En ce 7e dimanche du Temps Ordinaire, le frère Philippe Henne nous partage son commentaire de l’évangile de Luc « Soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux » (Lc 6, 27-38)
Vraiment, il exagère! Jésus nous demande d’être non seulement bons, mais aussi d’être bêtes. Il commence fort: « faites du bien à vos ennemis » et il dit pourquoi: « les pécheurs rendent service à ceux qui les aiment ». En d’autres termes, pour être un bon chrétien, il faut se laisser faire et même s’effacer. Et Jésus le demande parce que lui, il l’a fait. On le redécouvre aujourd’hui dans cette eucharistie: c’est Jésus tout entier qui se donne vivant à chacun d’entre nous. Il ne calcule pas ce que cela lui rapporte. Il est en train de voir ce que cela nous apporte: de l’amour, du réconfort et une plus grande confiance en soi. En suivant Jésus, on se laisse entraîner par son exemple, comme un kayak qui file sur la Lesse. C’est Jésus qui nous emporte et c’est d’autant plus facile pour nous d’avancer. Jésus a quitté le confort du ciel pour vivre sur terre. Nous aussi, nous devons tout lâcher pour pouvoir aller plus vite vers le royaume de Dieu. Les grosses malles de notre orgueil pèsent bien trop lourd. Il faut s’en débarrasser. Il n’y a pas de place pour elles dans le kayak de notre vie.
Et pourquoi Dieu a-t-il fait tout cela, tout quitter pour venir chez nous? Pour nous enlever à la tristesse de la solitude. En venant parmi nous, Jésus est venu nous arracher au marécage du désespoir pour nous lancer sur la rivière de son amour. C’est ce que disait saint Paul dans la deuxième lecture: il y avait Adam qui traînait les pieds sur la terre et il y a Jésus qui est venu près de nous pour nous élancer vers le ciel. Il ne s’agit plus de savoir si on aura une belle voiture ou une belle maison. Parce qu’alors, on ne sera jamais content. Il faudrait avoir une voiture plus grosse que celle du voisin, et puis, quand on l’aura, il faudra avoir la plus grosse voiture de la rue. Et ça ne finit jamais. On n’a jamais assez. Et c’est la même chose avec la maison. Quand on a une grosse et belle maison, on l’enferme dans des murs avec un système de sécurité, et on est tout seul dans une grande maison bien vide. Et, pendant ce temps, il y en a qui sont fatigués et qui se lèvent quand même, pour aller servir à la banque alimentaire ou bien dans un hôpital comme bénévoles. Et, à ce moment-là, tout va mieux. Ils ne sentent pas leur fatigue. C’est comme Jésus qui marchait sur les routes de Judée et de Samarie. Il avait quitté Nazareth où personne ne voulait l’écouter et il est allé au-devant de gens qui ne le connaissaient pas et auxquels il voulait apporter son amour.
Et c’est ce que nous célébrons au cours de cette eucharistie. Dieu a tout abandonné pour nous donner ce qu’il est. Jésus nous donne un peu de pain, c’est son Corps. Il nous aime tellement que pour lui rien n’est trop beau quand il se donne. A nous de l’imiter.

Frère Philippe Henne, o.p.