Certains avaient été durs avec eux. Les accusant d’être en retrait, prudents. Pire: absents. On avait reproché leur silence, leur manque d’audace, leur conformisme. On les avait soupçonnés d’avoir peur – en vrac: de faire des vagues, de perdre les financements publics ou de s’attirer les foudres du CD&V. On avait donc regretté que les évêques belges ne s’opposent pas plus fermement aux restrictions relatives à l’exercice du culte. On avait prétendu que Jésus aurait fait autrement. Sans doute. Mais bon…
L’histoire retiendra que le 17 mars, ils sortirent de l’ombre. L’évêque d’Anvers surtout. L’évêque de Liège aussi. Ainsi que leurs collègues, flamands et francophones. On les vit dans la grande presse et aux journaux télévisés. Avec des paroles fortes. Et un puissant impact sur l’opinion publique.
Ils furent largement salués. Notamment par les personnes homosexuelles qui croient en Dieu et cherchent à trouver leur place dans l’Eglise. Mais aussi par d’innombrables chrétiens, heureux de voir leur hiérarchie offrir un message d’ouverture. Ainsi que par de nombreux éditorialistes et autres membres de la société civile.
Mais pas par tous. Et les moins nombreux ne furent sans doute pas les moins bruyants. Car ceux-là même qui, quelques semaines plus tôt, ne manquaient pas de regretter l’invisibilité des évêques sur la place publique condamnèrent soudainement la visibilité des évêques sur la place publique. Ils déplorèrent que ces prélats parussent plus prompts à s’éloigner de Rome qu’à s’opposer aux autorités civiles. Leur reprochèrent de semer la confusion et la désunion.
Alors quoi? Bien sûr que tout cela fait un peu mauvais genre. Evidemment qu’il serait plus simple d’avoir une ligne claire, unique et bien droite. D’avoir un clergé homogène. Qui nous dirait clairement qui on peut bénir, quand, comment, sous quelles exceptions et à quelles conditions. Mais nous savons bien que la vie est plus complexe. L’histoire nous montre que même dans l’Eglise, la vérité d’hier peut ne pas être celle du lendemain. Et que la réalité d’ici peut ne pas être celle de là-bas. Se mettre à l’écoute de l’Esprit nécessite d’avoir des repères clairs mais aussi de demeurer attentif au réel, et d’accepter le dialogue. Si on le voulait, prendre le temps de discerner ensemble autour de ces questions pourrait même s’avérer passionnant!
Vincent DELCORPS