Cinéma – L’Iran, entre tradition et renouveau


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Cinéma – L’Iran, entre tradition et renouveau
Par La rédaction
Publié le - Modifié le
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Le réalisateur de Taxi Téhéran revient avec un film confrontant le traditionalisme iranien à la vision moderne d’une adolescente en mal d’émancipation. Réaliste et prenant, Three faces fut auréolé du Prix du meilleur scénario au dernier festival de Cannes.

Jafar Panahi, c’est ce réalisateur iranien auréolé en 2015 par l’Ours d’or du meilleur film au festival de Berlin avec Taxi Téhéran. Face caméra, il incarnait un taximan accueillant à bord de son véhicule différents passagers, manière pour lui d’explorer la diversité sociale de Téhéran. Dans son nouveau film, Jafar Panahi évoque encore l’Iran, en s’éloignant cette fois-ci de la ville…
Three faces démarre en effet par une courte vidéo, vraisemblablement filmée avec un smartphone. Depuis une grotte perdue en montagne, une adolescente s’adresse à Behnaz Jafari, célèbre actrice iranienne : "J’habite dans le petit village de Saran, dans les environs de Mianeh. J’ai toujours voulu être comédienne. J’ai beaucoup étudié pour y arriver, mais ni mon père ni mon mari n’approuvent cette voie. Ils ne veulent pas d’une saltimbanque dans la famille. Vous n’avez jamais répondu à mes appels à l’aide. Ceci est mon dernier message, après quoi je compte me pendre…" La vidéo s’arrête et nous voilà, dans la deuxième séquence, à bord de la voiture du réalisateur Jafar Panahi, en compagnie de l’actrice visée dans la vidéo. En direction du village où se serait suicidée la jeune femme, le tandem compte élucider le mystère… L’adolescente a-t-elle vraiment mis fin à ses jours ou a-t-elle envoyé cette vidéo pour attirer l’actrice dans son village?
Auréolé du Prix du meilleur scénario au dernier festival de Cannes, Three faces évoque un fait apparemment courant en Iran. Grâce aux nouvelles technologies, certains adolescents envoient depuis quelques années des appels à l’aide à des célébrités, leur demandant de les sortir de leur condition.

Assigné en Iran jusqu’en 2030
Vu sa popularité dans son pays, Jafar Panahi a lui-même été visé par ces appels, raison pour laquelle il aborde le sujet. Comme des enquêteurs, nos deux héros débarquent dans ce petit village de montagne, confrontés à un Iran traditionnel, où les personnes sont attachées à leurs racines, instaurent leurs propres règles et veillent à ce que chacun tienne son rôle.
L’autre thématique que développe en parallèle le réalisateur est le cinéma. Peu évoqué mais présent en filigrane, le 7e art fait office d’appel du pied de la part du réalisateur. A déjà 58 ans, Jafar Panahi explique à travers Three faces l’arrivée d’une nouvelle génération, désireuse d’embrayer vers une carrière dans le cinéma et de changer les mentalités. Comme avec Taxi Téhéran, ce film a également créé du remous en Iran: le gouvernement a en effet interdit à Jafar Panahi de quitter l’Iran jusqu’en 2030. La raison? En 2010, le réalisateur avait tourné clandestinement Taxi Téhéran, ce qui n’a pas plus au Gouvernement iranien. Sa demande pour sortir exceptionnellement du territoire pour chercher son prix à Cannes n’a d’ailleurs pas été acceptée. C’est sa fille qui l’a représenté. Pour le contexte et pour le récit, nous vous conseillons donc de découvrir cette belle fable, pleine de poésie et de sincérité.

Géry BRUSSELMANS

Catégorie : Culture

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