1917 est une immersion haletante dans les tranchées de la première guerre mondiale. C’est aussi une expérience cinématographique comme on en vit rarement, mêlant prouesse technique, visuelle et artistique. Magistral !
1917, la guerre fait rage en Europe. Dans des tranchées, Schofield et Blake, deux jeunes soldats britanniques, sont convoqués par leurs supérieurs. Ils ont une mission de la plus haute importance à leur confier. Les jeunes soldats vont devoir traverser les lignes ennemies afin de transmettre un message aux troupes postées en amont. S’ils échouent, plus de 1.600 hommes périront, parmi lesquels le frère de Blake. L’histoire est limpide: il s’agit d’une course contre la montre. Les deux soldats ont très peu de temps pour traverser le champ de bataille et empêcher le massacre. Sur leur route, ils croiseront bien sûr des alliés, mais jamais ils ne seront complètement en sécurité. La tension est donc constante et leur parcours est haletant de bout en bout.
Au cœur des tranchées
Le Britannique Sam Mendes ne doit plus prouver son talent de metteur en scène. Après avoir magistralement réalisé deux James Bond (Skyfall et Spectre), il met sa maestria au service d’un drame intense. Il trouve ici un sujet plus personnel, inspiré par les récits de son grand-père sur la première guerre mondiale. Car ce sont les souvenirs de ce dernier qui ont fait comprendre au réalisateur la réalité du conflit. 1917 reste cependant de la pure fiction. Le réalisateur cherche avant tout à transmettre un esprit, l’ambiance qui régnait dans les tranchées, dans les sous-bois et les caves. Pour y parvenir, il a eu l’idée brillante de recourir au plan séquence. Cette technique donne l’impression que la caméra ne s’arrête jamais de tourner et confère, en général, un côté instantané au film. Logique, en un sens, puisque cette continuité empêche le recours aux ellipses. On ne lâche donc pas une seconde nos deux jeunes anglais en uniforme marron. L’action se déroule en une journée, hautement chargée en adrénaline, évidemment.
À l’instar de Dunkerque de Christopher Nolan, 1917 est une plongée sans fard dans les affres d’une guerre. Nous avons à faire à un film de sensation, dans lequel on expérimente: immergé au milieu des tirs, dans la boue, le froid, on retient notre souffle à mesure qu’avancent les deux jeunes gars. Ce côté nerveux, à fleur de peau, n’empêche en aucun cas l’émotion. Sam Mendes est un esthète, pas un metteur en scène de films d’action. Même quand il réalise un James Bond, on peut reconnaître sa marque, l’attention portée à la lumière et aux ombres. Car si la peur est omniprésente, ces scènes de course entre les balles sont entrecoupées de moments calmes, presque contemplatifs. Le travail fait sur la photographie est ainsi une des plus belles réussites du film. Certaines séquences sont quasiment poétiques, hors du temps. Une nuit sous le feu des tirs se transforme en élégant ballet. Grandiose!
On pourrait craindre une vision esthétisante de la violence, mais il n’en est rien. Les images sont belles, mais aussi très dures. Ce contraste renforce l’intensité de cette immersion dans la première guerre mondiale. Assurément un film qui marquera l’année 2020.
Elise LENAERTS