Dans son 15ème rapport sur la liberté religieuse dans le monde, l’AED met en garde contre les graves menaces qui pèsent sur ce droit fondamental dans le monde entier.
Le Rapport sur la liberté religieuse dans le monde de 2021, produit par l’œuvre catholique internationale de bienfaisance – et fondation pontificale – Aide à l’Église en Détresse (AED), note qu’il existe de graves violations du droit à la liberté religieuse dans un pays sur trois. Selon ce rapport, présenté officiellement aujourd’hui (20 avril) à Rome, ce droit fondamental n’a pas été respecté dans 62 des 196 pays, soit un pays sur trois, entre 2018 et 2020.
Selon le rapport, des personnes sont persécutées dans 26 de ces pays, et dans 95 % d'entre eux, la situation a encore empiré au cours de la période considérée. Neuf pays apparaissent pour la première fois dans cette catégorie: sept en Afrique (Burkina Faso, Cameroun, Tchad, Comores, République Démocratique du Congo, Mali, Mozambique) et deux en Asie (Malaisie et Sri Lanka). "Les traces de violations de la liberté religieuse observées dans notre rapport de 2018 se sont intensifiées et étendues pour donner la situation actuelle où des attaques systématiques et flagrantes proviennent de gouvernements, que ce soit en Chine ou en Corée du Nord, ainsi que de groupes terroristes internationaux tels que Boko Haram ou « l’État Islamique », et d’autres groupes fondamentalistes. Ces contextes ont été exacerbés par la pandémie de Covid-19. Les États ont utilisé l'insécurité pour accroître le contrôle sur leurs citoyens, et les acteurs non étatiques ont profité de la confusion pour recruter, étendre et provoquer des crises humanitaires plus larges." note Marcela Szymanski dans l'analyse globale du rapport.
L'Afrique se radicalise
Ces statistiques reflètent l’une des principales conclusions du rapport: la radicalisation du continent africain, en particulier en Afrique subsaharienne et orientale, où la présence de groupes djihadistes a considérablement augmenté. Des violations de la liberté religieuse – avec notamment des persécutions extrêmes telles que des massacres - se produisent aujourd’hui dans 42 % de l’ensemble des pays africains. Le Burkina Faso et le Mozambique en sont deux exemples frappants.
Cette radicalisation ne touche pas seulement le continent africain : le Rapport sur la liberté religieuse dans le monde révèle une montée en puissance des réseaux islamistes transnationaux qui s’étendent du Mali au Mozambique en Afrique subsaharienne, aux Comores dans l’océan Indien et jusqu’aux Philippines en mer de Chine méridionale, dans le but de créer un « califat transcontinental ».
Surveillance technologique
Le rapport met en évidence une autre nouvelle tendance: l’utilisation abusive de la technologie numérique, des cyber-réseaux et de la surveillance de masse basée sur l’intelligence artificielle (IA) et la technologie de reconnaissance faciale, afin d’accroître le contrôle et la discrimination dans certains des pays ayant les pires antécédents en matière de liberté religieuse. Cela est particulièrement évident en Chine, où le Parti communiste chinois opprime des groupes religieux à l’aide de 626 millions de caméras de surveillance dotées de l’intelligence artificielle et de scanners de smartphones. Les groupes djihadistes utilisent eux aussi la technologie numérique pour radicaliser et recruter des adeptes.
Conversions, violences et minorités religieuses
D’autres recherches ont montré que dans 42 pays (21 % des pays de la planète), le fait de renoncer à sa religion ou d’en changer pouvait entraîner de graves conséquences juridiques et/ou sociales, allant du rejet familial à la peine de mort.
Le Rapport sur la liberté religieuse dans le monde dénonce également l’augmentation des violences sexuelles utilisées comme arme contre les minorités religieuses – crimes contre les femmes et les jeunes filles enlevées, violées et forcées de se convertir.
De nos jours, environ 67% de la population mondiale, soit environ 5,2 milliards de personnes, vivent dans des pays où la liberté religieuse est gravement violée - parmi eux, les pays les plus peuplés de la planète : la Chine, l'Inde et le Pakistan. Dans beaucoup d’entre eux, ce sont les minorités religieuses qui sont les plus ciblées. Comme le note le rapport, la persécution religieuse par des gouvernements autoritaires s’est également intensifiée. La promotion de la suprématie ethnique et religieuse dans certains pays asiatiques à majorité hindoue et bouddhiste a conduit à une oppression plus grande des minorités, réduisant souvent de facto leurs membres à des citoyens de seconde classe. L’Inde en est l’exemple le plus extrême, mais des politiques similaires sont appliquées au Népal, au Sri Lanka et au Myanmar.
Le rapport publié ce 20 avril relève des progrès significatifs, "en particulier dans le dialogue interreligieux, ainsi que le rôle de plus en plus important des chefs religieux dans la médiation et le règlement des hostilités et de la guerre". Publié pour la première fois en 1999, le rapport analyse tous les deux ans dans quelle mesure le droit fondamental à la liberté religieuse, protégé par l’article 18 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, est respecté pour toutes les religions dans chacun des 196 pays.
Source: AED (Aide à l'Eglise en Détresse)
Retrouvez le texte intégral du rapport ici : https://acninternational.org/religiousfreedomreport/fr/home
Comment la pandémie a accentué les formes de persécutions religieuses dans le monde ? A lire la semaine prochaine dans Dimanche.