Quentin Collin, 27 ans, se prépare à être prêtre au Grand Séminaire de Namur. Il est actuellement en cinquième année. Il nous raconte comment le désir de devenir prêtre lui est venu, et comment se passe le discernement de sa vocation.
Quel a été votre parcours avant d’entrer au Séminaire?
Je suis originaire de Habay-la-Neuve, en Province de Luxembourg, près d’Arlon. J’ai grandi dans une famille chrétienne. Etant enfant, j’ai eu l’occasion d’être acolyte, enfant de chœur. A 18 ans, je me suis posé la question de devenir prêtre, mais ce n’était pas très clair. J’ai alors fait des études d’instituteur, et j’ai été diplômé à 21 ans. J’ai travaillé comme instituteur pendant deux ans, et c’est à 23 ans que j’ai décidé de faire le pas et d’entrer au Séminaire. Aujourd’hui, j’ai 27 ans, et je suis en deuxième année de théologie.
Comment l’idée de devenir prêtre vous est-elle venue ? D’un seul coup ou progressivement ?
Il y a eu plusieurs choses. D’abord, par la fréquentation régulière de ma paroisse, à Habay-la-Neuve. Et aussi grâce au fait d’avoir vu des prêtres joyeux, dynamiques, engagés, qui rayonnaient réellement, qui étaient heureux dans leur choix de vie. Un événement décisif fut pour moi aussi ma mission d’acolyte dès l’âge de sept ans, où j’ai vraiment pu approcher le mystère du Christ qui se rend présent dans le pain et le vin consacrés. C’est là que j’ai découvert que Jésus pouvait me rendre heureux, réellement, si je décidais de tout quitter pour le suivre. Par la suite, tous les engagements que j’ai eus en tant que jeune ado ou jeune adulte dans ma paroisse natale ont creusé ce désir que je percevais.
Concernant l’appel à proprement parler, je dirais qu’il a été progressif, mais aussi décisif. Progressif dans le sens où c’est de façon répétée qu’une petite voix intérieure me disait: « Viens, suis-moi, donne-moi toute ta vie, je peux te rendre heureux ». Et puis il y a eu un événement décisif qui a fait que je me suis dit: « c’est maintenant que je fais le pas ». C’est un appel que j’ai ressenti dans une toute petite chapelle, près de chez moi, où je suis arrivé un jour en retard à la messe. Ce jour-là, je sentais au fond de moi une petite voix qui me disait: « Tu dois aller à la messe aujourd’hui, j’ai quelque chose à te dire ».
C’est difficile d’exprimer ce qu’on ressent, mais je l’ai vraiment senti comme ça. Et au moment où je suis entré, le prêtre proclamait l’évangile, et c’était un extrait de l’évangile de saint Luc, au chapitre 10 , qui disait : « La moisson est abondante, mais les ouvriers sont peu nombreux. Priez donc le maître de la moisson d’envoyer des ouvriers à sa moisson ». Je suis rentré dans cette chapelle, je me suis assis, et là je me suis dit : « Seigneur, voilà ce que tu veux me dire. C’est maintenant que je dois me mettre à ton service. » Cette phrase, « la moisson est abondante », m’accompagne depuis lors dans mon cheminement, et je l’ai d’ailleurs fait graver sur un dizainier que je porte.
Quand vous avez souhaitez devenir prêtre, que désiriez-vous précisément?
C’est un désir de faire connaître le Christ. Quand on a expérimenté dans sa vie qu’il nous rend pleinement heureux, on a envie de crier cette bonne nouvelle à tout le monde. Une bonne nouvelle, quand on l’a vraiment au fond de son cœur, on a envie de l’annoncer. C’est d’ailleurs ce qu’ont fait les premiers chrétiens. C’est le cri du cœur de la foi, dire à chacun qu’il est aimé d’un Dieu Père.
Il y a aussi un désir de donner sa vie pour les autres, d’aider l’autre dans ce qu’il vit, de lui dire que Dieu l’aime comme il est. C’est vraiment un désir de donner sa vie pour l’autre, pour Dieu, pour l’Eglise, parce que l’Eglise est belle, c’est le Corps du Christ.
