Ils l'avaient annoncé. Et ils le font. Les directeurs de l'enseignement libre réagissent et continuent à exprimer leur mécontentement. Cette fois, ils ont envoyé un courrier aux parents dont les enfants sont inscrits dans un établissement du réseau libre.
Le constat de l'ADIBRA, l'association des directeurs de l'enseignement secondaire libre de Bruxelles et du Brabant wallon, est sans appel: "L'extrême lourdeur administrative de ce nouveau processus de recrutement et l'obligation fréquente de trouver plusieurs enseignants porteurs de titres très spécifiques pour assurer un horaire ou remplacer un professeur absent, amènent déjà des classes entières sans professeur depuis parfois plusieurs semaines."
Sur base de différentes sources, un constat s'impose: il y a pléthore d'enseignants en manque d'attribution, faute du titre requis ad hoc, et éclatement des équipes pédagogiques disséminées dans différents établissements. Il paraît difficile dans ces conditions d'assurer la poursuite et la mise en application d'un projet pédagogique cohérent, a fortiori sur le long terme. Cette situation est aux antipodes des recommandations de créativité prônées par le Pacte pour un Enseignement d'Excellence!
Disparition de l'autonomie
Les enjeux semblent évidents pour qui prend la peine de lire entre les lignes. En défendant l'école libre d'aujourd'hui, il s'agit d'assurer l'école de demain, une école qui prône l'autonomie des établissements scolaires avec des projets personnalisés et centrés sur les besoins des élèves. "Nous nous inquiétons non seulement des effets nuisibles de cette réforme mais davantage encore des décrets qui se préparent et qui risquent de réduire à néant notre autonomie et, avec celle-ci, l'adéquation entre notre système d'enseignement et les besoins des jeunes", alertent les membres de l'ADIBRA dans ce courrier daté du 3 octobre.
Sous couvert d'uniformisation, c'est la fracture sociale du pays qui pourrait se voir renforcée, avec encore davantage d'élèves inscrits dans les écoles privées (payantes) ou néerlandophones. Et quant à l'enseignement en immersion qui connaît un joli succès d'affluence, l'absence des titres de l'enseignement néerlandophone dans la liste des titres requis compromet sa pérennité. On le voit, l'enseignement est, une fois encore, le lieu de joutes politiques, qui sont loin d'être neutres.
Dans une récente interview publiée dans le journal "Dimanche", le président de l'ADIBRA, Patrick Dekelver prend position, sans tergiversation: "Ce qui fait notre spécificité disparaît de manière insidieuse. La Communauté française est en train de prendre le contrôle absolu des écoles du réseau. C'est insupportable." La sonnette d'alarme est tirée. Il sera vain de prétendre ne pas avoir été prévenu!
Angélique TASIAUX
Retrouvez l'interview de Patrick Dekelver dans l'émission "En débat", diffusée ce jeudi 6 octobre.