Les négociations pour la Syrie que l’Iran, la Russie et la Turquie organisent au Kazakhstan, peinent à démarrer. Les groupes rebelles présents ont annoncé refuser d’être face au régime de Bashar al-Assad, régime qui continue de traiter ces rebelles de "terroristes".
Le désaccord porte surtout sur le cessez-le-feu que le Conseil de Sécurité des Nations-Unies a voté le jour de la Saint Sylvestre sur base d’un projet de résolution russe. Les parties belligérantes ne semblent en effet nullement avoir arrêté leurs combats, en particulier dans les alentours de Damas et cela en vue de contrôler l’alimentation en eau de la capitale.
Ankara, Moscou et Téhéran prétendent avoir invité aux pourparlers non seulement le régime au pouvoir à Damas mais aussi tous les groupes rebelles, sauf les combattants terroristes de Daesh et ceux de la filiale d’Al-Qaïda sur le territoire syrien. Cela n’est cependant pas exact, car "l’entité fédérale démocratique" n’est pas représentée non plus dans la capitale kazakhe Astana. Il s’agit d’une alliance de kurdes et chrétiens assyriens qui contrôle pourtant presqu’un quart du territoire de la Syrie.
Modèle nord-irakien
Début janvier, cette "Fédération démocratique du Nord de la Syrie" a élu une co-présidence pour un "organe exécutif", tel que son gouvernement se dénomme. Cette "administration autonome" s’inspire fortement sur ce qui se passe au Nord de l’Irak, où le gouvernement d'Erbil, dominé par les kurdes, détient de fait presque un quart du territoire irakien. La présidence du nouveau gouvernement nord-syrien est partagée d’une part par Fawza al-Yusuf, l’activiste kurde la plus populaire du Rojava (l’ouest en kurde), et d’autre part par le chrétien assyrien Sanharib Barsom, vice-président du Syriac Union Party. Ce dernier, le jour-même de l'investiture de Donald Trump comme nouveau président des États-Unis, s’est adressé dans aux chrétiens du monde entier: "De grâce, soutenez-nous !", s’est-il exclamé, "Et pressez vos gouvernements de soutenir notre jeune démocratie ! Car nous engendrons la ‘culture de liberté’ qui peut apporter des solutions durables aux problèmes du Moyen-Orient. Et qui plus est : cette ‘culture de liberté’ dont nous émanons est la seule garantie pour la survie à long terme des chrétiens en Orient."
La milice chrétienne délaissée
Mais cette "administration autonome" en Nord-Syrie n’existerait pas sans l’appui d’importantes milices kurdes et de la milice assyro-chrétienne dans la région. "Le 12 mars 2015, le Parlement européen a appelé le à nous soutenir", dit Sanharib Barsom. "Nous demandons dès lors aux gouvernements européens et à la nouvelle administration américaine de ne plus nous exclure de livraisons de matériel militaire. " L’Occident soutient en effet ouvertement un grand nombre de groupes rebelles kurdes et arabes dans le conflit syrien, mais la milice chrétienne - dont six hommes viennent de perdre la vie en combattant Daesh devant Raqqa - se sent plutôt délaissée.
Benoit Lannoo
Photo: Sanharib Barsom, co-président de l’administration autonome en Nord-Syrie. (DR)