Le Vatican a récemment rappelé les règles en vigueur pour choisir le pain et le vin pour la messe. L'occasion de revenir sur la fabrication des hosties en Belgique par les communautés religieuses.
Du gluten et des OGM
Dans une lettre aux évêques rendue publique, la Congrégation pour le Culte Divin et la Discipline des Sacrements met notamment en garde contre la vente sur Internet de produits non conformes. Le pain et le vin qui deviennent le corps et le sang du Christ pendant le rite de la messe doivent répondre à des normes strictes; le pain doit être azyme (sans levain) et de pur froment. L’ajout d’autres produits comme des fruits, du sucre ou du miel constitue «un grave abus». Or, la présence d'organismes génétiquement modifiés ne semble pas poser problème pour la Congrégation.
Traditionnellement, les paroisses se procurent vin et hosties auprès de communautés religieuses. Avec l'avènement de la mondialisation, s'est développé un véritable marché parallèle au détriment de la production locale. Dans ce cas, la Congrégation demande aux évêques de veiller à la traçabilité des produits utilisés pour s’assurer d’un «respect absolu» des normes canoniques de la part des producteurs.
Certaines entorses au règlement sont néanmoins autorisées pour les personnes ne pouvant absorber de pain ou de vin fermenté; le moût de raisin ou des hosties à faible teneur en gluten, mais pas 100% sans gluten, pour ne pas dénaturer le processus de panification.
Made in Belgium
Quelles sont les communautés religieuses qui fabriquent encore des hosties en Belgique francophone?
Au Carmel de Floreffe (diocèse de Namur), on fabrique des hosties depuis plus d'un siècle. Soeur Monique est responsable de la fabrication des hosties depuis 1970: "On essaie de se couler dans le progrès et de s'adapter à la demande... qui a fortement diminué." Les hosties sont fabriquées avec de la farine, commandée auprès d'un grossiste bruxellois, et de l'eau courante dont la qualité est contrôlée deux fois par an par l'AFSCA. Quatre soeurs s'occupent de la fabrication qui se déroule en plusieurs étapes: préparation de la pâte, cuisson, humidification, découpage, tri, pesée et emballage. La communauté produit annuellement autour de 3 millions d'hosties. Comme nous l'explique Soeur Monique, "nous fabriquons 2/3 d'hosties brunes et 1/3 d'hosties blanches. La couleur brune est seulement due à un temps de cuisson prolongé."
Chez les bénédictines d'Hurtebise (diocèse de Namur), la fabrication d'hosties est plus récente; en 1989, les soeurs ont repris l'activité des dominicaines de Dinant qui souhaitaient arrêter leur production. Soeur Marie-Raphaël était alors novice: "A l'époque, nous faisions deux cuissons par semaine, aujourd'hui, nous n'en faisons plus que deux par mois." Quatre soeurs prennent en charge la cuisson. La pesée et le conditionnement des hosties, tâches autrefois dévolues aux soeurs plus âgées, sont aujourd'hui assurés par des personnes handicapées rémunérées pour ce travail.
Le Carmel de Cornillon (diocèse de Liège) et les Trappistines de Soleilmont (diocèse de Tournai) perpétuent également la tradition de fabrication d'hosties.
La concurrence polonaise
Des hosties de fabrication polonaise sont effectivement importées en Belgique. Moins chères, elles sont en plus généralement marquées d'une croix (ou d'une image), leur conférant un pouvoir d'attraction auprès de certaines communautés. Concernant le gluten, des demandes régulières sont adressées aux communautés religieuses mais "notre machine est bien trop complexe pour pouvoir programmer une production réduite d'hosties sans gluten", reconnaît Soeur Marie-Raphaël.
Sophie Delhalle