Dark Waters, c’est le récit de l’enquête sans fin d’un avocat pour faire éclater la vérité sur un crime sanitaire. Une histoire vraie et édifiante!
Il y a une vingtaine d’années, un scandale sanitaire sans précédent a ébranlé les Etats-Unis. Grâce à un avocat spécialisé dans le droit des entreprises chimiques, le monde entier a découvert que DuPont, un géant industriel du secteur chimique, déversait depuis des années des substances nocives dans l’eau potable. Les répercussions dramatiques de cet acte honteux se voient encore à l’heure actuelle. C’est que l’affaire était très sérieuse. Le réalisateur américain Todd Haynes (Carol, Le musée des merveilles) s’est emparé de cette incroyable histoire.
Tout débute dans les années nonante, donc. Robert Bilott est alors avocat pour un cabinet qui défend les industries chimiques. Un beau jour, il est interpellé par un paysan de Virginie Occidentale, voisin de sa grand-mère. Ce dernier le contacte car il est persuadé que l’usine qui jouxte son terrain empoisonne ses vaches. Leur comportement étrange, leurs dents noircies et autres malformations parlent d’eux-mêmes. Intrigué, l’avocat accepte de jeter un œil au dossier. Ce qu’il va découvrir dépasse de loin tout ce qu’il aurait pu imaginer. Ce qui ne devait être qu’un service rendu à une connaissance de la famille va bousculer sa vie pour les vingt années suivantes.
Un film militant
Car en fouillant dans les rapports de DuPont, Robert Bilott se rend compte que la multinationale déverse dans la nature, en toute connaissance de cause, du PFOA et du PFOS, des produits extrêmement dangereux pour les êtres vivants. Effaré par ce qu’il a découvert, Robert Bilott se lance dans une bataille pour faire interdire ce genre de pratiques. Dark Waters nous raconte donc cette enquête et cette lutte contre le géant de la chimie. Avec force détails, indispensables dans ce genre de récit, Todd Haynes signe un film nécessaire. Un acte militant pour la protection de l’environnement. Il est épaulé dans sa tâche par la prestation intense de Mark Ruffalo, l’acteur à l’origine du projet. En suivant les démarches de l’avocat sur vingt ans, ce drame dénonce le comportement des industriels qui parviennent à se cacher en jouant sur des normes. Mais il s’attache aussi à l’aspect humain derrière les mots scientifiques.
Le sort des victimes du PFOA et PFOS accompagne la bataille de l’avocat, lui-même atteint par ce procès sans précédent. Son acharnement a eu un impact sur sa vie de famille et sur sa santé. Robert Bilott était tellement préoccupé par les agissements de l’industriel qu’il n’en dormait plus, laissant toute sa vie en suspens pour se consacrer corps et âme à cette affaire. Dark Waters rend donc hommage à ce héros ordinaire. Il montre que chaque citoyen peut lancer l’alerte, parfois de façon plus efficace que les gouvernements plombés par la lenteur administrative. On ne reconnaît pas forcément le style du réalisateur qui s’est mis au service de son sujet. La mise en scène et la narration sont classiques. Elles font penser à ces films d’enquête tels que Les hommes du président ou plus récemment Spotlight. Mais peu importe la démarche artistique, ici, on en ressort grandi en tant que citoyen.
Elise LENAERTS