
Selon les études, de 1 à 3 % de la population scolaire seraient concernés par les phobies scolaires.
En Fédération Wallonie-Bruxelles, des milliers d’enfants sont en situation de décrochage scolaire. Et parmi ceux-ci, des élèves souffrant de phobie scolaire. Le chemin de l’école devient alors impossible… Que faire ?
En Fédération Wallonie-Bruxelles, il existe douze services d’accrochage scolaire (SAS), agréés par les départements Enseignement et Aide à la jeunesse. Les SAS prennent en charge des jeunes en obligation scolaire, généralement entre 10 et 18 ans. Ils sont 500 chaque année à bénéficier de ce service gratuit d’encadrement. Leur mission ? Faire en sorte que les enfants reprennent le plus rapidement possible une scolarité normale.
Pas de prédisposition
Selon les études, de 1 à 3 % de la population scolaire seraient concernés par les phobies scolaires qui se manifestent par des difficultés à communiquer mais surtout une véritable angoisse, c’est-à-dire une peur infondée, à l’idée de se rendre à l’école. Les recherches ont montré qu’il n’y avait aucune prédisposition « naturelle » mais bien un terrain prédisposant ; on remarque que la communication avec le père est généralement problématique et que la phobie touche plus souvent des enfants qui ont traversé une épreuve personnelle comme la maladie ou le décès d’un proche. Cet événement traumatique réduit leur zone de confort, ils se sentent insécurisés hors de la maison. Le rôle du SAS est de progressivement élargir cette zone en étant tout d’abord un prolongement de la maison pour permettre ensuite à l’élève de rejoindre les bancs de l’école sans développer d’autres pathologies. Les travailleurs sociaux du SAS Aux sources (Huy-Hannut) – psychologue, assistant social, éducateur mais aussi des enseignants détachés de la province de Liège – s’occupent notamment de ses élèves pour qui le chemin de l’école est devenu un véritable calvaire.
Un mal occidental
Vomissements et maux de tête sont les symptômes physiques les plus fréquents, présentés par les enfants souffrant de phobie scolaire. Dans 70% des cas, ne pas intervenir ne fera qu’amplifier le problème. Pour les 30 % restants, la phobie disparait d’elle-même par autorégulation. Au SAS Aux sources, « c’est une méthode cognitivo-comportementaliste canadienne qui fait ses preuves depuis de nombreuses années » explique le directeur, Jean-Marc Cantinaux. Car cette problématique de la phobie scolaire se retrouve dans le monde occidental en général, pas seulement en Europe. La plupart du temps, ce sont les absences répétées de l’enfant qui alertent l’école et les parents. Le centre PMS reste l’interlocuteur de première ligne. Puis le médecin généraliste peut constater l’angoisse et orienter la famille vers un spécialiste (pédopsychiatre, centre de santé mentale) et/ou un SAS. Contrairement aux idées reçues, les enfants atteints de phobie scolaire sont doués et veulent réussir ; leur peur de l’école relève de leur subsconscient et ils ne peuvent l’affronter et y remédier seuls.
De nombreux jeunes sur le carreau
Le SAS, service d’accrochage scolaire, n’est pas une école, c’est un service gratuit, au quotidien, pour accompagner temporairement l’enfant et l’aider à réintégrer l’école. Certains y parviendront après deux mois, pour d’autres, le chemin sera un peu plus long, sachant que l’accompagnement en SAS ne peut se prolonger au-delà d’un an. Beaucoup de jeunes qui « atterrissent » dans les SAS n’ont plus fréquenté l’école depuis plusieurs semaines. On estime qu’ils sont plus de 15 000 à vivre en décrochage scolaire, pour une phobie ou d’autres raisons, en Fédération Wallonie-Bruxelles. Les listes d’attente pour une prise en charge s’allongent chaque année et les parents doivent parfois attendre plusieurs mois avant d’obtenir un premier rendez-vous. Ainsi, « de nombreux jeunes restent sur le carreau » regrette le directeur du SAS de Huy-Hannut.
Fausses « bonnes » idées
Certains parents pourraient être tentés de régler le problème par eux-mêmes, notamment en obligeant leur enfant à se rendre à l’école. Or, quand l’enfant ou l’adolescent est confronté à une phobie scolaire, deux comportements sont à proscrire : vouloir le forcer à se rendre à l’école, car cela ne fera que décupler l’angoisse et provoquer une crise de panique ; choisir les cours par correspondance, loin de solutionner le problème, cette option coupe l’enfant de toute sociabilisation et met en péril son avenir scolaire et social. « Il faut se faire aider et les parents doivent être soutenus car ils se sentent coupables, se demandent s’ils ont mal agi or la plupart des études prouvent le contraire. Il faut les aider à trouver les bons gestes pour soutenir leur enfant » conseille le directeur. « De très très nombreux enfants qui sont passés chez nous s’en sortent et font même de brillantes études. Par la suite, ils sont souvent incapables de dire ou de se rappeler pourquoi ils ont développé une phobie scolaire » conclut, rassurant, Jean-Marc Cantinaux.
Sophie DELHALLE
Vous vous sentez concernés ? Consultez la page du site de la Fédération Wallonie-Bruxelles consacrée aux SAS.
Illustration: Pixabay CCO