Y en a-t-il des mots pour la qualifier… Surnommée belle-doche ou autrefois marâtre, la belle-mère n'a pas souvent le vent en poupe. Pourtant, dans toute belle-fille sommeille potentiellement une belle-mère. Coquin de sort !
Auteure à succès du milieu catho, avec "Ouf! Maman part au couvent" et "Eduque-moi si tu peux!", Stéphanie Combe revient avec un ouvrage consacré à la relation (épineuse) de belle-mère – belle-fille. Journaliste à l'hebdomadaire "La Vie", elle a puisé, une nouvelle fois, dans des anecdotes observées. Nous les aurions aimées plus nombreuses… pour rire de bon cœur !
Stéphanie Combe pointe les différences de génération. Eh oui, si celle des sexagénaires n'a pas vraiment connu le partage des tâches, les jeunes femmes l'imposent, de gré ou de force. Noyés sous les concepts éducationnels, les jeunes parents recourent désormais à 100.000 techniques de soutien parental ou scolaire. Morceau choisi : "Dans vos temps préhistoriques, point d'angoisse de séparation, ni haut potentiel, ni trouble de l'attention, avec ou sans hyperactivité, ni dys en pagaille. (…) A se demander à quoi vous occupiez vos journées et comment vous avez pu élever vos enfants." Le décor est planté. Stéphanie Combe, qui assure avoir une "super" belle-mère, ne cesse de croquer les différences qui grattent, celles qui transforment les échanges en terrains minés israélo-palestiniens. Conçu sous forme d'abécédaire, son livre passe en revue les événements familiaux, des plus récurrents comme les anniversaires et les fêtes de Noël, aux plus exotiques, tels les voyages ou les vacances dans une maison commune, où "le coucher est tardif en raison du rituel de la tisane, dont l'excuse d'être fatiguée ne dispense pas". Conçu dans la mouvance chrétienne, l'ouvrage ne fait pas l'impasse sur l'éducation et la pratique religieuse, sujets de débats ou de conflits potentiels, voire probables. Et de prôner, vaille que vaille, la réconciliation entre les deux camps. "Il est normal que votre future bru vous paraisse immature. Elle a l'âge que vous aviez à son âge."
Une autre génération
Parmi les difficultés éprouvées par le tandem imposé, l'immersion intrusive dans la vie du jeune couple est souvent relevée. D'où le conseil d'éviter les visites à l'improviste, sous prétexte de passer, par hasard, dans le quartier. Autre souci pour certains: le poids des objets anciens plutôt envahissants dans un décor contemporain ou minimaliste. Derrière ceux-ci se cache, bien entendu, l'emprise d'une forme de transmission familiale et surtout d'une obligation de conservation soigneuse. Toutefois, belle-mère et belle-fille se trouvent, la plupart du temps, réunies par un même état de fait. "Dieu merci, une BF est souvent une BM en puissance. Ton tour viendra : toi aussi, tu feras preuve un jour de la même assurance. Pourvu que ce soit avec bienveillance." Car si les deux femmes ne se choisissent pas, mieux vaut se souvenir que "patience et tolérance valent mieux qu'action et réaction". Il importe aussi de bannir la comparaison, toute comparaison. Et si la paix semble compromise, souvenez-vous que "son comportement n'est pas de votre responsabilité, en revanche votre réaction lui appartient."
Auteure de "Nous, les belles-mères", Christiane Collange s'interrogeait déjà, il y a juste 20 ans, sur un mal-être partagé dans toutes les couches sociales de la société française. "Nous qui avons révolutionné les rapports au sein du couple, conquis notre place dans l'univers professionnel, gagné de haute lutte notre droit d'exister en tant que personnes à part entière, pourquoi sommes-nous si démunies dans cet avant-dernier rôle de notre parcours ? Peut-être que ce rôle, celui de belle-mère, est resté si stéréotypé qu'il est demeuré comme un archaïsme dans le flux des mœurs en pleine mutation." Et aujourd'hui, les relations familiales ont évolué au point qu'il est de multiples compositions et variations. Le mot désigne d'ailleurs la nouvelle compagne du père devenue la belle-mère des enfants d'un premier ménage. Au vu de toutes les situations, de nouveaux mots devraient émerger pour distinguer la belle-mère, nouvelle compagne, de celle qui est la mère de son compagnon.
Des exemples heureux
A côté des histoires cocasses à condition de ne pas les vivre soi-même, il est des duos qui fonctionnent de manière harmonieuse et des belles-filles affligées par le décès inopiné de leur belle-mère. Il arrive que l'affection grandisse au fil de l'âge et des événements partagés. Les qualités à prôner dépendent, bien entendu, des circonstances et des caractères. Comme dans toutes les relations humaines, il n'est aucune recette magique ni liste miracle. A chacune de s'engager du mieux de son cœur.
Angélique TASIAUX
Stéphanie Combe, "Belles-mères & belles-filles". Quasar, mai 2021, 156 pages.