Si l’esprit des montagnes vous ravit, vous allez raffoler du livre « Hommes, bois, abeilles ».
Peu connu en langue française, Mario Rigoni Stern (1921-2008) est pourtant considéré comme une sommité par les Italiens. Il décrit, avec justesse et bienveillance, le monde environnant. Le lecteur se trouve ainsi immergé dans un univers montagnard, non pas embelli, mais restitué avec force. Dans ce recueil de textes, Mario Rigoni Stern rapporte une foule de souvenirs d’un temps ancien, quand des métiers disparus étaient encore pratiqués : carriers de marbre rouge, charbonniers, travailleurs dans les fours à chaux…
C’est dans un monde d’autrefois que Stern plonge le lecteur, lorsque les villageois ne mangeaient de la viande qu’à Noël et à Pâques. Parmi les fortes personnalités mises en scène dans des textes courts, il est un curé amateur de chasse. Surnommé Don Lièvre, celui-ci s’est arrogé le privilège de tirer les lièvres levés par ses chiens. Gare à celui qui enfreint la règle, il se verra forcé de ramasser du bois « dans les lots communaux et de l’apporter gratis et pro dei à deux pauvres vieilles qui étaient seules » ! Le bonheur n’est pas compliqué pour qui sait le cueillir : « Marcher comme ça pendant toute la vie. Toujours. » Et si les livres contiennent bien des savoirs, l’école de la vie apporte son lot de connaissances pour les plus dégourdis : « (…) d’après le comportement de mes abeilles, observé ces derniers jours, je crois comprendre qu’elles aussi annoncent la disette ». Stern raconte la vie de tous les jours, quand les fins de mois imposaient de trouver des expédients comme la chasse au renard, qui assurait dix kilos de farine pour préparer la polenta ou, selon les besoins, deux kilos de fromage. Entre les guerres survit l’esprit montagnard, âpre et volontaire.
Angélique TASIAUX
Mario Rigoni Stern, « Hommes, bois, abeilles ». La fosse aux ours, réédition 2019, 160 pages.
Illustration : (c) CCO Pxhere