Dans Au nom de la terre, le réalisateur français Edouard Bergeon raconte l’histoire de son père, agriculteur poussé à bout par le système. Avec Guillaume Canet dans le rôle principal.
Quand il était enfant, Edouard Bergeon a tragiquement perdu son père. Endetté, poussé à bout par le système, cet éleveur de chevreaux a mis fin à ses jours en avalant des pesticides. Trente ans plus tard, son fils, devenu journaliste et documentariste, a décidé de raconter son histoire sur grand écran.
Ce n’est pas la première fois qu’Edouard Bergeon aborde le sujet. En 2012, déjà, il avait suivi Sébastien, un agriculteur au bord du gouffre, pour les besoins du documentaire Les fils de la terre. Son film de fiction est donc poussé par la même envie de faire entendre la voix du monde paysan. Il mise ici sur l’empathie que nous devrions tous ressentir face au destin de cette famille.
Au nom de la terre commence avec le retour de Pierre, un agriculteur de 25 ans qui reprend l’exploitation de son père après être parti étudier aux États-Unis. Au début, tout va pour le mieux. Pierre est ravi de retrouver sa fiancée, il fonde une famille et la ferme s’agrandit. Mais ces douces années se transforment petit à petit en cauchemar. Le secteur est en crise, l’Union Européenne pousse les paysans à investir des sommes astronomiques dans des projets visant toujours plus de rentabilité, au détriment de la santé. Les conditions deviennent intenables pour Pierre qui voit les problèmes d’argent s’accumuler. Malgré tout le soutien de son entourage, il sombre dans la dépression. Cette saga familiale qui se déroule sur quarante ans expose les difficultés auxquelles sont confrontés ceux qui travaillent la terre. Autrefois dépendants du climat, ils sont aujourd’hui soumis aux aléas du marché, comme des entrepreneurs.
Conscientiser
À travers son film, Edouard Bergeon rend donc hommage à son père mais attire également notre attention, à nous citoyens, sur nos comportements alimentaires. Interrogé lors des avant-premières, il rappelle que nous sommes tous responsables de ce que nous mettons dans nos assiettes. Les agriculteurs sont, en effet, les premiers pointés du doigt quand on parle de pesticides. Ils sont pourtant soumis à des pressions énormes et les premières victimes de ces produits toxiques. Le réalisateur prône donc un retour à des modes de consommation respectueux de la nature. Il nous invite dans le quotidien de ces paysans pour nous faire prendre conscience de l’importance d’en finir avec les produits industriels qui ne font de bien qu’aux patrons de multinationales.
Edouard Bergeon brise également le tabou du suicide parmi cette population fragilisée. Car, en France, on estime que le taux chez les agriculteurs est 20% plus élevé que pour le reste de la population. En cause, les conditions de travail, mais aussi les produits qu’ils ingèrent régulièrement dans leurs champs. Heureusement, Au nom de la terre remporte l’adhésion du public français. Plus de 50.000 personnes ont été touchées par ce drame agricole depuis sa sortie le 25 septembre. Gageons qu’il aura le même parcours en Belgique, concernée de la même manière par ces bouleversements.
Elise LENAERTS