Ils s’appellent Salvini, Orban et Le Pen. Ils vantent les sentiments identitaires et la fermeture des frontières. Ils chantent les charmes de la nation et n’ont pas peur d’être autoritaires. Partout, en Europe, les extrémistes gagnent des voix.
Partout? Non. Un petit coin du continent semble résister à cette envolée. « Depuis la Seconde Guerre mondiale et jusqu’à aujourd’hui, la Belgique francophone est moins terre d’extrémismes que les régions voisines », constate Pierre Verjans, politologue à l’Université de Liège. Qui explique cette exception par une raison: l’absence d’identité forte. « Lorsque l’on dit ‘Vive la France’ ou ‘leve Vlaanderen’ », tout le monde sait bien de quoi on parle. Si on dit ‘Vive la Fédération Wallonie-Bruxelles’, tout le monde s’endort… Pour un parti d’extrême droite, il est plus facile de s’implanter lorsqu’il y a une identité forte. » Moins structurel, un autre élément joue sans doute: l’absence d’un homme fort et rassembleur. « La différence entre la Belgique francophone et ses voisins réside dans la faible capacité organisationnelle des partis de droite radicale et dans un manque de leadership », souligne Régis Dandoy, politologue à l’UCLouvain et à l’Université de Gand.
Si les Francophones ne succombent pas facilement aux sirènes de l’extrême droite, sans doute se laissent-ils davantage tenter par le PTB. Reste cette question: le Parti du Travail est-il un parti d’extrême gauche? « Il l’a été, répond Pierre Verjans. Mais depuis ses succès électoraux de 2012, il met en avant les revendications que François Mitterrand défendait en 1981. En aucun cas, il n’organise de cellule clandestine visant à s’attaquer à la police, par exemple… »
Recomposition de l’extrême droite
Si le PTB risque de sortir renforcé du prochain scrutin régional, qu’en sera-t-il de la droite extrême? Ces dernières semaines, celle-ci a connu quelques recompositions, particulièrement avec la création des Listes Destexhe. L’ancien franc-tireur du MR aura-t-il plus de succès que le Parti Populaire de Mischaël Modrikamen? Pas sûr. Au-delà, la création de ce parti tend sans doute aussi à affaiblir l’extrême droite francophone, puisqu’elle la divise. Conclusion: sauf surprise, la Belgique francophone devrait demeurer plutôt épargnée par la montée des extrêmes. Régis Dandoy opine. Et ajoute: « Même si on peut s’attendre à une plus grande dispersion des voix à l’issue du scrutin, les partis politiques traditionnel, ainsi que les écologistes, vont demeurer des acteurs incontournables de la politique à Bruxelles et en Wallonie ».
Vincent DELCORPS