Cette semaine, les médias, y compris Cathobel, ont relayé une annonce de dégâts qui auraient été causés lors de récents travaux de restauration du mobilier de la collégiale Sainte-Waudru. Suite à la visite des experts, il apparaît cependant que ces dégradations et leur origine soient à relativiser.
Pour rappel, ce mardi des informations de graves détériorations d'œuvres, dont certaines seraient classées, ont été relayées par la presse. "Cependant, nous explique Déborah Lo Mauro, la représentante du Centre interdiocésain du Patrimoine et des Arts Religieux (CIPAR), les experts n'étaient pas encore venus examiner les pièces, suite à l'alerte lancée." Ce mercredi après-midi, l'Agence Wallonne du Patrimoine (AWAP) s'est donc réunie avec la Fédération Wallonie Bruxelles (FWB), l'Institut royal du patrimoine artistique (IRPA) et la Commission des Monuments, Sites et Fouilles. A cette occasion, plusieurs experts, chacun spécialiste d'un domaine, ont pu évaluer la situation.
Selon eux, les dégâts seraient à relativiser. Déborah Lo Mauro explique que "l'on ne peut pas affirmer que toutes ces dégradations soient dues au travail réalisé récemment". Bien sûr, un ouvrier a repeint certaines statues, tel le Saint Eloi, en blanc avec de l'acrylique; mais il l'a fait sur plusieurs couches préexistantes. Notre interlocutrice relève par ailleurs que "il est très rare d'avoir aujourd'hui un tableau ou une statue tels que conçus à l'origine". Ces objets ont traversé des siècles, qui ont dicté leurs modes, leurs exigences et parfois leurs tabous. "Ainsi, rappelle-t-elle, même au XVIIIe siècle, on repeignait des statues ou on recouvrait des parties de tableau.
"Dans cette situation, relève la représentante du CIPAR, il y a peut-être eu un manque de vigilance mais affirmer que les dégâts ont été catastrophiques est à nuancer". D'une part parce que beaucoup d'œuvres concernées ne sont pas classées — ce qui n'excuse bien sûr pas le fait de ne pas les traiter correctement —, d'autre part parce que l'on ne sait pas quels travaux ont réellement été réalisés récemment.
De ce fait, madame Lo Mauro refuse d'incriminer qui que ce soit, à commencer par l'ouvrier qui aurait réalisé ces travaux car elle ne sait ce qui lui avait été demandé ni quelle marge de manœuvre lui avait été donnée. L'ouvrier n'a pas encore pu être rencontré. Elle rappelle par ailleurs que le CIPAR fournit aux fabriques d'église des conseils sur la gestion du patrimoine religieux. Dans ce but, le Centre Interdiocésain donne des outils sur la façon de gérer les œuvres d'art. Très concrètement, par exemple, une brochure explique comment faire des interventions courantes du type dépoussiérage. Ce genre d'interventions fait partie des missions des fabriques d'église.
Les fabriques d'église doivent donc gérer l'utilisation pour le culte d'un lieu qui abrite également un certain patrimoine. Déborah Lo Mauro ne voudrait pas qu'à la suite d'incidents tel que celui-ci "on muséifie les édifices en confiant exclusivement la gestion patrimoniale à des instances publiques. Ce serait franchir un pas qui ferait perdre aux objets le lien qu'ils ont avec le culte proprement dit".
Dans le cas de cet incident, relève Madame Lo Mauro, les premières évaluations des experts dédramatisent donc la situation. En outre, dit-elle, la fabrique d'église de la collégiale Sainte-Waudru a toujours eu de bonnes relations avec l'Institut royal du patrimoine artistique.
Les trois mots qui lui viennent donc à l'esprit sont un appel à la nuance, à la dédramatisation et la compréhension de ce qu'il s'est réellement passé. En bref, il faut prendre le temps du recul et de l'analyse.
Nancy GOETHALS
Image: intérieur de la collégiale Sainte-Waudru_Wikimedia Commons CC by SA 3.0