Des familles et des passionnés d’art sacré ont pu découvrir depuis début juin une toute nouvelle exposition dans le cadre verdoyant de Bonne-Espérance. Quarante pièces religieuses sont mises en valeur, comme témoins de notre histoire.
Le patrimoine religieux est en danger« , insiste l’abbé Jean-Pierre Lorette en ouvrant les portes de la nouvelle exposition sur « L’art sacré en Hainaut ». Le vicaire épiscopal du diocèse de Tournai poursuit: « A travers l’histoire des paroisses, des abbayes ou plus modestes couvents, c’est une part essentielle de notre passé qui est évoquée. » Quel meilleur lieu pour le vérifier que dans l’abbaye Bonne Espérance, au cœur du diocèse de Tournai, qui a elle-même subi les ravages du temps et de l’humidité. D’importants travaux de rénovation ont été entrepris dans la sacristie de la basilique, pour que les pièces prêtées par les différentes paroisses de la région puissent y être exposées.
Replongeons quelques années en arrière. D’une part, le patrimoine religieux qui ornait les murs des couvents et des petites chapelles du Hainaut est en péril, faute d’entretien et de vigilance. Une partie de ce patrimoine transitait vers un stockage dans de grands édifices (Mons, Charleroi, Tournai…). D’autres objets restent sur place où ils pouvaient subir des vols, des dégradations ou l’usure. D’autre part, le lieu emblématique de l’abbaye de Bonne Espérance, à Vellereille-les-Brayeux, prend l’habitude d’accueillir de plus en plus d’évènements diocésains. Cela donne l’occasion de constater les efforts fournis conjointement par la Compagnie des Anciens de Bonne-Espérance et le Séminaire de Tournai (propriétaire des lieux) pour remettre les murs et le bâtiment en état.
En 1973, avant que la sacristie ne soit fermée pour travaux, ses murs octogonaux avaient accueilli une exposition de l’art sacré représenté dans les paroisses de la région. A l’époque, une centaine de pièces étaient présentées au public. Quarante ans plus tard, le Centre d’histoire et d’art sacré du Hainaut (CHASHa) a choisi de présenter une exposition identique, même si elle couvre un espace plus restreint. Les statues, les ostensoirs et autres reliquaires sont rassemblés au sein de la sacristie qui brille désormais d’un blanc éclatant après une belle restauration du mur et des mobiliers.
Cette exposition est la première réalisation visible du CHASHa. La conservatrice Déborah Lo Mauro, qui en assure également l’animation, explique à quel point ces pièces peuvent servir d’outils pédagogiques. « En montrant un ostensoir, on peut expliquer à quoi il sert ainsi que l’importance du Saint sacrement. » De même, les statues de saint Norbert ou de saint Adrien renseignent-elles la dévotion spécifique qui est réservée à ces saints dans les églises de la région. Certaines de ces pièces étaient encore utilisées quelques jours après l’inauguration de l’exposition « L’art sacré se dévoile en Hainaut ».
Quand Deborah Lo Mauro n’est pas à Bonne-Espérance ou à Tournai (ou se trouve encore son bureau), elle circule à la rencontre des fabriciens pour les aider dans l’inventaire de leur patrimoine religieux. « Nous n’avons pas vocation à remplacer les conservateurs professionnels, précise Déborah Lo Mauro, mais plutôt à fournir des conseils en matière de préservation. » Il est vrai que les fabriques d’église sont composées d’équipes passionnées certes, mais bénévoles.
La conservatrice du CHASHa prend donc son bâton de pèlerin pour expliquer l’utilisation d’un logiciel d’encodage, en partenariat avec l’IRPA, qui permet de lister l’existence et l’état de chaque objet religieux. L’étape suivante du Centre d’histoire et d’art sacré du Hainaut consistera à mettre en place sur le site lui-même un lieu de dépôt. Ce conservatoire qui reste à aménager dans une aile spécifique de Bonne Espérance devrait bénéficier d’un espace de 420 m² fractionné en plusieurs locaux. Ainsi, les peintures, les sculptures, les tissus, etc., pourront être stockés de manière spécifique avec les meilleures conditions thermique et hygrométrique.
L’abbé Jean-Pierre Lorette, fier du résultat déjà visible dans l’espace muséal du CHASHa, précise qu’une collaboration croissante se fait avec les autres diocèses. L’existence de la commission interdiocésaine du Patrimoine religieux aide à la diffusion des consignes, sous la présidence de Christian Pacco: « Les églises de nos paroisses conservent aujourd’hui une charge symbolique qui ne se démode pas, elles sont la mémoire collective de ce que nos aïeux ont vécu. » Dans ce cadre, Deborah Lo Mauro a contribué à la réalisation d’un Guide pour l’inventaire du mobilier des églises paroissiales, qui est adapté de la version flamande, Centrum voor Religieuze Kunst en Cultuur.
Anne-Françoise de BEAUDRAP
Expo accessible tous les dimanches après-midi, jusqu’au 8 octobre.