Comment se passe le discernement de votre vocation, au Séminaire?
La formation d’un séminariste a un pilier intellectuel, avec un cycle de philosophie et de théologie. Une deuxième dimension est la vie spirituelle, parce qu’une vocation se discerne dans la prière, la prière personnelle et la prière en communauté. Cette prière rythme réellement notre journée, elle est comme la colonne vertébrale. On se réunit plusieurs fois par jour, entre séminaristes et formateurs, pour prier ensemble.
Il y a aussi la vie communautaire, parce qu’on est avec d’autres personnes qui ont aussi perçu cet appel de donner leur vie pour le Christ. Et nous ne nous sommes pas choisis entre nous, donc il faut vivre ensemble, créer une petite cellule d’Eglise. Le discernement se fait aussi au sein de cette communauté fraternelle.
Une dernière dimension, c’est l’engagement pastoral. Nous sommes envoyés dans une paroisse de stage. Ces quatre dimensions sont toutes imbriquées les unes dans les autres, et ont pour but de nous forger un cœur sacerdotal. Dans le discernement d’une vocation, les quatre sont à prendre en considération.
Comment se déroule votre stage en paroisse?
Je suis actuellement en stage dans la paroisse de Florennes, près de Philippeville. Nous y allons quasiment tous les week-ends, environ quatre weekends sur cinq. Nous y allons du samedi matin au dimanche en fin d’après-midi. On y accompagne le curé dans ses différentes acitvités. Ça peut être de la catéchèse, ou une activité culturelle. On vit le weekend avec la communauté, dans tout ce qu’elle peut vivre de concret. L’engagement d’un séminariste pendant son insertion pastorale va dépendre de plusieurs choses, notamment de l’année dans laquelle il se trouve. On ne va pas demander les mêmes engagements à un séminariste qui vient d’entrer au séminaire qu’à un séminariste qui est en fin de formation. Les engagements sont donc plus ou moins nombreux et très diversifiés, et cela dépend donc de ce parcours du séminariste, tout comme de la sensibilité du prêtre, ou même des demandes de la région pastorale dans laquelle on est insérés. Par exemple, s’il manque un catéchiste, le séminariste peut donner la catéchèse. S’il manque un coordinateur pour une mission pastorale particulière, il peut jouer ce rôle.
Y a-t-il des difficultés, des épreuves qui apparaissent pendant ce temps de discernement ?
Je pense que des épreuves, des doutes, on peut en éprouver dans tout choix de vie. Des moments d’hésitation, de remise en question ou de difficulté. Mais la centralité de la prière, de la vie spirituelle, nous permet d’aller au-delà de cela, ou de discerner pourquoi je vis telle hésitation, ou tel problème. Tout cela se vit dans la confiance, avec un ensemble de formateurs qui nous aident. Nous sommes aussi accompagnés personnellement par un père spirituel, quelqu’un à qui on peut tout dire, quelqu’un à qui on explique nos joies, nos peines, nos difficultés, nos hésitations, nos questionnements. Il est tenu au secret de la confession, donc il ne dira rien.
Il y a aussi un corps de formateurs, qui peut nous aider à déceler quelque chose qui va moins bien chez nous, qui nous aide en tout cas à avancer, à aller de l’avant, à mûrir, à creuser ce désir.
Comment percevez-vous la « fonction » du prêtre dans l’Eglise? Comment voyez-vous votre future mission ?
Le prêtre vit un ministère de communion. Je ne le perçois pas tant comme un animateur, mais plutôt comme quelqu’un qui initie, qui suscite un engagement, qui est pasteur, à l’image du seul bon pasteur qui est le Christ lui-même. Pour moi, le prêtre est serviteur. Nous sommes invités à nous effacer devant Dieu. Nous ne sommes que ses humbles instruments, des médiateurs entre Dieu et son peuple. Je pense que la mission du prêtre, c’est finalement de témoigner aussi de l’amour de Dieu, du cœur de Dieu qui bat pour chacun et chacune.
Christophe HERINCKX