ce nom ne souhaite perdre du temps et d’énergie à disputer un match contre une équipe composée uniquement de résidents ou de salariés de la Cité pontificale (voire parfois de membre de leurs famille). Le vivier de joueurs vaticans est trop faible et leur niveau de jeu correspond à celui de footballeurs amateurs de par chez nous. Or, les footballeurs professionnels modernes se plaignent déjà tellement de calendriers surchargés et d’un trop grand nombre de matchs par saison. Faire un déplacement jusque Rome pour jouer contre une équipe plus symbolique que douée techniquement ne les ravirait pas outre mesure.
En outre, faire déplacer l’équipe du Vatican à l’extérieur, dans un stade adverse, est illusoire puisque, de par leurs fonctions militaires, les gardes suisses qui composent l’équipe ne peuvent se rendre à l’étranger pour taper la balle.
Ni la FIFA ni l’UEFA ne reconnaissent l’équipe du Vatican

Enfin, là où le bât blesse, plus que tout ce qui a été cité précédemment, c’est que l’équipe nationale du Vatican n’appartient à aucune confédération de football. Elle n’est ni membre de la FIFA, la fédération internationale de football, ni de l’UEFA, la fédération européenne. La Cité du Vatican partage ce statut particulier avec huit autres états souverains dont l’équipe de football n’est pas reconnue officiellement, tels que Monaco, Kiribati, Tuvalu et même le Royaume-Uni (remplacé par les équipes des quatre nations constitutives : Angleterre, Ecosse, Irlande du Nord et Pays de Galles).
Sans adhésion officielle à un organisme de football, le Vatican ne peut prétendre à aucune compétition officielle telle que la Coupe du Monde ou la Coupe d’Europe et doit se cantonner aux seuls matchs amicaux entre petites équipes, souvent dans une démarche caritative. Pourtant, en 2006, l’idée d’une adhésion du Vatican à l’UEFA a fait son petit bonhomme de chemin et est même remontée jusqu’aux instances européennes de football. « Si la Cité du Vatican veut devenir un membre de l’UEFA, tout ce qu’elle a à faire c’est postuler », déclarait à l’époque le porte-parole de l’UEFA, William Gaillard. « Si elle remplit nos critères, elle sera acceptée, comme ce fut le cas avec Saint Marin, Andorre ou le Liechtenstein ».
En réponse à cette invitation, le cardinal secrétaire d’état Tarcisio Bertone, tempérait les ardeurs, affirmant que le futur du football au Vatican résidait uniquement dans les matchs de gala et les compétitions amateurs tels que le championnat vatican, la Coppa Sergio Valci (coupe du Vatican) et la Clericus Cup, une sorte de coupe du monde organisée chaque année dans la Cité pontificale et réunissant 16 équipes de séminaristes et de prêtres venues du monde entier.
Huit clubs se disputent le titre de champion du Vatican
Historiquement, le football a toujours fait partie de l’ADN du Saint-Siège. Déjà au 16ème siècle, le pape Léon X assistait attentivement aux matchs de « calcio » (ancêtre du football moderne) dans les rues de Rome. Au sortir de la seconde Guerre mondiale, un mini-championnat a vu le jour au sein même de la Cité du Vatican, mettant aux prises quatre équipes d’employés du Saint-Siège. Puis, en 1972, s’inspirant de ce qui se structurait ailleurs, le Vatican a créé une fédération de football et, dans la foulée, un championnat disputé par huit clubs. Encore aujourd’hui, chacune des huit équipes du championnat réunit des salariés d’un service ecclésiastique bien précis.

Comme son nom le laisse deviner, l’équipe Musei Vaticani, premier club fondé au sein de la Cité, se compose d’employés travaillant dans les Musées du Vatican. Le FC Guardia regroupe quant à lui des membres de la garde suisse pontificale. Les footballeurs du Rappresentativa OPBG proviennent des services de soin de santé de l’hôpital pédiatrique romain Bambino Gesù, sous juridiction extra-territoriale du Saint-Siège. Archivio Segreto est formé d’employés des Archives Apostoliques.
Si le niveau de jeu s’avère plutôt équilibré entre les huit formations, une équipe truste cependant le haut du palmarès depuis plusieurs années : le Dirseco Calcio en est à huit titres de champion cumulés, un record ! Pour les équipes en perdition dans le classement, la Coupe du Vatican, organisée simultanément, leur donne la possibilité de décrocher un titre. Aujourd’hui, l’équipe nationale puise ses joueurs parmi les meilleurs éléments du championnat local.
Deux nouvelles équipes initiées par le pape François

La papauté et le football, c’est une histoire d’amour qui remonte à longtemps. Dans sa jeunesse en Pologne, Jean-Paul II était un gardien de but athlétique et grand fan de Barcelone. Son successeur, Benoit XVI, avait l’habitude d’assister à l’entrainement des joueurs de la sélection vaticane, leur rappelant à chaque fois leur rôle d’ambassadeur sportif de la Cité du vatican. Le pape François, fervent supporter du club de San Lorenzo en Argentine, a lancé plusieurs actions concrètes en vue de susciter un nouvel élan sportif au Saint-Siège.
En novembre dernier, il a réuni autour de lui plusieurs gardes suisses, employés du Vatican, enfants d’employés et prêtres pour relancer une nouvelle équipe de football papale : Fratelli Tutti, du nom de l’encyclique portant sur la fraternité et l’amitié sociale. L’occasion de dépoussiérer et prendre la relève de l’équipe nationale du Vatican, en manque de match depuis 2019. Pour marquer le coup, le pape François a organisé le dimanche 21 novembre dernier une rencontre à Rome entre son équipe Fratelli Tutti et une équipe représentant l’Organisation mondiale des Roms, arbitrée par la star italienne Ciro Immobile. Une rencontre associée à une collecte de fonds visant à soutenir des projets pour l’inclusion des Roms et des personnes les plus vulnérables dans la société. Pour l’occasion, l’équipe vaticane était vêtue d’une nouvelle tenue frappée des armoiries du Vatican, à savoir les clés de Saint-Pierre et la tiare papale.
Enfin, plus étonnant, le Vatican s’est doté en mai 2019 d’une équipe féminine composée d’employées, mais également d’épouses et de filles du personnel de la cité-état. Pour leur premier match, elles se sont confrontées à l’équipe féminine de l’AS Rome, pensionnaire de division 1 italienne. Une rencontre qui rentrera dans les annales, plus pour la portée symbolique que sportive, puisque les vaticanaises se sont finalement inclinées 0-10 à Rome. Un résultat cinglant, certes, mais loin de compromettre la destinée de la sélection féminine du Vatican dont le but, avant tout, est de mettre en lumière les combats portés par les femmes au sein de l’Eglise. « Même si elles perdent 30-0, ça m’importe complètement » déclarait Danilo Zennaro, délégué au sport du Vatican, avant le match. « Ce qui m’importe, c’est qu’elles aient l’opportunité de connaitre des joueuses professionnelles, de créer des liens et des amitiés ».
Clément Laloyaux